Alors que l’édition 2024 du festival international du film de Cannes s’est ouverte hier soir, le Palais des festivals est prêt à accueillir comme il se doit le grand rendez-vous du cinéma mondial. Avec les incontournables de la sélection officielle, films fétiches et personnalités charismatiques, mais aussi, en cette année de Jeux Olympiques et Paralympiques, un invité-surprise : la flamme olympique, qui foulera, mardi 21 mai, à l’égal des plus grandes stars du 7e Art, le tapis rouge.
Un rendez-vous qui se veut le reflet de la production cinématographique internationale, mais aussi de préoccupations qui « travaillent » la planète cinéma : intelligence artificielle, représentation de la diversité, cinéma immersif, restauration des films du patrimoine et, bien sûr, la lutte contre les violences sexuelles, avec un temps fort, la projection du court métrage de l’actrice et réalisatrice Judith Godrèche sur les violences sexuelles faites aux femmes : Moi aussi. Des préoccupations, on le voit, très éloignées des paillettes, mais dont l’urgence et la légitimité ne se démentent pas.
Création et patrimoine, une même effervescence
Présenté en ouverture du festival, Le Deuxième Acte de Quentin Dupieux, véritable « déclaration d’amour et d’humour » au 7e Art, promet de susciter intérêt et effervescence. Il n’est pas le seul. Des frères Larrieu à Noémie Merlant, en passant par Arnaud Desplechin, Rithy Panh, Laetitia Dosch ou Sophie Fillières, les films soutenus par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), soit vingt-trois films au titre de l’Avance sur recettes toutes sections confondues, dont deux en compétition officielle (Emilia Perez de Jacques Audiard et Diamant brut de Agathe Riedinger), sont tous marqués au sceau de la créativité. De même, quinze films sélectionnés ont bénéficié de l’Aide aux cinémas du monde, qui permet de soutenir les cinématographies du monde entier.
A Cannes, la création cinématographique n’est pas la seule à susciter l’effervescence. Avec la sélection Cannes Classics , qui fête cette ses vingt ans, le festival met en lumière le patrimoine cinématographique. Cette année, on pourra voir ou revoir des versions de Gilda, le chef d’œuvre de Charles Vidor, mais aussi de Paris Texas de Wim Wenders, Les Sept samouraïs d’Akira Kurosawa, Les Années déclic de Raymond Depardon ou encore du dernier film de Jean-Luc Godard : Scénarios. Mais l’événement sera incontestablement la présentation en ouverture de Cannes Classics, le 14 mai, du Napoléon d’Abel Gance, film culte dont la restauration, menée par la Cinémathèque française avec le soutien du CNC, aura constitué une véritable odyssée de 14 ans.
L’immersion, un nouvel horizon
Toujours à la pointe de l’innovation, le Festival de Cannes inaugure cette année, avec le soutien du CNC, une nouvelle section dédiée aux expériences immersives, soit une sélection de huit projets en compétition, incluant des installations de réalité virtuelle collectives, des expériences de réalité mixte ou encore des œuvres de vidéo mapping, mais également une sélection non compétitive de six œuvres. Le CNC soutient cinq œuvres en compétition et cinq hors compétition.
Cet événement sera aussi l’occasion pour la ville de Cannes d’annoncer le lancement du programme « Cannes Immersive », parrainé par l’artiste Jean-Michel Jarre, avec le soutien du CNC. Voué à « être un hub mondial dédié aux créations immersives et au nouveau territoire artistique de l’Intelligence Artificielle (IA) », Cannes Immersive intégrera une offre culturelle immersive aux événements cannois et créera un lieu immersif pérenne afin d’exposer le meilleur de la création immersive et générée par l’IA.
Soutenir les talents du cinéma de demain
La Résidence du Festival, la Fabrique Cinéma, CNC Talent… A travers ces différentes initiatives, les nouveaux talents de la création cinématographique seront très présents sur la Croisette. Des initiatives qui confirment la dimension internationale du Festival. Le dispositif « la Résidence du Festival de Cannes » soutient chaque année de jeunes réalisatrices et réalisateurs dans l’objectif de les accompagner dans la réalisation de leur premier ou deuxième film. Cette nouvelle édition rassemble douze cinéastes à qui le CNC va remettre un prix à deux résidents.
Même dimension internationale pour la « Fabrique Cinéma ». Développé par l’Institut français avec France Médias Monde et l’Organisation internationale de la Francophonie, ce dispositif a pour ambition de favoriser l’émergence de la création des pays du Sud sur le marché international et d’en valoriser les cinéastes et producteurs. Cette année, neuf projets de longs métrages de fiction et un projet de documentaire ont été choisis.
Enfin, six créateurs du web s’invitent sur la Croisette à l’occasion de la nouvelle édition de « CNC Talent », la résidence cannoise organisée par le CNC, en partenariat avec YouTube. L’ambition de cette résidence ? Développer des passerelles entre différentes générations de créateurs et différentes écritures, celle du web et du cinéma.
