Restauration du réfectoire-chapelle du XVIIIe siècle de l'abbaye de Clairvaux (2013-2015)
Après le bâtiment des Convers (XIIe siècle), l’ancien réfectoire-chapelle du XVIIIe siècle de l’ancienne abbaye de Clairvaux fait actuellement l’objet d’une importante campagne de restauration intérieure.
Cet édifice appartient à un ensemble monumental du XVIIIe siècle, dont la pièce maîtresse est le grand cloître, vraisemblablement réalisé par l’architecte Aubert.
Avec ce chantier, la DRAC marque, à la veille des célébrations du 900e anniversaire de l’abbaye, en 2015, le lancement de deux ans de travaux sur le site : quatre chantiers seront en effet menés simultanément, avec, en plus de celui du réfectoire, celui de la prison des enfants, celui des aménagements des espaces extérieurs et celui de la mise en sécurité du parcours de visite, avec pour objectif la mise en valeur de Clairvaux.
D’un montant de 2 400 000 €, la restauration du réfectoire-chapelle, financée par l’Etat-ministère de la Culture , est menée sous maîtrise d’ouvrage de la DRAC et sous la maîtrise d’œuvre d’Eric Pallot, architecte en chef des monuments historiques.
Les travaux, menés de 2013 à 2015, d’un montant de 4 500 000 €, ont été financés à hauteur de 4 036 966 € par l’Etat, 227 007€ pour le Conseil régional et 227 007€ pour le Conseil départemental. Ils poursuivent trous types d’objectifs :
La sauvegarde du site, son accessibilité au plus grand nombre et son adaptation à la mise en œuvre d’un projet culturel ambitieux.
Le bâtiment, édifié en 1774, à un moment ou l’abbaye de Clairvaux est à l’apogée de sa puissance, illustre bien le goût et l’exigence des abbés de l’époque.
Transformé en chapelle carcérale au XIXe siècle, il a conservé de nombreuses traces de ce nouvel usage. Il s’agissait de mener à bien la restauration intérieure en sauvant à la fois les décors du XVIIIe siècle et les traces ténues de sa transformation en chapelle, en revenant à l'état de 1813, date qui a vu le réfectoire transformé en chapelle.On retrouve ainsi la volumétrie générale du réfectoire du XVIIIe siècle, avec ses murs et plafonds de gypseries, ses lambris, mais également les transformations subies par ces derniers, avec la conservation des arrachements des ouvrages disparus (tribunes, murs de séparation…).
L’ambiance spécifique de l’édifice est préservée : celle de la prison, ainsi qu’une certaine rusticité des matériaux, dont les teintes altérées ou usées ont été, dans la mesure du possible, rétablies.
Le projet de restauration
Le projet prévoit une restauration, à l’identique, de l’état de 1813, date qui a vu le réfectoire transformé en chapelle. L’ensemble des dispositions actuelles sera conservé, ainsi que des témoignages de certains éléments disparus.
On retrouvera ainsi la volumétrie générale du réfectoire du XVIIIe siècle, avec ses murs et plafonds de gypseries, ses lambris, mais également les transformations subies par ces derniers, avec la conservation des arrachements des ouvrages disparus (tribunes, murs de séparation…).
L’ambiance spécifique de l’édifice sera conservée : celle de la prison, ainsi qu’une certaine rusticité des matériaux, dont les teintes altérées ou usées seront dans la mesure du possible rétablies.
Description du bâtiment
A l'image du grand cloître, l'aile sud du réfectoire présente des façades monumentales à deux étages, très ouvertes et sommées par une toiture à brisis et terrasson.
Un pavillon légèrement saillant du reste de la façade termine l’aile à l'ouest répondant à la symétrie des pavillons central et latéral de la composition d’ensemble.
A l’intérieur, le réfectoire-chapelle adopte des proportions majestueuses avec une élévation à deux étages, un plafond plat, des percements réguliers et symétriques qui apportent une lumière abondante, un riche décor de stuc, sur les murs et plafonds que complétaient des tableaux peints.
