Auguste Véran
Auguste Véran (1839-1927) est un architecte actif de 1857 jusqu’au début des années 1920, dans les Bouches-du- Rhône, principalement à Arles et dans ses environs où il intervient en tant qu’architecte de la ville, inspecteur des travaux des Monuments historiques du département et praticien libéral. Il intervient plus ponctuellement dans les départements du Vaucluse et du Gard.
Auguste Véran est issu d’une famille de notables et d’intellectuels dont l’ancienneté sur Arles remonte au XIIe siècle. Arrière petit-fils de l’érudit Pierre Véran (1744-1819, historien et conservateur du musée Lapidaire qui, pendant la période révolutionnaire, participe activement à la sauvegarde des monuments arlésiens), fils de l’architecte Guillaume Véran (1803-1885), Auguste Véran baigne dans une culture familiale propice à l’expression de sa vocation pour l’architecture.
Son père, géomètre de formation, entre en 1820 au service du cadastre de la ville. En 1834, il succède à Jean- Baptiste Nalis (1791-1834) au poste d’architecte de la ville. A ce titre, il construit notamment les abattoirs municipaux (1846-1850) et la caserne Calvin (1853-1856). Nommé inspecteur des travaux des Monuments historiques en 1845, Guillaume Véran participe au déblaiement et aux premières restaurations de l’amphithéâtre (1845-1857) sous la direction de l’architecte des Monuments historiques Charles-Auguste Questel (1807-1888).
Auguste Véran apprend le métier auprès de son père et de l’architecte des Monuments historiques Henri Révoil (1822-1900). Autour de 1859, il fréquente l’atelier de Jean- Baptiste Guénepin (1809-1888) à l’école des Beaux-arts de Paris sans toutefois y être officiellement inscrit. Son implication précoce dans la vie professionnelle ne lui en a certainement pas laissé le temps : en 1857, il est déjà en activité ; en 1862, à seulement vingt-trois ans, Auguste Véran est nommé architecte de la ville d’Arles et inspecteur des travaux des Monuments historiques du district d’Arles, postes qu’il occupera jusque dans les années 1920. Il est secondé à partir de 1896 par son fils, Léon Véran (1869- 1946), architecte formé à l’Ecole Nationale des Beaux-arts de Paris et diplômé par le gouvernement.
Auguste Véran est un architecte local, dans le sens où il exerce principalement à Arles et dans ses environs. Il n’en demeure pas moins un architecte important en raison de sa carrière exceptionnellement longue (plus de soixante années d’exercice) et prolifique du fait qu’il intervient concomitamment dans plusieurs domaines.
En tant qu’inspecteur des travaux des Monuments historiques, il est un acteur essentiel de la connaissance, la protection et la conservation du patrimoine arlésien au cours de la seconde moitié du XIXe siècle et des premières décennies du XXe siècle. Sous la direction des architectes des Monuments historiques successivement en poste à Arles –– Henri Révoil, Camille Formigé (1845-1926), Jules Formigé (1879-1960) – et en collaboration avec son fils Léon Véran, il participe aux travaux de dégagement et de restauration des principaux monuments antiques, médiévaux et modernes de la ville : théâtre, amphithéâtre, palais de Constantin, cirque romain, site des Alyscamps, cathédrale Saint-Trophime, archevêché, église Saint-Jean-de- Moustiers, église des Prêcheurs, porte Cavalerie, Hôtel de ville, chapelle des Trinitaires, etc. Il intervient également dans la plupart des sites (abbaye de Montmajour) et édifices remarquables du département : cathédrale Saint- Sauveur, chapelle des Carmélites, église Saint-Jean-de- Malte et tour de l’Horloge à Aix-en-Provence ; site des Baux-de-Provence ; chapelle Saint-Marcellin à Boulbon ; archevêché, cathédrale de la Major et abbaye Saint-Victor à Marseille ; chapelle de l’Annonciade à Martigues, ; église Saint-Pierre à Mézoargues ; église de Saint-Andiol ; pont Flavien à Saint-Chamas ; église des Saintes-Marie-de-la- Mer ; plateau des Antiques et chapelle Notre-Dame-de- Piété à Saint-Rémy-de-Provence ; château du roi René, collégiale Sainte-Marthe et chapelle Saint-Gabriel à Tarascon ; temple dit de la Maison basse à Vernègues.
La connaissance du patrimoine monumental nourrit l’imaginaire et guide la démarche d’Auguste Véran lorsqu’il est en position de maître d’oeuvre : ses réalisations s’inscrivent dans le courant historiciste et éclectique qui domine la production architecturale de la seconde moitié du XIXe siècle.
En tant qu’architecte de la ville, il est le principal acteur des transformations de la cité. Pourtant, son intervention est peu perceptible à l’échelle de la ville : la plupart de ses propositions en termes d’embellissement urbain sont modestes et n’ont pas été réalisées (projets de jardins pour la porte Cavalerie en 1865, pour la place Lamartine en 1870), ou alors seulement très partiellement (projet de dégagement de la Major, 1876), à l’exception du Jardin d’été aménagé selon ses plans en 1864. Le rôle d’Auguste Véran se mesure plutôt à l’importance des équipements publics dont il dote la ville : maison du garde du site des Alyscamps (1860), usine hydraulique (1863-1867), caserne de gendarmerie (1870), Hôtel des Postes (1898-1900).
