De l’inscription au classement
En mai 2023, l’Académie de l’Air et de l’Espace (AAE), propriétaire du Concorde, avait soumis un projet d’étude pour une protection de cet avion de légende à la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) Occitanie. Après étude, le dossier a été présenté à Toulouse, en juin 2024, à la Commission régionale du patrimoine et de l'architecture dont les membres ont voté à l’unanimité en faveur de l’inscription de l’appareil et émis le vœu de poursuivre la procédure vers une mesure de classement.
Le préfet de région a signé, le 11 octobre 2024, l’arrêté inscrivant le Concorde n° 1 au titre des Monuments historiques, en tant qu’objet mobilier.
Les membres de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture, réunis au ministère de la Culture, le 13 mars 2025, ont également émis un avis unanimement favorable pour son classement dont l’arrêté a été signé par la ministre de la Culture le 5 mai 2025.
Le Concorde n° 1, immatriculé F-WTSB, numéro de série : 201 type 100-101 et nommé Sierra Bravo, ainsi que l’ensemble de ses équipements sont classés au titre des Monuments historiques en tant qu’ensemble historique mobilier.
Pourquoi le classement ?
Cette décision ministérielle marque l’aboutissement de la démarche engagée à la suite de la riche enquête menée pour analyser les caractéristiques du Concorde n° 1 par rapport à l’ensemble des Concorde conservés en France à ce jour. Elle reconnaît l’intérêt public que présente la conservation de cet avion et la place privilégiée que la mise au point du Concorde occupe dans l’industrie aéronautique française.
La protection de cet avion de légende s’inscrit dans le domaine récent de la protection des objets au titre du patrimoine industriel, scientifique et technique. Outre la prouesse technologique et industrielle incarnée par ce premier avion supersonique civil, son inscription dans la mémoire collective nationale et européenne ainsi que son esthétique légendaire, en font un avion d’intérêt public, dont l’histoire se confond avec celle de la France.
Le classement au titre des Monuments historiques a été possible grâce aux spécificités de cet appareil. En effet, le Concorde n° 1 est le premier des deux avions "premier de série" (le second est anglais) destiné à obtenir la certification de l’appareil aboutissant à l’obtention du certificat de navigabilité permettant le transport des passagers.
Il diffère des prototypes (dont l’un est présenté au musée de l’Air et de l’Espace du Bourget, le second sur la base aéronavale Royale de Yéovilton en Angleterre) et des avions de présérie (dont l’un est posé près des pistes d’Orly, à Athis-Mons (91) et le second à l’Imperial War Museum de Duxford).
Ce classement constitue un enrichissement majeur du parc, très restreint, des aéroplanes protégés au titre des Monuments historiques.
Concorde n° 1, un avion unique conservé dans la métropole toulousaine
Le Concorde n° 1, propriété de l’Académie de l’Air et de l’Espace - association d’envergure internationale fondée à Toulouse par André Turcat, premier pilote de Concorde - est l’un des deux appareils présentés depuis 2014 au musée Aeroscopia de Blagnac. Il a conservé l’ensemble de ses équipements, et appareils d’essais et de tests, son cockpit et son poste d’ingénieur. Grâce à toute son instrumentation de bord d’origine, le Concorde n° 1 replonge les visiteurs dans la grande aventure des essais en vol.
En 1985, Aérospatiale avait remis l’avion à l’Académie, avant de lui transférer sa propriété le 1er mars 1987.
Il effectue son dernier vol le 19 avril 1985 où il est convoyé de Châteauroux à Toulouse, avec Gilbert Defer et Jean Pinet aux commandes.
Concorde n° 1, un objet patrimonial
La protection de cet avion légendaire présenté au musée Aeroscopia, établissement placé sous la direction de la culture scientifique technique et industrielle de Toulouse Métropole, situé près des usines Airbus et de l’aéroport, est exceptionnelle à plus d’un titre :
- C’est une première en France ; si d’autres avions ont été protégés ces dernières années, il s’agit du premier Concorde classé au titre des Monuments historiques ;
- L’avion a incarné un immense bond scientifique, technologique et industriel unique dans l’histoire du transport. Il incarne un défi et une innovation techniques jamais égalés depuis ;
- Il constitue une réalisation iconique du savoir-faire européen et de sa capacité à innover dans le cadre des "Trente Glorieuses", période dont il est sans doute la production la plus emblématique ;
- Enfin, il constitue une véritable création artistique, un chef-d'œuvre de technologie et d’esthétique universellement reconnu.
Pourquoi deux niveaux de protection au titre des monuments historiques ?
Il existe deux niveaux de protection au titre des Monuments historiques régis par le code du Patrimoine : l’inscription, examinée au niveau régional, et le classement, examiné au niveau national. Dans les deux cas, la protection doit être justifiée par l’intérêt de l’objet mobilier concerné au point de vue de l'histoire, de l'art, de la science ou de la technique.
Pour l’inscription, qui est le premier niveau de protection, l’intérêt doit être "suffisant" ; pour le classement, le niveau le plus élevé, l’intérêt doit être "public"».
L’intérêt patrimonial d’un objet mobilier est évalué en fonction notamment de sa qualité historique, artistique, scientifique ou technique, son authenticité, son intégrité, sa rareté, son exemplarité, sa représentativité par rapport à un corpus ou à un type.
Le Concorde, un avion d’exception inscrit dans l’Histoire
Les premières études françaises et anglaises pour la création d’un avion commercial supersonique, capable de voler à une vitesse de Mach 2.2 ont démarré en 1956. Le projet avait été lancé à l’issue de l’accord intergouvernemental franco-britannique - signé le 29 novembre 1962 - qui visait à concevoir le premier avion de transport civil supersonique. Il a constitué un défi colossal ouvrant le domaine du vol supersonique du transport aérien. Pour relever ce défi et ouvrir la page d’une innovation mondiale, une collaboration industrielle franco-britannique s’est mise en place. Coopération qui se poursuit toujours aujourd’hui dans le cadre de l’industrie aéronautique dont le site de Toulouse est un fleuron avec la société Airbus.
Le premier vol du 6 décembre 1973 a duré 3 heures, dont 43 mn en supersonique, André Turcat étant aux commandes avec Gilbert Defer, Michel Rétif, Henri Perrier et Hubert Guyonnet.
Lors du second vol du 14 décembre 1973, il vole à Mach 2.05.
Sur les vingt appareils construits de 1967 à 1979, il n’en reste à ce jour que dix-huit dont six en France, deux étant exposés à Aeroscopia.
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