Depuis 2018, la France se dote d’une stratégie nationale pour l’intelligence artificielle qui doit permettre d’accompagner l’accélération de la France dans ce domaine. Cet engagement signale bien le caractère structurant attendu de ces innovations technologiques qui touchent déjà aujourd’hui l’ensemble des secteurs culturels.
Ces évolutions soulèvent néanmoins des questions profondes et des défis complexes pour les acteurs et les politiques culturelles. Les débats sont vifs, sur fond de craintes existentielles sur l’avenir des métiers artistiques, de lutte pour la diversité linguistique et culturelle ou encore du respect du droit d’auteur. Si elles concernent tous les secteurs de la vie économique et sociale, elles ont bien sur des répercussions dans le domaine de la création artistique, et ceci à deux titres.
En premier lieu, ces technologies peuvent modifier profondément les modes de faire des artistes, leurs conditions d’exercice. Si on imagine sans peine le profit que pourront tirer de l'intelligence artificielle générative les producteurs de contenus destinés à la consommation culturelle de masse (doublage quasi instantané des voix, réutilisation de personnage prototypes en série, production de masse d’histoires au scénario calibré, génération de musique, etc ), quelle opportunité présentent ces outils pour les projets artistiques originaux et singuliers ? Peuvent-ils permettre de faire advenir des formes artistiques inédites, et inspirer les artistes à explorer des territoires créatifs encore inconnus ? En particulier, vont-ils permettre un accès plus facile à la création pour certaines personnes, favorisant d’autres formes de pratique artistique amateur ? Ou au contraire, vont-ils contribuer encore plus à saturer l’espace d’images ou d’autres médias reproduisant du fait des biais algorithmiques les stéréotypes les plus courants ? La question de l'auctorialité des œuvres produites avec IA sera bien sûr également au cœur des débats. Il existe une crainte que la prolifération des œuvres générées par l'IA puisse dévaluer les œuvres créées par des humains, tant sur le plan économique que sur le plan symbolique. Quels défis ces innovations représentent-elles donc en termes de formation initiale et continue des artistes aux technologies d'IA pour qu'ils puissent les utiliser de manière informée et critique ? Quel type de collaboration Homme-Machine privilégier pour cocréer des œuvres en s’appuyant sur les capacités computationnelles de l'IA ? Assiste-t-on à un déplacement du geste créateur vers le prompt ?
En second lieu, comme toute révolution technologique, l’IA générative aura possiblement un fort impact sur les pratiques et habitus sociaux, sur les imaginaires. En un mot, elles peuvent changer notre monde, et les artistes sont en première ligne pour rendre sensible ce qui advient. En particulier, on perçoit déjà que le terme même choisi pour désigner ces nouveaux outils, « intelligence artificielle », influe sur notre perception de ces logiciels, que nous considérons obscurément comme des interlocuteurs, car leur design, la capacité de s’adresser à eux en « langage naturel », nous les fait appréhender comme des « autres » crédibles. Quel défi de représentation cela représente-t-il pour les artistes ?
A partir d’exemples de projets documentés, le groupe tentera d’analyser les opportunités offertes par l'IA générative pour la création artistique, mais également d’identifier les risques et les défis associés à l’utilisation de ces technologies, afin d’explorer comment les acteurs culturels peuvent au mieux accompagner les artistes dans ce nouveau champ.
Référent : Franck MADLENER, directeur de l’IRCAM
• Flavien BAZENET, directeur général délégué, Le Cube Garges, maître de conférences à l’IMT-BS (Institut Mines-Télécom Business School)
• Hervé COLINMAIRE, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche
• Eléonore HOLTZER, architecte et urbaniste de l’Etat, cheffe de l’unité départementale de l'architecture et du patrimoine de Meurthe-et-Moselle, direction régionale des affaires culturelles du Grand Est
• Jérémie PATRIER-LEITUS, député du Calvados
• Igor PRIMAULT, délégué au mécénat, Universcience
• Astrid REYMOND, secrétaire générale de la Fédération des entreprises du spectacle vivant, de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma (FESAC)
• Anne-Sophie STEINLEIN, directrice générale de la société YouScribe
Partager la page