« La culture continue », a assuré le 29 décembre 2021 la ministre de la Culture alors que la France faisait face à une recrudescence de la pandémie de Covid-19 après plusieurs mois d’accalmie. « Nous sommes dans une démarche d'anticipation pour faire en sorte que le variant Omicron ne nous submerge pas et protéger ainsi le monde de la culture », a-t-elle poursuivi, en relançant les plans de soutien pour le monde de la culture, dont ceux pour les secteurs particulièrement touchés, comme le cinéma et le spectacle vivant.
Pourtant, 2021 avait été une année de renouveau pour le secteur culturel: reprise des activités culturelles, retour des grands événements chers aux Français, comme les festivals, expositions, cinémas, et – c'est sans doute le plus précieux aux yeux de tous – revitalisation du lien avec le public. Rétrospective.
La vie culturelle reprend des couleurs
Depuis le 19 mai, un vent nouveau souffle sur le monde la culture. Avec la réouverture des musées et monuments, des salles de spectacles et cinémas, des festivals et des bibliothèques et médiathèques, les Français peuvent retrouver l’offre inégalée proposée par ces lieux culturels. Et ils ne s’en privent pas, plébiscitant notamment les visites de monuments et d’expositions, les salles de cinémas et les concerts.
Les grands événements nationaux, organisés par le ministère de la Culture, font eux aussi leur retour, à commencer par les plus emblématiques d’entre eux, la Fête de la musique, qui célèbre les retrouvailles entre les artistes et leur public, et les Journées européennes du patrimoine. C’est aussi le cas de l’Été culturel, dont la première édition, lancée pendant la crise sanitaire, a suscité une belle adhésion. En 2021, la manifestation, qui s’est positionnée de façon plus marquée en direction du lien social et de la solidarité, a rencontré un succès mérité.
Le monde de la culture se réinvente
Ce redémarrage d’une vie culturelle riche et variée, on le doit d’abord à l’inventivité et à la créativité des artistes et des structures, mais aussi aux soutiens massifs que leur a apporté l’État : aides sectorielles et plan de relance, qui se déploie en soutenant, sur tout le territoire, les initiatives et projets culturels innovants, dont ceux de la Maison de la Culture de Bourges, d’une librairie à Laval, d’un ciné-concert à La Roche-sur-Yon ou de la cathédrale de Troyes.
Particulièrement touchés par la situation sanitaire, certains secteurs – les festivals, la photographie – ont fait le choix de réunir l’ensemble des professionnels autour d’un seul objectif : se réinventer. Ce fut le cas des États Généraux des festivals, qui se sont terminés le 1er décembre, aboutissant à la mise en place d’un soutien pérenne et de deux chartes clés sur l’éco-responsabilité et les engagements de l’État. Ce fut le cas aussi du Parlement de la photographie, qui s’est penché sur les profondes « mutations » du monde de la photographie.
Rebattre les cartes
Repartir de nouvelles bases, c’est l’un des enjeux majeurs auquel est confronté aujourd’hui le monde de la culture. Pour cela, il faut rebattre les cartes. C’est l’ambition du volet « création » du plan de relance. Baptisé « Mondes nouveaux », ce programme, qui bouscule les genres et les frontières, met l’accent sur 264 projets artistiques inédits qui ont reçu pour unique feuille de route ce mot d’ordre : ré-enchanter le monde. Une initiative très prometteuse.
Rebattre les cartes, cela veut dire aussi se mobiliser pour toucher de nouveaux publics : les jeunes avec la généralisation du pass Culture, les scolaires avec l’éducation artistique et culturelle et l’offre numérique du portail « Histoire des arts », les habitants désireux d’accéder aux richesses culturelles avec les Micro-Folies ou les personnes en situation de handicap. Une mobilisation qui passe aussi par les différentes ressources de la recherche et de l’innovation, suscitant des solutions parfois disruptives, toujours étonnantes.
Nouvelles solidarités entre les territoires
Rebattre les cartes, cela veut dire enfin réinventer les rapports – et les solidarités – entre les territoires. Exemple emblématique de cette solidarité, le prêt exceptionnel du cycle de tapisseries de la Dame à la Licorne, chef-d’œuvre iconique de l’art médiéval, par le musée national du Moyen Age, à Paris, aux Abattoirs, à Toulouse. L’intérêt pour les cultures des Outre-mer a également constitué un axe fort de la politique culturelle, comme le souligne une série d’études qui documentent les comportements culturels locaux. On le retrouve dans l’organisation des États généraux du multilinguisme, qui se sont tenus à La Réunion, et dans le soutien apporté à la création ultramarine.