Les fonctions officielles d’Auguste Véran lui ouvrent également les portes de la commande publique dans d’autres communes des Bouches-du-Rhône où il est souvent chargé de construire les principaux équipements publics, à savoir les églises et les groupes scolaires. Il réalise ainsi les écoles de Graveson (1861), de Saint-Martin-de- Crau (1864-1867), de Barbentane (1871-1890), de Sénas (1878-1881), d’Aureille (1879-1888), de Saint-Andiol (1880-1884), d’Orgon (1880-1887), de Cabannes (1881- 1905), de Mouriès (1886-1899) et de Port-Saint-Louis-du-Rhône (1901). Particulièrement actif dans le domaine de l’architecture religieuse, il travaille sous la direction d’Henri Révoil à la construction des églises de Mollèges (1853-1860), d’Eygalières (1894-1905) et de Mas-Thibert (1898-1900). Il mène à son terme la construction de l’église Saint-Pierre de Trinquetaille (1861-1862) selon un projet dressé par son père en 1841. Il conçoit le presbytère de Graveson (1859) ainsi que les églises d’Aureille (1860-1875), de Saint-Martin-de-Crau (1867-1873), de Sainte-Trophime de Bacarin (1868), d’Albaron (1884) et de Gens. À Arles, il édifie l’église du Bon Pasteur (1899) et l’église Saint-Vincent-de-Paul (1857) et reconstruit la façade de l’église des Trinitaires (1884). Auguste Véran agrandit également l’église de Cabannes (1868-1873) et supervise les réparations des églises de Mouriès (1858- 1859), de Raphèle (1863-1864), de Barbentane (1869), de Chateaurenard (1889), du Paradou (1892-1895) ainsi que du presbytère de Saint-Andiol (1899).
Enfin, pour une clientèle privée, Auguste Véran édifie des maisons d’habitation (hôtel particulier du 1 boulevard Georges Clémenceau à Arles, 1899) ainsi que des mas et des bâtiments agricoles. Les domaines de Cabannes, Mas-Neuf Belleval, Saint-Simon, Barrème, Badon, Truchet, Signoret, de la Vigne (1871) en Camargue ou encore Grand-Mas à Saint-Etienne-du-Grès figurent parmi ses réalisations. Mais ses oeuvres majeures en la matière demeurent les opérations menées pour la famille d’entrepreneurs marseillais des Noilly-Prat : la construction du château de Montclam et de ses dépendances (Vauvert, années 1880) et, dans une moindre mesure, la restructuration du château d’Avignon (1893-1898). Auguste Véran travaille également pour les compagnies industrielles Solvay et Péchiney pour qui il conduit des travaux à Salin-de- Giraud.
Auguste Véran cesse d’exercer au début des années 1920. Son fils, Léon Véran, lui succède.
Sources
Archives
- AD 13, Etat civil.
- AD 13, Fonds 18 F, Papiers Auguste et Léon Véran (1836-1940).
- AD 13, Fonds 70 V, Culte catholique : église et presbytère, Dossiers relatifs aux édifices religieux du département dans lesquels intervient Auguste Véran.
- AD 13, Série 3 O, Travaux communaux (1850-1951), Dossiers relatifs aux réalisations d’Auguste Véran dans les communes des Bouches-du-Rhône.
- AD 13 Fonds 167 E, Archives communales des Baux-de-Provence, Dossiers relatifs aux réalisations d’Auguste Véran aux Baux-de-Provence.
- AD 13, Fonds 1 Fi, 2 Fi et 6 Fi, Documents iconographiques, Dossiers relatifs aux plans et cartes dressés par Auguste Véran.
- AD, 13 Fonds 34 J, Papiers de la basilique Notre-Dame-de-la-Garde, Dossiers relatifs aux plans et cartes dressés par Auguste Véran.
- AM Arles, Série O, Urbanisme, Dossiers relatifs aux réalisations d’Auguste Véran à Arles.
- AM Arles, Série M, Bâtiments communaux, Dossiers relatifs aux réalisations d’Auguste Véran à Arles.
- AM Arles, Série Fi, Fonds figurés, Dossiers relatifs aux réalisations d’Auguste Véran à Arles.
- Médiathèque d’Arles, Fonds patrimoniaux.
- Musée Mistral (Maillane), Correspondance entre Auguste Véran et Frédéric Mistral.
- Palais du Roure (Avignon), Correspondance entre Auguste Véran et Jeanne de Flandresy et Emile Espérandieu.
Bibliographie
- Baudat Michel, Arles, ville sainte. Les églises célèbres et oubliées, Arles, Actes Sud, 2002.
- Durand Isabelle, « La conservation du patrimoine monumental : la grande affaire du XIXe siècle », Rouquette Jean-Maurice (dir.), Histoire d’Arles, Paris, Imprimerie nationale, 2008, p.909-p.919.
- Rebuttini Sylvie, Thaon Bernard, Auguste Véran, Arles, Actes Sud/ville d’Arles, 2004.
- Thaon Bernard, « L’urbanisme arlésien : des ordres urbains discrets », Rouquette Jean-Maurice (dir.), Histoire d’Arles, Paris, Imprimerie nationale, 2008, p.921-p.939.
Sources imprimées
- Dictionnaire biographique des Bouches-du-Rhône. Annuaire et album, Paris, Editions Flammarion, collection Les Dictionnaires départementaux, 1901-1902, p.1155-p.1156.
- Masson Paul (dir.), Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône. Le bilan du XIXe siècle. Tome 6 : La vie intellectuelle, Marseille, ville de Marseille/Chambre de Commerce et d’Industrie de Marseille/ Département des Bouches-du-Rhône, 1914, p.32.
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