1.1428 - Super Belvédère
Saint-Gabriel, au sortir du centre-ville
références documentaires : Patrimoine XXe, architecture domestique
n° répertoire édition X : 1428, p 40. 2005
Conception & rédaction T. Durousseau arch., 2007
désignation : Résidence Belvédère ou Super Belvédère
57 rue Merlino, quartier Saint-Gabriel 13013
Lambert 3 : latitude 3.0480 ; longitude 43.3218
Accès : bus 89 Canebière - Le Canet
propriétaire : Copropriétés de Super Belvédère
Syndic : Cabinet Paul Stein, 29 boulevard V. Delpuech 13006
programme : Ensemble de 160 Logements Populaires et Familiaux (LOPOFA).
Maître d'ouvrage : Société Civile Immobilière Bon Secours.
Ensemble de 3 immeubles et garages.
dates, auteurs : Avis favorable du ministère : 1955. Fin des travaux : 1957.
G. Candilis, A. Josic, S. Woods et Guy Brunache et C. Giampietri, architectes.
Henri Piot et Paul Dony, ingénieurs.
Entreprises GER.
site : Proche des activités industrielles du Canet. Sur la rive ouest du plateau de Bon Secours, entre Les Rosiers et le groupe Paul Strauss. Altitude entre de 59,30 et 53,90 m . Secteur d'habitation discontinue E sur le Plan d'Urbanisme Directeur de 1949.
plan de masse : Implantation en front selon des redents nord-sud, vue panoramique sur la baie de Marseille. Bâtiments orientés nord-sud de façon systématique. Distribution en demi-niveaux s'adaptant à la déclivité. Épannelage : Hauteur constante, R+4 sur caves.
bâti : Constructions en béton, murs et planchers avec façades en blocs de béton. Escaliers de distribution en articulation entre immeubles. Typologies génératives avec peu d'espaces de balcon et de loggia. Très bon état général.
cf. notices : 1220 - Le Duc - 1308 - Petit Séminaire
sources : AD : 2071 W 9 (32.729, 32.446), 165 W 71
Superbelvédère, film d'amateur de Henri Moret
Contexte :
À la suite de la campagne de relogement suscitée par l'abbé Pierre en février 1954, sont créés les Logements Économiques de Première Nécessité réalisés dans l'urgence et rapidement qualifiés de taudis neufs. Un an plus tard, est lancée l'Opération Million (un logement pour un million) concours de plans types, destinés aux travailleurs pauvres "ne pouvant supporter les loyers de rentabilité afférents aux HLM à normes ordinaires". Ainsi, sont réactivés les Logements Économiques Normalisés (LEN) imaginés dès 1953. À Marseille, où vont se construire plusieurs centaines de LEPN, les opérations Million vont se développer par milliers de logements, avec des signatures d'architectes comme J. Rozan, P. Yard ou P. Francescini. G. Candilis, premier prix du concours national, ne réalisera pas moins de 2500 Logements Économiques Normalisés entre la Région Parisienne et les Bouches-du-Rhône. Rapidement les villes vont aider de façon indirecte la construction de logements Million améliorés(Logements Populaires et Familiaux) destinés à des travailleurs un peu moins pauvres qui auront droit à de meilleures prestations. Ce sera le cas de la Résidence Belvédère, LOPOFA, correspondant à une petite accession à la propriété. L'opération qui obtient un agrément du ministère de la Reconstruction et du Logement à Paris ne paraît pas avoir eu besoin de dossier de permis de construire. Plusieurs variantes semblent avoir été étudiées dont une de quatorze étages, pour terminer avec le modèle de quatre étages qu'on connaît.
Description :
Il est difficile de décrire le projet de Candilis sans se référer au corps de doctrine qu'il a mis au point pour le concours. G. Candilis connaît Marseille pour avoir participé au chantier de la Cité Radieuse. Alors l'un des fondateurs du Team Ten, il prendra ses distances avec Le Corbusier lors des derniers congrès internationaux d'architecture moderne (CIAM), privilégiant la notion d'habitat à celle de logis. Il aura dirigé l'atelier des bâtisseurs (ATBAT) au Maroc où il découvre les tissus urbains continus de l'habitat nord-africain, analysés par M. Ecochard. Tout cela en fait un des premiers critiques de la monumentalité du grand ensemble.
