Faits d'hiver revient, jusqu'au 15 février, pour tisser les fils de la mémoire contemporaine sur les scènes franciliennes. Avec 23 spectacles – dont 9 créations et recréations - et 50 représentations dans 20 lieux emblématiques, le festival offre un riche dialogue intergénérationnel. Un moment de partage où le passé artistique nourrit l’innovation et invite toutes les générations à se retrouver. La DRAC Île-de-France apporte également un soutien spécifique à cinq spectacles.
Christophe Martin, directeur de micadanses-Paris et du festival Faits d'hiver, met en lumière l’essence même de cette 27ᵉ édition placée sous le signe de la mémoire, ou pour reprendre ses termes, de "l’hier contemporain". Son texte s’ouvre sur une réflexion qui transcende le simple regard rétrospectif. Il affirme : "À quoi bon se souvenir si ce n’est pour relancer le présent, l’interroger et, pourquoi pas, le revivifier ?" Cette interrogation résonne comme une invitation à ne pas enfermer le passé dans une vitrine statique, mais à s’en nourrir pour insuffler du sens à nos démarches actuelles.
"La danse se conjugue aussi au passé, ce qui ne met pas en doute sa faculté d’innovation."
L’auteur évite l’écueil d’une nostalgie vaine ou d’une soumission aveugle à l’histoire. Il propose une vision dynamique où la mémoire devient une matière vivante, malléable, porteuse d’innovations. Cette approche se traduit par une observation pénétrante : "La danse se conjugue aussi au passé, ce qui ne met pas en doute sa faculté d’innovation." Ces mots rappellent combien la création artistique, bien que souvent ancrée dans les traditions et les techniques héritées, ne cesse de se réinventer.
En évoquant le chantier de Notre-Dame de Paris comme métaphore, Christophe Martin illustre parfaitement cette idée : reconstruire "à l’identique" est, paradoxalement, un acte de modernité, car il exige adaptation et dialogue avec le présent. Il poursuit en affirmant qu’"inventer est rare", mais que les "univers artistiques personnels et signés sont nombreux". Avec cette nouvelle édition, Christophe Martin dessine le mouvement et célèbre ainsi la richesse des approches individuelles, tout en reconnaissant la difficulté de produire quelque chose d’entièrement inédit. C’est dans ce paradoxe que réside la puissance de la création artistique contemporaine.
"le rôle de la mémoire dans la création artistique"
Enfin, la richesse du "terreau" évoquée par l’auteur, composée de créations, reprises, hommages et redécouvertes, traduit l’écho des préoccupations des chorégraphes d’aujourd’hui. Comme il le souligne, ces œuvres ne sont pas de simples regards vers le passé, mais bien des "reflets de notre société en interrogation". Le directeur du Faits d'hiver résume la pertinence d’un dialogue constant entre la mémoire et l’actualité. Christophe Martin offre une vision éclairée sur le rôle de la mémoire dans la création artistique, une mémoire qui, loin d’être un poids, devient un levier d’innovation et un miroir de nos enjeux contemporains.
Aurélie Berland / Christine Gérard "Automnales, Nu perdu, La Griffe"
Christine Gérard, figure incontournable de la danse contemporaine française et fondatrice de la compagnie ARCOR en 1974, est célébrée à travers la recréation de trois pièces emblématiques : "Automnales, Nu perdu, et La Griffe". Ces œuvres témoignent de son approche subtile mêlant abstraction et expressionnisme, influencée par Mary Wigman et enrichie par sa pédagogie au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. De 2003 à 2006 participation comme expert à la DRAC Ile-de-France. 8 février, Conservatoire à rayonnement intercommunal de danse Joséphine Baker (Villejuif)
Automnales (1986), commande de la Biennale de Lyon, rend hommage à Mary Wigman, explorant les imaginaires des soli expressionnistes.
Nu perdu et La Griffe, introspectifs et imprégnés de fragilité, interrogent les attentes du spectateur, proposant une danse ouverte et sensible.
