Figure éminente de l'édition littéraire française, Irène LINDON s'est éteinte à l'âge de 76 ans. Elle laisse le souvenir d'une éditrice d'exception, entièrement dévouée à la littérature et aux auteurs qu'elle accompagnait à travers les Éditions de Minuit.
Née en 1949, Irène LINDON avait grandi au sein des Éditions de Minuit, maison fondée sous l'Occupation en 1941 par Bruller et Lescure. La maison s'était d'abord distinguée par son courage et son audace, publiant clandestinement de grands auteurs de la Résistance : Éluard, Mauriac, Aragon, Gide. Après-guerre, les Éditions de Minuit ont été le terreau du Nouveau Roman avec Sarraute, Duras, ainsi que Beckett et Simon, futurs Prix Nobel.
En 2001, à la disparition de son père Jérôme Lindon, Irène LINDON avait naturellement pris sa succession, accompagnée d'Henri Causse qui partageait les combats de Jérôme Lindon et notamment son engagement acharné pour soutenir et protéger la librairie indépendante. À la tête d’une petite équipe installée au cœur du 6ème arrondissement de Paris, elle avait soutenu les auteurs historiques tout en faisant émerger de nouveaux talents. Elle avait fait sienne la philosophie de Minuit : placer le texte au centre de tout, faire de l'édition un acte d'effacement au profit de l'œuvre.
Tout au long de sa carrière, elle avait veillé sur le catalogue de la maison avec ce don rare de reconnaître les grands auteurs de demain et la volonté sans faille de porter leurs écrits jusqu’au public, comme en témoignent les parcours de Tanguy Viel et de Laurent Mauvignier, dont le récent Prix Goncourt a honoré pour la quatrième fois la maison. Irène LINDON avait également enrichi l’offre éditoriale en fondant la collection « Paradoxe » pour les sciences humaines, prolongeant ainsi l’héritage intellectuel de Minuit.
Par sa discrétion, son exigence constante et son dévouement, Irène LINDON a su perpétuer l'esprit des fondateurs de Minuit et enrichi immensément le paysage littéraire français. Elle reste une incarnation de cette génération d'éditeurs pour qui la littérature est une vocation.
J'adresse mes plus sincères condoléances à sa famille, à ses proches ainsi qu'à l'ensemble de ses collaborateurs et des auteurs qu'elle a accompagnés.
Rachida DATI
Ministre de la Culture