Au début du XIXe siècle, les médecins commencent à utiliser des exercices physiques pour traiter diverses pathologies. En 1847, Napoléon Laisné popularise la gymnastique médicale collective. Ce traitement évolue ensuite vers la kinésithérapie, qui cible les parties déficientes du corps.
L'exposition présente une soixantaine d'objets : moulages, matériel de mécanothérapie, appareillages orthopédiques, photographies et ouvrages. Elle met en lumière l'évolution de la médecine de réhabilitation, des prothèses aux exosquelettes, ainsi que les améliorations du matériel roulant. Des photographies des hôpitaux spécialisés de l'AP-HP illustrent les initiatives d'insertion des patients au XXe siècle.
L’émergence de nouvelles thérapies aux XIXe et XXe siècles
À partir du XIXe siècle, l'étude du vivant devient une priorité pour les médecins. À l'Hôtel-Dieu de Paris, le chirurgien Dupuytren se consacre à l'anatomie et étudie sur lui-même la contracture de la main qui porte son nom. Au début du XXe siècle, Bourneville et Charcot soulignent l'importance de l'influx nerveux dans le mouvement corporel. Des avancées techniques comme la photographie et le cinéma permettent de visualiser ces mouvements. Les figures en plâtre de Paul Richer illustrent ces découvertes.
© Musée de l’AP-HP
Cette nouvelle compréhension des processus du mouvement inaugure une ère thérapeutique centrée sur la stimulation artificielle pour la rééducation, plutôt que sur l’amputation ou le remplacement des membres déficients. Le mouvement devient un véritable remède, avec une participation accrue des patients dans leur thérapie. Grâce aux nouvelles technologies, les prothèses offrent désormais une intégration plus personnalisée et fonctionnelle au corps.
À la fin du XIXe siècle, des travaux majeurs sont réalisés pour comprendre les altérations du corps. La photographie, alors nouvel outil, remplace les dessins idéalisés et fournit des images cliniques instantanées. Les moulages anatomiques, également populaires, complètent cette imagerie médicale. Ces représentations deviennent des outils pédagogiques essentiels dans l’enseignement médical. Diffusées dans les publications et les musées, elles jouent un rôle crucial dans le progrès de la médecine et l'amélioration des soins.
La photographie médicale
Albert Londe, M. Henri Mue. Spasme du sterno-mastoïdien, 22 octobre 1883, photographie © Musée de l’AP-HP
En 1884, Albert Londe (1858-1917) devient directeur du laboratoire photographique du service de neurologie de Jean-Martin Charcot (1825-1893), contribuant ainsi à sa renommée. Il introduit des techniques novatrices, comme la chronophotographie, qui capture des images à intervalles réguliers pour décomposer le mouvement. La durée des prises de vue est ajustée en fonction des postures, des attitudes et des mouvements des patients. Ces innovations offrent une meilleure compréhension des pathologies et affinent l’observation clinique des médecins.
Le musée d’anatomopathologie de l’hôpital de Bicêtre
Désiré-Magloire Bourneville (1840-1909), ancien assistant de Jean-Martin Charcot, est nommé aliéniste pour la section des enfants à l'hôpital de Bicêtre en 1879. Dévoué au traitement des enfants, il contribue à l'émergence de la neuropsychiatrie infantile. Dès 1880, il crée un musée anatomopathologique dans son service, inspiré du modèle pédagogique de celui de la Salpêtrière. Il envisage même de regrouper ces musées pour les rendre accessibles aux étudiants et aux médecins.
Traumatismes de guerre
Les conflits armés, de la guerre franco-prussienne à la Seconde Guerre mondiale, ont causé des blessures massives. Les soldats ont subi des traumatismes graves dus aux éclats d’obus, gaz toxiques, tirs de mitraillettes, brûlures de lance-flammes et maladies contagieuses. L’industrialisation de la guerre et les conditions de vie précaires ont causé des dommages sans précédent au XXe siècle. Plus de 3 millions de soldats sont sortis de la Grande Guerre avec des blessures graves, des déformations ou des troubles névrotiques. La Seconde Guerre mondiale a surtout touché les civils, notamment lors des bombardements aériens. Les médecins ont dû intervenir rapidement pour sauver les victimes, puis se concentrer sur la reconstruction et la réhabilitation des blessés. La chirurgie réparatrice, l’orthopédie, la stomatologie et la kinésithérapie ont collaboré pour restaurer l’apparence et la fonctionnalité des corps et des visages endommagés.
Blessures de la face et invalides de guerre
Vue de l'exposition © Musée de l’AP-HP
Les blessures faciales sont parmi les plus sévères en raison de leur impact esthétique et psycho-social. Dès la guerre de 1870, l'hôpital militaire du Val-de-Grâce à Paris crée un service de prothèses faciales pour traiter les visages gravement endommagés. La Première Guerre mondiale introduit le terme "gueules cassées" pour décrire les soldats ayant perdu des mâchoires, nez ou yeux à cause des éclats d’obus. Les médecins utilisent opérations, greffes et prothèses pour restaurer l’apparence des victimes.
Après 1870, des plaques commémoratives honorent les combattants. La loi du 31 mars 1919 établit un droit à réparation pour les anciens combattants et victimes de guerre, incluant les préjudices corporels, matériels et les aides à la réinsertion. Les soldats mutilés, notamment ceux de la Première Guerre mondiale, bénéficient des avancées médicales telles que la radiographie et la chirurgie, ainsi que des traitements comme l'hydrothérapie, l'électrothérapie, la mécanothérapie et les prothèses, grâce à des centres spécialisés.
