Après une première cérémonie l’an dernier pour les pratiques incluses en 2023 et 2024, une deuxième a été organisée, mercredi 17 décembre pour les éléments retenus cette année à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel. Quatorze pratiques dites du « patrimoine vivant » ont été diplômées, dans des domaines aussi variés que l’agriculture, l’artisanat, la musique ou la mode. « Lorsque l’on pense au patrimoine, on pense bien sûr à nos monuments historiques, à nos églises, à nos châteaux, qui font la richesse de nos villes et de nos villages, a déclaré la ministre de la Culture Rachida Dati. Mais il existe aussi un patrimoine inestimable, qui se transmet de génération en génération, qui est un faiseur de liens : notre patrimoine culturel immatériel. »
Avec la remise de ces certificats d’inclusion, le ministère veut valoriser ces pratiques sociales et culturelles qui peuvent prendre des formes très variées : savoir-faire artisanaux ou culinaires, musiques et danses, fêtes et carnavals, jeux et sports traditionnels ou encore connaissances liées à la nature... Cet Inventaire national du patrimoine culturel immatériel, lancé en mars 2008, est mis en œuvre par le ministère de la Culture et participe à la reconnaissance et à la transmission de pratiques locales qui font la spécificité des territoires.
Avec le plan Culture et ruralité engagé en juillet 2024, ces pratiques ont déjà été valorisées grâce au site dédié « Vivre le patrimoine culturel immatériel » et un agenda national qui recense les événements proches de chez soi en lien avec ce patrimoine vivant pour leur donner de la visibilité. « Cet effort est à la mesure de l’enjeu, poursuit Rachida Dati. Tous les patrimoines vivants que nous célébrons aujourd’hui, selon une tradition désormais bien établie, sont ainsi à la fois représentatifs de l’identité des communautés qui les portent et reflets de la diversité de notre nation. »
Un patrimoine bien vivant en outre-mer
Les Outre-mer sont particulièrement représentés cette année avec cinq pratiques nouvellement incluses. Des quadrilles créoles de Guadeloupe aux Jours de Cilaos –broderie typique de l’île de La Réunion - ces traditions témoignent du dynamisme de ces territoires. Elles mettent particulièrement en valeur les femmes mahoraises et leur rôle dans la transmission du patrimoine immatériel via le Debaa, pratique créée par les femmes, ou la fabrication du sel de Brandele exclusivement portée par celles que l'on nomme les mama shingo.
A Chirongui, les savoir-faire et pratiques liés au Tani Malandi (terre blanche en kibushi, langue parlée sur l’île) fait également partie des traditions célébrées. Cette argile blanche produite artisanalement par quelques femmes sert à la fois au maquillage pour les fêtes ou de médicament. « Elle n’est produite que dans le village de Chirongui mais pour toute la communauté et l’argile est même exportée pour pouvoir continuer les pratiques partout dans le monde », souligne Nadia Boinaidi, chargée de mission patrimoine de la commune de Chirongui.
Le long processus de production et le vieillissement des productrices rend difficile la transmission des gestes par les différentes générations de femmes. « Pourtant le Tana Malandi fait vraiment partie de notre patrimoine ; par exemple, le lycée de Chirongui porte son nom, reprend Nadia Boinaidi. C’est pour cela que nous avons voulu valoriser le travail des artisans à travers cette inclusion. » Cette nouvelle étape s’accompagne d’une mesure de la mairie pour protéger la ressource en argile avec la protection du site afin d’assurer sa conservation.
Force et créativité des musiques électroniques
Le patrimoine culturel immatériel reconnaît également la culture dans toutes ses composantes. Aux côtés de traditions anciennes, on trouve ainsi des pratiques plus contemporaines. C’est ainsi que cette année, les musiques électroniques ont été également incluses à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel. « C’est un bel aboutissement et la reconnaissance de notre travail, résume Tommy Vaudecrane, président de Technopol, association qui a pour mission la reconnaissance et la promotion des musiques électroniques. Cela permet de leur donner toute la place qu’elles méritent. Leur diversité de genre, de danses, d’établissements est spécifique au marché français. »
Bien que récente, cette pratique n’est pourtant pas épargnée par les problématiques de transmission. « Les conditions sont de plus en plus difficiles pour un jeune qui souhaiterait devenir DJ, confirme Tommy Vaudecrane. Nous sommes confrontés à une menace de mondialisation et d’uniformisation de la culture et à la possibilité que les musiques électroniques soient absorbées par des multinationales et deviennent formatées. » Ce modèle français unique a d’ailleurs fait l’objet d’une mesure : la création d’un label Club Culture pour les lieux qui, par leur programmation, production et diffusion de concerts, soutiennent activement la création artistique et notamment les musiques électroniques.
Les éléments patrimoniaux inclus en 2025 à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel
- Le Debaa des femmes (Mayotte) ;
- Les connaissances, méthodes et pratiques traditionnelles liées à la fabrication du sel de Bandrélé (Shingo ya Bandrele) ;
- La démoscène en France : un mouvement de création numérique populaire spontané ;
- L'affouage ;
- Les savoirs nautiques ligériens ;
- Les savoir-faire et pratiques liés au tani malandi (argile blanche) de Chirongui ;
- Les quadrilles créoles de Guadeloupe ;
- Pratiques de pêche passives sur le bassin Loire : le guideau et le filet-barrage ;
- Les comices agricoles du Doubs ;
- Chjam’è rispondi, joutes poétiques improvisées et chantées (Corse) ;
- La Haute couture ;
- Les musiques électroniques françaises ;
- Les jours ou broderie de Cilaos à l'île de La Réunion ;
- Le carnaval à l’Ouest (Scaër)
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