Un joyau de l'art roman dans le Gard
Datée du XIIe siècle, la chapelle Saint-Pierre-de-Castres située à Tresques, fait partie d’une typologie de monuments bien représentée dans le Gard : les chapelles romanes.
Isolée sur un promontoire rocheux face à l’oppidum gallo-romain dit le camp de César, possédant lui aussi une chapelle, sa position stratégique permettait le contrôle de l’axe antique Nîmes/Alba-la-Romaine.
Cette chapelle se distingue par l‘absence de contreforts, sa nef unique en trois travées, un faux-transept et un chœur en cul de four demi-sphérique éclairé par une petite baie axiale, un petit clocher orné de deux colonnettes et dont les chapiteaux possèdent des corbeilles à feuillage. L’ensemble est bâti avec un appareil en calcaire froid, parfaitement assisé.
Son architecture sobre se distingue par la qualité de sa maçonnerie et son apparence à la fois élégante et massive.
Les campagnes de travaux
La chapelle appartenait à un particulier et à la fin des années 90, une association locale, sensibilisée par la beauté de cet édifice roman, a entrepris les premiers travaux de sauvegarde. Elle a consolidé la toiture existante avec des moyens modestes ainsi que le clocher envahi par la végétalisation.
En 2016, la commune a racheté la chapelle au propriétaire privé. Motivé par l’inscription au titre des monuments historiques survenue en 2020, le maire, en lien avec la direction régionale des affaires culturelles, a mis en place un diagnostic sanitaire en 2021-2022.
Ce diagnostic réalisé par l’architecte du patrimoine, Alexandre Autin, a révélé des désordres au niveau de l’état de la toiture qui n’assurait plus parfaitement l’étanchéité. En effet, les infiltrations d’eau généraient des concentrations d’humidité dans la maçonnerie et le lessivage des mortiers risquaient à terme d’avoir un impact sur l’intégrité structurelle de la chapelle.
Un permis de construire a été déposé en 2024 pour des travaux de restauration du clos et du couvert :
- Démolition de la dalle de béton existante au niveau de l’extrados de la voûte qui générait des pathologies
- Reprise en intégralité de la couverture en lauzes calcaire sur cailloutis, en respectant ainsi cette typologie de construction
- Restitution de la couverture de lauzes calcaire légèrement pyramidale du clocher ainsi que des éléments de corniche manquants
L'acheminement des lauzes sur le chantier de la chapelle a été un grand défi au regard de la situation géographique de cette dernière.
La couverture en lauzes calcaire
Ce chantier s’avère exceptionnel par sa toiture en lauzes calcaire (très rare dans le Gard, plus courant en milieu rural lozérien) : c’est un matériau lourd et résistant aux intempéries, un mode de couvrement très ancien qui utilise des pierres plates très épaisses de formes irrégulières portées par de fortes charpentes. Une toiture en lauze entretenue peut durer plusieurs siècles contre une trentaine d'années pour les autres matériaux.
Alors que la plupart des monuments sont recouverts de tuiles, à Tresques, on a pu conserver les lauzes calcaire existantes et remplacer celles qui étaient trop endommagées. Pour cette technique de pose particulière, on a fait venir des lauzes calcaire sur le chantier, elles ont été taillées sur place par la Tournée du Coq afin de les ajuster parfaitement à la couverture de la chapelle, dans la pure tradition des lauziers.
Voir aussi fiche technique du Caue du Lot sur les toitures de lauze
Un chantier dans le respect des traditions
La chapelle est un témoignage précieux des techniques de construction des bâtisseurs du Moyen-Âge, ayant quasiment échappé aux modifications, à l’exception du clocher. Avec ses murs épais, un appareil exceptionnel et sans aucun contrefort, la chapelle Saint-Pierre-de-Castres reflète fidèlement une période ancienne dans le développement des prieurés clunisiens. Elle semble avoir traversé les siècles en conservant ses dispositions du Moyen-Âge. Cet exemple d’architecture romane a été particulièrement bien préservé grâce à son emplacement sur un plateau escarpé.
Les entreprises intervenues sur le chantier
- Entreprise Sele (Nîmes 30)
- Ateliers Thomas vitraux (Valence 26)
- Entreprise coopérative La tournée du coq, charpentier* (Fonsorbes 31)
- Maître d’œuvre Alexandre Autin
- Contrôle scientifique et technique Direction régionale des affaires culturelles Occitanie
* doit son nom à une des traditions du métier de charpentier : lors de la mise en place de la girouette qui couronnait un ouvrage (souvent un coq, d’où le nom), il y avait une bénédiction pour porter bonheur à l’édifice puis une procession où les ouvriers étaient à l’honneur. Lorsqu’ils passaient devant les portes du lieu, le « coq » sur les épaules, chacun se devait de leur apporter à boire et à manger.
Le financement des travaux
Le coût des travaux s'élève 314 360 euros au total, financés à 40% (soit 125 360 €) par la direction régionale des affaires culturelles Occitanie, conservation régionale des monuments historiques.
Écouter l'interview du maire de Tresques du 15 avril 2025 sur Radio Ici Gard Lozère
Cet édifice aujourd’hui restauré frappe le visiteur par l’homogénéité de son architecture et l’authenticité de sa substance romane.
L'inauguration de fin de chantier s'est tenue en public le 11 avril 2025. Actuellement, seuls les extérieurs de la chapelle sont accessibles au public.
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