Le mouvement comme traitement médical
Au XIXe siècle, la gymnastique médicale se développe dans les hôpitaux de l'Assistance publique pour répondre aux besoins hygiéniques et thérapeutiques. Initialement destinée aux enfants, elle traite les maladies causées par des contractions musculaires pathologiques. Introduite en 1847 à l’hôpital des Enfants malades pour les choréiques et en 1849 à l’hospice de la Salpêtrière pour les épileptiques, elle s’étend aux traitements orthopédiques et devient aussi une méthode éducative pour les déficients intellectuels, notamment à l’hospice de Bicêtre.
Séance de rééducation. Reproduction de tirage photographique © Archives de l’AP-HP
À la fin du XIXe siècle, la gymnastique évolue en kinésithérapie, axée sur la rééducation individuelle. Les orthèses immobilisent les parties endommagées, tandis que les appareils de mécanothérapie aident les membres immobilisés à réapprendre à bouger, complétant les soins médicaux.
De la gymnastique médicale à la gymnastique rééducative
Au XIXe siècle, trois types de gymnastique aident les enfants à prendre conscience de leur corps. La première, "rudimentaire et élémentaire", s'adresse aux enfants de 2 ans et plus avec des troubles moteurs. La "petite gymnastique", développée par Jules Léandre Pichery et mise en œuvre à l'hospice de Bicêtre depuis 1880, est destinée aux enfants de moins de 13 ans. Enfin, la "grande gymnastique" s’adresse aux adolescents de 13 à 20 ans et se rapproche des méthodes scolaires.
Séance de rééducation. Reproduction de tirage photographique © Archives de l’AP-HP
La gymnastique médicale évolue en gymnastique rééducative, devenant un complément thérapeutique supervisé par médecins et professeurs de gymnastique. D'abord pratiquée en groupes selon les pathologies, elle se personnalise avec les progrès médicaux, permettant une rééducation motrice individualisée pour aider les patients à retrouver et contrôler leurs mouvements.
Réadapter le corps et réintroduire le mouvement
Depuis l'Antiquité, des prothèses et orthèses rudimentaires aident les estropiés à conserver leur autonomie. Au XIXe siècle, de nouveaux matériaux modernisent ces dispositifs. Les avancées en anesthésie et en asepsie prolongent les interventions chirurgicales, menant à un renouveau de la chirurgie réparatrice. Ces progrès aboutissent, dans les années 1950, à la médecine de rééducation et de réadaptation.
Vue de l'exposition © Musée de l’AP-HP
Cette discipline vise à réparer les membres estropiés et réintégrer les patients dans la société. Les nouvelles thérapies encouragent le sport adapté aux personnes handicapées. En 1948, le Dr Gutmann organise des compétitions de tir à l'arc et de basket en fauteuil roulant pour des paraplégiques à Stoke Mandeville, en Grande-Bretagne. En 1952, des compétiteurs néerlandais rejoignent l'événement, qui devient annuel et pose les bases des Jeux paralympiques.
La réadaptation à l'Assistance publique
La loi Cordonnier du 2 août 1949 impose aux hôpitaux de créer des services de rééducation et réadaptation fonctionnelle pour aider les aveugles et les grands infirmes. L’objectif est de permettre aux patients ayant perdu leurs capacités physiques de se réinsérer dans la société malgré leur handicap. Cette approche marque un changement de perspective, en se concentrant non seulement sur les soins, mais aussi sur l’aide à vivre avec le handicap.
© Archives de l’AP-HP
Des essais couronnés par les premiers jeux paralympiques à Rome en 1960
Deux hôpitaux de l'Assistance publique se distinguent dans ce domaine : l'hôpital maritime de Berck et l'hôpital Raymond-Poincaré. Initialement centrés sur des pathologies différentes - la tuberculose osseuse pour Berck et la poliomyélite pour Raymond-Poincaré - ces établissements se spécialisent dans la réadaptation des personnes handicapées, les aidant à retrouver une autonomie malgré leurs pertes physiques.
Les essais réalisés dans les hôpitaux de Garches et Berck ont démontré les bienfaits thérapeutiques des mouvements gymniques, favorisant le développement du sport adapté aux personnes handicapées physiques. Cette avancée a été couronnée par les premiers jeux paralympiques, organisés à Rome en 1960, cinq jours après les Jeux olympiques. En revanche, l'intégration du sport adapté pour les personnes déficientes mentales reste insuffisante.
Le lieu. Installée dans l’église Saint-Louis, au cœur de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, l’exposition bénéficie d'un cadre patrimonial exceptionnel à la croisée des dimensions cultuelles et culturelles, souvent méconnu du grand public. Ce bâtiment, érigé sous le règne de Louis XIV par l'architecte Louis le Vau, puis par Libéral Bruant, se distingue par son plan en croix grecque, conçu pour optimiser la répartition des patients selon leurs pathologies. Sa coupole octogonale centrale, culminant à plus de 60 mètres au-dessus du chœur, ajoute à son caractère remarquable et à son histoire architecturale.
Informations pratiques AP-HP (dates & horaires de l’exposition, visites guidées gratuites, adresse du lieu, plan d'accès…
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