Les trois vie du bâtiment
L’ancien réfectoire des moines
Le réfectoire-chapelle prolonge, en direction de l'Ouest, l'aile Sud du grand cloître du XVIIIe siècle. Le grand cloître, commencé dès 1750, sous l'abbatiat de Pierre Mayeur, afin de mettre les vieux bâtiments de l'abbaye au goût du jour et accueillir un grand nombre de novices, est achevé en grande partie en 1767. Sa construction va entraîner la démolition des anciens bâtiments conventuels du Moyen Age.
Les travaux du réfectoire, projetés, en 1763, pour un "réfectoire voûté de 130 pieds de long et 40 de large", semblent débuter en 1774, et, comme pour le grand cloître, l’Architecte Aubert en suivra les travaux, qui s’achèveront en 1790.Cette aile accueille à l'Ouest les réserves et la nouvelle cuisine voûtées, et à l'Est le grand réfectoire des moines, ouvert sur deux niveaux. Elle s'intègre dans l'architecture symétrique à deux étages, développée sur le reste du grand cloître, offrant ainsi une façade Sud monumentale, de 140 mètres de long, qui aurait dû s’ouvrir sur un jardin qui ne verra jamais le jour.
Cet ensemble immense, anachronique pour son temps et la faiblesse de la communauté religieuse de l’époque (80 moines en 1734, contre 350 en 1515), marque par son équilibre, sa proportion et sa régularité et sa majesté, éloignée de l’idéal de simplicité cistercienne originelle. Les notions de confort et d’évolution stylistique du temps ont été prises en compte.
Le réfectoire, tout juste achevé, est, comme l’ensemble de l'abbaye, frappé par l'apposition des scellés le 17 novembre 1790, lors de la réquisition des biens ecclésiastiques.
L'abbaye est vendue, en janvier 1792, à Pierre Claude Cauzon, architecte à Bar-sur-Aube, qui établit une verrerie dans l'église et une papeterie dans le reste des bâtiments.
En 1800, il revend l'abbaye à Antoine Pierre Rousseau, qui la cède à son tour à l'Etat Napoléonien, le 27 août 1808, pour la somme de 350 000 francs. L'abbaye devient un dépôt de mendicité pour le département de l'Aube le 17 février 1809. L'architecte Gilbert est alors chargé de dresser un état des lieux de l'abbaye et un projet pour sa transformation en maison centrale de détention, qui sera créée le 24 novembre 1811.
En 1813, après l'achèvement de la démolition de l'église abbatiale commencée en 1809, le réfectoire est transformé en chapelle pour les détenus. Ces travaux, menés sous la direction de Jean Marchebeus, architecte, seront achevés et réceptionnés le 27 novembre 1814.
1813 : la transformation en chapelle pour les détenus
En 1813, après l'achèvement de la démolition de l'église abbatiale commencée en 1809, le réfectoire est transformé en chapelle pour les détenus, dite chapelle Saint Bernard :
- Un autel est construit à l'ouest de la salle, prolongé par une sacristie sous une tribune réservée à l'usage des gardiens.
- La moitié ouest de la salle est remblayée sur 80 cm pour recevoir cet autel.
- Trois niveaux, superposés d'une double tribune, occultée par une grille, sont construits à l'Est pour accueillir les prisonniers. On y accède par six baies percées dans le mur Est, après la démolition du grand escalier d'honneur du pavillon central. La fontaine est supprimée.
- Un parterre de bancs est aménagé en partie centrale.
- Les baies basses sont occultées par des lambris fixes accordés aux boiseries existantes. Elles sont barreaudées.
Ces travaux, menés sous la direction de Jean Marchebeus, architecte, seront achevés et réceptionnés le 27 novembre 1814.
En 1828, un quatrième étage de tribune surmontant les trois autres est construit, avec un accès depuis les combles du grand cloître, qui perce la corniche du plafond à l’Est. Le plafond de la chapelle, en mauvais état, est refait.
En 1859, une nouvelle chaire à prêcher est construite dans la chapelle.
Vers 1950, la sacristie et la tribune des gardiens à l'Ouest sont supprimées et l'autel est reculé à l'Ouest, adossé au mur.