Il reste néanmoins d'une grande rationalité moderne, donnant priorité à l'organisation du plan qui articule les fonctions servies : chambres, séjours conçus pour pouvoir évoluer, et les fonctions servantes (salles d'eau, cuisines) pour lesquelles il recherche un rendement maximum pour l'alimentation, les évacuations et la ventilation.
Les couloirs de distribution ont disparu, au profit d'un double réseau de circulations commandées qui, du séjour, arrivent aux chambres par un sas ; ou bien alors passent de la cuisine aux chambres par la salle de bain qui possède une double porte. Les parties communes sont extrêmement réduites, l'escalier commun est encastré entre les pignons du bâtiment, distribuant deux appartements à chaque demi-étage par une courte coursive. Ouvert à l'air libre, l'escalier est une véritable charnière qui permet de s'adapter aux déclivités du terrain grâce aux demi-niveaux. L'articulation de l'escalier permet de générer des types de bâtiments en redents par saillies et retraits des immeubles, ou bien en biais par un système de retraits successifs.
Les trames constructives sont économiques et de courtes portées, entre 2,60 m et 3,20 m pour des murs de 15, 20 et 25 cm d'épaisseur. La structure porteuse est aussi bien réalisée en béton armé qu'en aggloméré de ciment. Les façades ont une certaine isolation thermique grâce à des parpaings de pouzzolane enduits. Une amélioration de l'isolation phonique est réalisée par interposition de laine de verre entre le parquet et la dalle béton.
La conception des façades fait partie du langage de l'architecture moderne où la baie ne résulte plus du percement d'un mur mais de l'intervalle délimité par la structure (poteaux, têtes de voiles) et les planchers d'une part, et d'autre part panneaux de remplissage autonomes.
Dans le dossier du concours, les architectes écrivent que la fenêtre n'est plus un trou dans un mur, mais un élément organique et plastique". Ils vont différencier la prise de lumière déterminée par une imposte courant au plafond sur la largeur de la pièce, et la vue sur l'extérieur par une porte-fenêtre dont l'allège est vitrée, permettant même aux enfants de voir dehors. Cette disposition fera de la partie pleine de la paroi, un panneau ne couvrant qu'une partie de la façade et délimitant les vides horizontaux et verticaux. Par association et regroupement, se constitue un motif formant l'armature du dessin de la façade qui se veut plus généré que composé.
La résidence Super Belvédère est le seul des trois groupes d'habitations marseillais issu du concours Million à avoir conservé, même partiellement, le dessin des façades d'origine et notamment les impostes courantes. Pour les autres groupes, bailleurs et architectes ont largement et systématiquement transformé l'architecture de Candilis, Josic et Woods.
Pourtant Super Belvédère a aussi fait l'objet d'une importante réhabilitation entièrement financée par les copropriétaires, et qui a maintenu le caractère architectural des immeubles. C'est aujourd'hui le seul témoin de cette architecture sérielle, populaire et moderne de la période, et à ce titre, elle est exemplaire. Le cas est suffisamment rare pour ne pas signaler au passage le rôle actif du syndic dans la réhabilitation.
Auteurs :
Georges Candilis, architecte (1913-1995),
reviendra plusieurs fois à Marseille entre 1947 et 1960.
1947-52, Chantier de la Cité Radieuse, il rencontre S. Woods avec lequel il s'associe. Il participe à l'ATBAT-Maroc aux travaux de M. Ecochard sur l'Habitat Collectif Méditerranéen,
1949, Pavillon Eternit à la Foire de Marseille,
1953, CIAM IX à Aix en Provence,
1954, participe à la constitution du Team Ten, rencontre A. Josic qui rejoindra son équipe,
1955, Concours Million à Marseille, Bon Secours, Petit Séminaire avec J. M. Sourdeau, Le Duc,
1956-61, 1 800 logements de Bagnols-sur-Cèze avec C. Delfante,
1958, Concours des 4000, Malpassé, Saint-Barthélemy, La Viste,
1960, Concours pour l'extension de l'Hôtel de Ville de la ville de Marseille,
1961, Le Mirail à Toulouse,
1962, Le Petit Nice à Aix-en-Provence,
1963, Les Muriers à Manosque.
Camille Giampietri, architecte
1958, immeuble d'habitation, Saint-Loup, Marseille,
1963, ensemble immobilier à Tarascon,
1964, immeuble d'habitation, chemin du Merlan, Marseille.
Fichiers associés :
- Carte du 14e arrondissement de Marseille
- Notice monographique imprimable
© Thierry Durousseau, 2004-2005
Partager la page