La restauration de l’abbatiale de Juaye-Mondaye s’inscrit dans la mission essentielle du ministère de la Culture : préserver et transmettre les monuments qui témoignent de l’excellence architecturale et artistique française. En redonnant toute sa lisibilité à un édifice dont l’homogénéité classique est rare à l’échelle d’une abbaye, cette intervention illustre la volonté de protéger un patrimoine fragile face aux altérations du temps, mais aussi de le rendre accessible et attractif pour le public d’aujourd’hui et de demain.
Un édifice majeur du patrimoine normand
Au cœur du Bessin, l’abbaye de Juaye-Mondaye se distingue par sa cohérence architecturale exceptionnelle. Fondée en 1202 puis totalement reconstruite entre 1706 et 1743 sous la direction du père Eustache Restout, membre d’une illustre dynastie d’artistes, elle illustre parfaitement le classicisme religieux du XVIIIᵉ siècle.
Le parti adopté par Restout combine monumentalité et sobriété : volumes clairs, proportions équilibrées, sobriété décorative qui met en valeur les quelques éléments baroques (chapelle de la Vierge, mobilier sculpté, peintures et orgue) sans jamais alourdir l’ensemble. Cette homogénéité, rare à l’échelle d’une abbaye, contribue à faire de Mondaye un jalon majeur de l’architecture conventuelle en Normandie.
Protection
Au fil du temps, l’abbatiale et son domaine ont progressivement rejoint le cercle des monuments protégés. Dès 1927, une première inscription est venue reconnaître la valeur des composantes de l’édifice. En 1947, l’église, l’aile est avec la tour de David, ainsi que le pavillon d’entrée et ses ailes ont été classés, affirmant leur importance historique et architecturale. En 1998, c’est l’aile sud qui a bénéficié à son tour de cette reconnaissance. L’année suivante, les façades et toitures de la grange aux dîmes, sa grange attenante, mais aussi les murs d’enceinte et l’assiette du sol délimité ont été inscrits à l’inventaire. Ainsi, par étapes successives, l’ensemble monastique s’est vu entouré d’un véritable écrin de protections, à la mesure de son rôle majeur dans le patrimoine normand.
La mise en valeur d’un ensemble cohérent
L’intervention a permis de restituer la lisibilité spatiale de l’abbatiale et de renforcer le dialogue entre architecture et décor. La lumière retrouve sa place dans la nef, la cohérence des volumes est restituée, et les décors baroques révèlent de nouveau leur raffinement. L’ensemble offre aujourd’hui une lecture claire de l’intention originelle de Restout : une architecture régulière, sobre, magnifiée par des interventions décoratives choisies.
Un moment symbolique
L’achèvement de ces travaux a été célébré lors des Journées européennes du patrimoine 2025. Cet événement a marqué la reconnaissance d’un chantier conduit avec constance depuis trois décennies, où l’État et les collectivités territoriales ont joué un rôle déterminant aux côtés de la communauté des Prémontrés.
Un patrimoine vivant
Si la restauration restitue la valeur artistique et historique de l’édifice, elle rappelle également que l’abbaye reste un lieu habité et animé par une communauté religieuse. Ce double statut, patrimonial et spirituel, confère à Mondaye une dimension singulière : celle d’un monument restauré, occupé et ouvert au public (visites toute l'année).
Le chantier de restauration des intérieurs
Après les interventions sur les extérieurs réalisées entre 1999 et 2017 (nef, transept, chœur et couvertures), la commune, maître d’ouvrage, a lancé en 2021 la restauration complète des intérieurs de l’église abbatiale Saint-Martin.
Confiée à l’agence 1090 architectes (Perrine Leclerc, architecte du patrimoine), cette opération a consisté à :
- Traiter les désordres structurels des maçonneries ;
- Restituer les enduits intérieurs, altérés par l’humidité et les sels ;
- Restaurer les polychromies et décors peints, dont les coupoles ornées par Restout ;
- Conserver et mettre en valeur le mobilier intégré (stalles, lambris, autels).
Le chantier, phasé en cinq campagnes successives pour maintenir l’usage cultuel du lieu, s’est achevé en 2025. La DRAC Normandie a accompagné financièrement cette opération à hauteur de 35 %, représentant un investissement exemplaire dans la sauvegarde d’un édifice classé parmi les plus remarquables de la région.
Le phasage opérationnel :
- 2021 : restauration du chœur ;
- 2022 : restauration de la croisée et du transept (hors chapelle de la Vierge) ;
- 2023 : restauration des bas-cotés ;
- 2024 : restauration de la partie Est de la nef ;
- 2025 : 2de tranche de la restauration de la nef.
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