Un état hybride, consécutif des démolitions diverses
En 1971, l'aile Sud, comme tout le reste du grand cloître, sont désaffectés de toute occupation pénitentiaire.
Le 26 octobre 1981, le grand cloître et l'aile du réfectoire et les cuisines sont classés Monuments Historiques.
Quatre campagnes de travaux d'entretien et de mise hors d'eau des bâtiments sont alors menées par la DRAC Champagne-Ardenne, sous la direction de JM Musso, Architecte en chef des monuments historiques, avec :
- de 1983 à 1988 : l'étaiement des charpentes et la mise hors d'eau du grand cloître, la démolition des tribunes des prisonniers, construites dans la partie Est.
- de 1992 à 1996 : l'étaiement de la charpente du pavillon sud-ouest de l'aile du réfectoire ; le tôlage du pavillon ouest; le repiquage de la couverture de l'aile sud et l'étaiement de sa charpente ; la protection extérieure des menuiseries du réfectoire ; divers sondages de reconnaissance des sols dans l'ancien réfectoire
Texte extrait de l'étude préalable d'Eric Pallot, architecte en chef des monuments historiques
La restauration en images
Commencée en septembre 2013, la restauration intérieure du réfectoire-chapelle du XVIIIe siècle de l’ancienne abbaye de Clairvaux se poursuit avec la fin de l'intervention sur le plafond et de ses éléments de décoration, tandis que celles sur les staffs, les moulures des murs et les huisseries...
Il a été décidé de restituer l'état de 1813, date à laquelle le réfectoire des moines a été transformé en chapelle pour les prisonniers. L’atmosphère particulière de l’édifice (abbaye et prison) sera ainsi préservée.
Le réfectoire du XVIIIe siècle se caractérise par son volume important, qui sera rendu, sans que soient totalement effacées les transformations subies au cours des siècles (les traces des arrachements des tribunes des prisonniers et des murs de séparation seront conservées).
L'intervention principale de cette première partie du chantier a porté sur les murs et plafonds de gypseries (décoration d'intérieur moulée et sculptée en plâtre ou en chaux).
Décoration (murs et plafonds)
L’intervention des staffeurs, plâtriers sur les médaillons et le plafond est terminée.
Celle des staffs et des moulures des murs est en cours.
Les peintres interviennent, à leur tour, sur les éléments de décoration du plafond plat en plâtre. Restauré au XIXe siècle, il conserve son décor de gypserie d'origine : corniches, soffites décorées de médaillons représentant des trophées de chasse, des instruments de musique, des végétaux. L'objectif est de rendre à l'édifice ses teintes d'origines.
Les propositions de teintes faites par le restaurateur sont discutées. Les teintes proposées ici ne seront finalement pas retenues. Il est demandé de moins accentuer le contraste. Le résultat, après dépose du plateau d'échafaudage :
Les menuiseries
L'ensemble des menuiseries en façades Nord et Sud a été déposée. Certaines baies (basses notamment) ont été modifiées et adaptées aux besoins d'une chapelle de prison et baraudées au XIXe siècle. Après restauration, avec conservation maximale des bois, les fenêtres sont en cours de repose, ci-dessous, vue de la façade sud.
Eclairage
Le plafond sera mis en valeur par un éclairage indirect, grâce à un ruban Led placé sur la corniche.
Les projecteurs seront orientés vers les médaillons restaurés.
Les systèmes d’éclairage et de mise en valeur des décors sont déjà installés, le positionnement des spots sera ajusté après la dépose de l’échafaudage.
Maçonnerie
La restauration des murs et des moulures pierre est achevée.
Après dépose complète du sol, et création d’un système de ventilation, le dallage initial est reposé.
Les enjeux de la restauration de l'abbaye de Clairvaux
Les choix de restauration et de mise en valeur de l’ancienne abbaye de Clairvaux se doivent de prendre en compte :
- Le passé complexe du site et les différentes époques de construction
- L’usage originel et l’usage transformé des bâtiments
- Le maintien de la permanence sur le site des vestiges des trois vies de l’abbaye : abbaye médiévale, abbaye classique et abbaye prison
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