La désignation de Villeurbanne au titre de première « capitale française de la culture », qui a été lancée le 7 janvier 2022, va donner un nouvel élan culturel à ce territoire. Redonner de l’attractivité aux centres des villes moyennes, c’est aussi l’un des enjeux du programme « Action cœur de ville », qui se déploie depuis 2018.
Pleins feux sur le livre et la lecture
La librairie – mais aussi tout ce que recouvre le monde du livre et de la lecture : bibliothèques, édition, médiation et bien sûr auteurs – a été au cœur des attentions en 2021, où l’on a célébré le 40e anniversaire d’une loi qui a fait date dans la vie culturelle du pays : celle sur le prix unique du livre. Ce dispositif, repris dans le monde entier par un nombre important de pays, connaît une belle vitalité, dont témoigne l’adoption récente de deux propositions de loi.
Grande cause nationale jusqu’en juin 2022, la lecture est mise à l’honneur notamment à travers l’exploration de nouveaux territoires : publics empêchés, zones rurales, personnes en situation de handicap, illettrisme, petite enfance.... Mention particulière pour les jeunes lecteurs, dont Jean-Claude Mourlevat, qui a reçu le prix Astrid-Lindgren 2021 – le Nobel de la littérature jeunesse – analyse avec la pertinence qui est la sienne les rapports qu’ils entretiennent avec la lecture. Décapant !
L’espace francophone, qui recèle d’importantes possibilités de développement pour l’économie du livre, constitue aussi une véritable pépite en matière de vitalité – et de diversité – lexicale et humaine. Cette richesse, une initiative unique en son genre l’a révélée au grand jour : le Dictionnaire des francophones. S’ouvrir à la langue de l’autre, c’est aussi le sens d’une initiative passionnante du ministère de la Culture au Collège de France où le grand essayiste Alberto Manguel nous entraîne sur les chemins de l’invention de l’Europe.
La place des femmes dans le monde de la culture
Impossible de terminer cette rétrospective sans évoquer un symbole fort qui aura durablement marqué l’année 2021 : l’entrée au Panthéon de Joséphine Baker. A travers la personnalité solaire de l’artiste, la Nation met en avant la géniale danseuse de revue qui affola le Paris des Années Folles, mais aussi la femme engagée au service de la France libre qui lutta toute sa vie contre le racisme et toutes les formes de discrimination. Un modèle revendiqué haut et fort par les jeunes générations d’artistes, qui n’a pas fini de nous enchanter.
A l’image de Joséphine Baker, la place des femmes dans le monde de la culture est en train d’évoluer. En témoigne, la floraison de récompenses dans les festivals de cinéma (Palme d’or à Cannes pour Julie Ducournau et Lion d’or à Venise pour Audrey Diwan) et dans les grands prix littéraires (prix Fémina à Clara Dupont-Monod, prix Médicis à Christine Angot et prix Renaudot à Amélie Nothomb. Mention particulière pour l’architecte Anne Lacaton, lauréate avec son homologue Jean-Philippe Vassal, de l’édition 2021 du prestigieux prix Pritzker, l’équivalent du Nobel de l’architecture. En témoigne aussi un ambitieux plan de lutte contre les violences et le harcèlement sexuels et sexistes, dont le volet consacré au spectacle vivant a été présenté par la ministre de la Culture.
2021 a été également l’année de la Fête de la radio, du retour de WEFRAC, les journées portes ouvertes de ces lieux originaux que sont les Fonds régionaux d’art contemporain, de la biennale de Venise d'architecture avec Christophe Hutin qui fait entendre la voix d'une architecture alternative, de la clôture de l'année de la BD, une initiative passionnante qui aura suscité de multiples intérêts...
3 temps forts de 2022
> la Présidence française du Conseil de l'Union européenne
> l'année croisée France-Portugal
> le 400e anniversaire de la naissance de Molière et le 100e anniversaire de la mort de Proust
Partager la page