Monsieur le Président de la Bibliothèque nationale de France, cher Gilles PÉCOUT,
Monsieur le Président de l’Union mondiale des aveugles, cher Santosh Kumar RUNGTA,
Monsieur le directeur de l’Institut national des jeunes aveugles -Louis Braille, cher Stéphane GAILLARD,
Mesdames et Messieurs les Présidents de fédérations et d’associations, chers amis,
Deux siècles ont passé depuis qu’un jeune homme d’une quinzaine d’année, blessé dans sa chair mais animé par une soif de savoir, a ouvert au monde un langage universel : celui du braille.
Deux cents ans plus tard, cette invention, née dans la pénombre d’une salle de l’Institut des jeunes aveugles à Paris, continue d’éclairer le quotidien de millions de personnes.
Votre colloque est placé sous le thème de la Révolution qu’incarne l’invention du Braille. Plus encore qu’une révolution, c’est une conquête. La conquête de la dignité, de la liberté et du droit fondamental d’accéder au savoir.
Louis Braille n’a pas seulement imaginé une méthode pour lire et écrire sans voir : il a ouvert à des générations d’écrivains, de savants, de musiciens, de citoyens l’accès à un destin qui, avant lui, leur était refusé.
Avant lui, le handicap visuel signifiait l’exclusion, la dépendance, le silence imposé.
Et puis il y eut ce geste extraordinaire, celui d’un adolescent qui, en transposant un code militaire de points en relief, a fait de la lecture un acte tactile et sensible, accessible à tous.
Depuis, le braille a traversé les continents, les langues et les cultures. Il s’est ouvert à d’autres écritures, comme les mathématiques ou la musique. Je vois ici le directeur de l’Institut national des Jeunes aveugles, cher Stéphane GAILLARD, et je pense à tous les interprètes et compositeurs célèbres qui ont été formés dans votre établissement.
Célébrer les 200 ans du braille, c’est donc rendre hommage à un génie français, à une invention qui appartient désormais à l’humanité tout entière. C’est aussi réaffirmer l’actualité du combat pour l’égalité des droits et des chances, pour une société pleinement inclusive où la différence n’est plus un obstacle.
De ce point de vue-là, j’en suis bien consciente, nous avons encore à faire pour que la lecture, la culture, l’accès à l’information soient réellement accessibles à tous.
Je veux d’ailleurs le réaffirmer devant vous ce matin : je suis pleinement engagée pour que ce combat progresse chaque jour.
En matière de lecture, les avancées sont concrètes. Depuis juin dernier, tous les livres publiés au format numérique doivent être nativement accessibles aux personnes aveugles ou mal-voyantes. Evidemment, c’est un travail au long cours qui se poursuit main dans la main avec les éditeurs mais les premiers résultats sont là.
Je veux aussi mentionner le travail mené autour du portail national de l’édition accessible et adaptée. Son objectif est simple : rendre accessible, à toutes les formes de handicap, l’ensemble des fonds des éditeurs. Là encore, c’est un travail de longue haleine, avec des enjeux lourds de technologie et de médiation. Le calendrier a pris un peu de retard mais je peux vous annoncer un nouveau départ dans les prochains jours. Je salue l’engagement de la BnF et de ses équipes sur ce sujet ; à travers vous, cher Gilles PÉCOUT, je rends hommage au travail exceptionnel de vos agents.
Assumer la postérité de de la révolution permise par Louis Braille, cela veut dire que les enjeux d’accessibilité doivent irriguer non seulement la lecture, mais tous les pans de la Culture.
C’est le sens du portail de l’audiodescription que nous avons construit avec les associations ici présentes, et que nous avons lancé en début d’année. À travers lui, ce sont plus de 3000 films disponibles en audiodescription sur une plateforme accessible à tous. Ce catalogue ne cesse de s’augmenter et je souhaite qu’il s’ouvre bientôt aux séries.
Le droit au cinéma est aussi au cœur des travaux de la commission que je crée en ce moment avec le CNC pour dessiner de nouvelles avancées sur l’accessibilité des salles de cinéma.
Je ne me suis pas seulement attachée à l’accessibilité des œuvres mais à rendre accessibles l’ensemble des métiers de la Culture. Le Cantre national de la Création adaptée, à Morlaix, m’a déjà fait des propositions sur le statut des artistes et j’ai, de mon côté, confié une mission à Laetitia BERNARD, qui intervient demain dans cet événement.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les quelques mots que je voulais vous adresser à l’occasion de ce colloque et du bicentenaire du braille.
Je terminerai en saluant le travail commun des associations et institutions qui ont rendu possible cet évènement, et je veux notamment citer l’Institut national des jeunes aveugles, qui porte aujourd’hui le nom de Louis Braille, et l’association Valentin Haüy, mais aussi la Fédération nationale des aveugles et amblyopes de France, et leurs présidents Sylvain NIVARD, Pierre MARRAGOU, Stéphane GAILLARD et Bruno GENDRON. Je vous félicite de votre volonté commune de célébrer une mémoire, certes, mais surtout d’ancrer cette révolution « toujours en marche »[1] dans le présent et pour un avenir meilleur.
Vous affirmez ici que l’accessibilité, l’inclusion et la culture pour tous ne sont pas des mots : ce sont des combats quotidiens.
Vous affirmez aussi que l’œuvre de Louis Braille n’appartient pas seulement à l’histoire, elle continue d’inspirer nos politiques publiques en faveur de l’égalité d’accès aux savoirs et à la Culture.
Vous pouvez compter sur moi pour porter ce combat à vos côtés.
[1] Titre du colloque