Un soutien aux films sur la diversité sexuelle
Le ministère est partenaire de la Queer Palm du Festival de Cannes, prix qui récompense chaque année, parmi les œuvres en compétition, un long et un court métrage traitant des thématiques LGBTQIA+. Les prix ont été remis cette année à Emanuel Parvu, pour Trois kilomètres jusqu'à la fin du monde et à Elena López Riera pour Southern Brides.
La Queer Palm s’est enrichie cette année d’un programme de mentorat, soutenu par le ministère. Le Queer Palm Lab, parrainé par le réalisateur belge Lukas Dhont, va sélectionner cinq projets de films qui seront accompagnés pendant un an à travers différents rendez-vous et une résidence de 15 jours au Portugal. Les cinq lauréats participeront au Festival de Cannes 2025, pendant lequel ils présenteront leurs projets lors de la réunion « Queer Market » organisée par le Queer Palm Lab et pourront échanger avec des producteurs et distributeurs.
Enfin, toujours en association avec la Queer Palm cannoise, le ministère participe au Festival du court-métrage de Clermont Ferrand où il remet le prix du meilleur Queer Métrage à l'un des films en compétition, afin de mettre en lumière l'expression de la culture et des enjeux de la communauté LGBTQIA+.
Rachida Dati : « Les grands défis du modèle de cinéma français »
Alors que le palmarès du 77e Festival international du film de Cannes est attendu le 25 mai, Rachida Dati, ministre de la Culture, a présenté samedi 18 mai, à l’occasion de son déplacement sur la Croisette, un vibrant plaidoyer en faveur du modèle français, dont elle a souligné « la grande vitalité ». « Parmi les films sélectionnés à Cannes, 27 ont été aidés par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) pour leur qualité artistique, soit le meilleur résultat depuis 2018 », a souligné la Ministre.
Pour autant, il faut adapter cet « écosystème », véritable fer de lance de l’exception culturelle, à de « nouveaux défis ». Premier défi : rendre les films accessibles à tous. « Pour que les films atteignent tous les publics sur tous les territoires, nous allons mettre en œuvre un plan de diffusion ambitieux : soutenir les circuits itinérants (un soutien exceptionnel de 1 M€ du CNC et 0,5 M€ destinés à financer la création d’emplois pérennes) et les festivals locaux (augmentation de 60% de l’enveloppe qui leur est consacrée), s’appuyer sur les médiateurs (dont le nombre augmentera de 25%) et les ambassadeurs du cinéma. C’est comme ça que nous rendrons plus accessible, à tous, sur tous les territoires, la merveilleuse richesse de vos films », a précisé la Ministre.
Deuxième défi : la filière doit être « exemplaire » dans trois domaines essentiels, à savoir l’ouverture sociale, la prévention des violences sexuelles et sexistes et le respect de l’environnement. Concernant « l’exigence d’ouverture », l’intégration passe d’abord, selon la Ministre, par le travail, la formation et l’accès à l’emploi. « Dans le cadre de la Grande Fabrique de l’image, un projet porté par France 2030, nous avons accentué l’ouverture de la filière à toutes les classes sociales à travers la formation initiale et continue », a assuré la Ministre, en précisant que 34 projets de formation étaient soutenus pour un montant de 67,5 M€. Pour la question de l’inclusion des personnes en situation de handicap, la Ministre a rappelé qu’elle avait soutenu la signature d’un partenariat entre Pathé et l’Institut national des jeunes aveugles en faveur de l’audiodescription, et indiqué qu’elle allait porter la dotation de l’appel à projets « Les Uns et les Autres », destiné à favoriser l’insertion dans le secteur du cinéma et de l’audiovisuel, à 300 000 €.
Pour la ministre de la Culture, la question des violences sexuelles et sexistes, mais aussi de la protection des enfants sur les tournages, est aujourd’hui incontournable. Pour prévenir ces violences, celle-ci a annoncé plusieurs initiatives fortes, dont la formation destinée aux producteurs, diffuseurs et exploitants de salles qui va être étendue à « l’ensemble des équipes de tournages ». La Ministre va également rendre obligatoire la « présence d’un responsable enfants sur chaque tournage employant des mineurs ».
Le défi de la transition écologique est, lui aussi, très attendu par les professionnels. Fruit d’un partenariat entre la direction générale des médias et des industries culturelles du ministère de la Culture, le CNC et l’Afnor, le référentiel AFNOR SPEC pour les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel et de la publicité constitue un tournant décisif. « Comme nous avons été les premiers à construire une politique de soutien au cinéma, nous serons désormais les premiers, avec la publication de ce document, à établir un standard pour une production éco-responsable », s’est réjouie la ministre de la Culture.
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