Aurélie Berland, ancienne élève de Gérard et notatrice Laban, guide cette recréation avec une rigueur qui honore les œuvres "oubliées" tout en revisitant l’histoire de la danse contemporaine.
Carole Bordes – GIANTS (création)
Avec "GIANTS", Carole Bordes explore le potentiel libératoire du mouvement. Cette pièce met en scène une micro-société où sept interprètes incarnent des géants, transcendant leurs limites à travers une gestuelle puissante et virtuose, inspirée de la technique Mattox. La scénographie mythologique, combinée à une bande-son mêlant batterie et new jazz, amplifie la quête d'émancipation. Soutien DRAC Île-de-France – Aide au projet. 31 janvier, Théâtre municipal Berthelot-Jean Guerrin (Montreuil)
Geisha Fontaine & Pierre Cottreau "Ne faites pas la moue #1"
"Ne faites pas la moue #1" mêle danse et philosophie dans une performance humoristique et réflexive. Geisha Fontaine, chorégraphe et docteure en philosophie, relie concepts philosophiques et mouvements dans un duo inventif, abordant des thèmes intemporels et célébrant le corps pensant, critique et politique. Coproduction et soutien : DRAC Île-de-France. 1er février, Le Carré de Baudouin
121 Rue de Ménilmontant Paris 20e
Élodie Sicard "Les Aspirants" (création)
"Les Aspirants", troisième volet d’un triptyque sur les interdépendances du vivant, plonge dans l’image sensible de la chasse à l’arc. Élodie Sicard, danseuse et chorégraphe, s’inspire de disciplines variées (sciences, anthropologie, philosophie) pour créer des œuvres mêlant visible et invisible. Sa démarche, ancrée dans un dialogue riche entre musique et danse, a donné lieu à des collaborations prestigieuses et des créations marquantes comme "Cage", avec le pianiste Bertrand Chamayou. Avec le soutien de DRAC Ile-de-France. 5 et 6 février, Théâtre de Vanves (Vanves)
Structure-couple "L’Été"
Structure-couple, projet fondé par Lotus Eddé Khouri et Christophe Macé, interroge les limites du geste quotidien à travers des performances où la danse dialogue avec la sculpture et la musique. Dans "L’Été", les deux artistes explorent, sur le Presto de Vivaldi, une chorégraphie intense et répétitive, où la contrainte du mouvement et le rapport au temps dévoilent une poétique de la fragilité et de l’endurance. Avec le soutien de la DRAC Île-de-France.
"Le titre n’a pas d’importance" (création 2024)
Première francilienne. Dans ce programme de répertoire et de transmission, Thomas Lebrun évoque trois pièces marquantes de sa carrière en tant qu'interprète et chorégraphe, ainsi qu'une nouvelle création avec les danseuses Anne-Emmanuelle Deroo et Montaine Chevalier. Il débute avec le solo "Pouce !" de Bernard Glandier, chorégraphe atteint de la maladie de Charcot, qui lui a transmis la pièce en 1998, marquant le début de son parcours professionnel. Lebrun évoque cette transmission comme une expérience fondatrice dans sa carrière, une aventure de danse et de responsabilité, qui l’a profondément marqué.
Il parle ensuite de l'impact qu’a eu la chorégraphe Christine Bastin sur lui. Lorsqu’il a vu sa pièce "Noce" en 1999, il a ressenti un choc émotionnel, tant en tant que danseur qu'en tant que futur chorégraphe. Il raconte avoir été submergé par l’intensité de la danse de Bastin, ressentant ses tensions et spasmes de manière intime.
25 ans plus tard, le programme se termine par une création de Thomas Lebrun, inspirée d’un vers de René Char : "Hâte-toi de transmettre ta part de merveilleux, de rébellion, de bienfaisance." 11 au 13 février, micadanses Paris 4e
Découvrir toute la programmation du Festival "Faits d'hiver 2025"
Partager la page