Faciliter le repérage et l'accès aux contenus culturels
Faciliter la découverte des contenus culturels favorise la diversité de représentation des œuvres et la diversification des publics. Cela passe notamment par la mobilisation du secteur culturel autour du Web des données et de l'agrégation des données. La participation de la France à l'initiative Europeana s'inscrit pleinement dans cette démarche.
Capter l’attention et faciliter le repérage
La numérisation et la mise en ligne ne suffisent pas à elles seules à donner accès aux biens culturels. Face à l’abondance de l’offre et à la diversité des publics, l’enjeu, pour les institutions, n’est souvent plus de permettre de trouver une information, mais de capter l’attention, de faciliter le repérage et d’amener l’internaute à choisir la bonne information.
La « découvrabilité » des contenus, c’est-à-dire leur disponibilité et leur capacité à être repérés en ligne parmi un vaste ensemble d’autres contenus doit ainsi être organisée selon une stratégie globale exploitant divers leviers et outils : qualité des données, structuration cohérente des métadonnées,application des normes du web sémantique, multilinguisme, interopérabilité, stratégie de référencement, etc.
Ces principes favorisent la sérendipité. Les personnes peuvent ainsi plus facilement trouver les contenus culturels qu'elles recherchent, tandis que celles qui ne les cherchaient pas précisément sont amenées à les découvrir. Ces leviers et outils facilitent également la communication et la promotion en ligne des contenus culturels.
Ils répondent par ailleurs à un enjeu stratégique de visibilité des contenus francophones. Au sein d’un espace numérique mondialisé et concurrentiel, les stratégies de « découvrabilité » doivent être pensées de manière collective avec des partenaires internationaux partageant notre engagement pour la diversité des expressions culturelles et linguistiques. C’est notamment ce que développent les ministères de la Culture de France et du Québec à travers une mission conjointe sur la découvrabilité des contenus culturels francophones.
Activer les leviers du Web des données
Le « Web 3.0 », dit aussi « Web sémantique », « Web des données » ou "Web des données liées", repose sur une extension des normes fondamentales du web. Cette évolution technologique, la plus importante depuis la création du web au début des années 1990, est en train de transformer le web en une gigantesque base de connaissance. On parle également de graphe de connaissances : ce sont les liens entre les données qui constituent la richesse d'une base de connaissance. Le Web des données permet, entre autres, la réalisation d’outils de recherche d’information, de navigation, de visualisation, de traduction et à terme de raisonnements automatiques, hors de portée des moteurs de recherche classiques.
Le Web des données tente de structurer l'information et de la rendre compréhensible par les machines. Il s'appuie sur les métadonnées, c'est à dire des données structurées décrivant une ressource en ligne. Le fait de bien renseigner les métadonnées d'une ressource (page web, enregistrement d'une base de données, entrée d'un catalogue en ligne,...) permet aux moteurs de recherche de comprendre clairement ce dont il est question : sujet, date et lieu d’un événement, titre d’un livre, année de publication, etc. Chaque information correctement encodée dans la page web permet aux moteurs de recherche, ainsi qu’aux assistants vocaux, de choisir efficacement l’information qui sera présentée à l’individu ayant fait une recherche.
Le Web des données s'appuie également sur deux éléments fondamentaux. D'une part, l'identification unique et pérenne des entités mises en ligne garantit un accès permanent à tel contenu ou données. D'autre part, des liens normalisés entre les donnés permettent de déduire de nouvelles connaissances. Ces principes fondamentaux permettent d'améliorer la recherche. Ils enrichissent également cette recherche en proposant à l'utilisateur des résultats liés à sa recherche initiale.
Cette technologie est cependant peu connue du grand public car elle impacte en premier lieu l’écosystème profond du web, ce que l’on appelle « le web invisible », c’est-à-dire les gisements d’informations contenus dans les bases de données sous-jacentes au web. Le Web sémantique impacte fortement le champ culturel, tant sur le plan de l’organisation des ressources numériques que sur celui des usages, des outils et des infrastructures.
Le secteur culturel a un rôle majeur à jouer dans la mise en œuvre de la découvrabilité grâce aux principes du Web des données. En effet dans un contexte de surabondance d’information et de désinformation, les acteurs du secteur culturel sont les garants de la confiance dans les données disponibles et dans leur liage.
Le ministère de la Culture s'est saisi dès 2014 de cet enjeu en publiant une feuille de route stratégie "Métadonnées culturelles et transition Web 3.0". Cette stratégie vise à accompagner et dessiner la construction à terme du "Graphe Culture", le graphe de connaissances du domaine culturel.
Agréger les données pour accroître la découvrabilité des ressources culturelles en ligne
L’agrégation de données culturelles consiste à collecter les métadonnées descriptives de biens culturels provenant de différents fournisseurs. Elles sont mises à disposition des internautes sur un portail (régional, national, européen ou thématique). Elles sont également redistribuées sur d’autres portails ou entrepôts pour qu’elles soient utilisables pour l’enseignement, la recherche, le tourisme, etc.
L'agrégation au service de la visibilité et de la ré-utilisation des données
Cette démarche permet d’offrir aux internautes des points d’accès uniques sur de vastes ensembles de ressources en ligne provenant de domaines ou de fournisseurs très divers. Comme il le fait avec un moteur de recherche, l’internaute va pouvoir rechercher des informations sans savoir qui les a produites et où elles se trouvent. Au terme de sa recherche, il aura accès au contenu sur le site du fournisseur. Cela lui garantit une information toujours à jour sans risque de perte de qualité.
Les institutions qui fournissent à un ou plusieurs agrégateurs les métadonnées descriptives de leurs contenus démultiplient ainsi les points d’accès sur ces contenus, au-delà de leur propre site. Elles deviennent visibles à différentes échelles, jusqu’à l’échelle internationale. Elles peuvent ainsi faire connaître plus largement leurs collections et attirer de nouveaux publics.
Les métadonnées collectées peuvent également être mises à disposition de ré-utilisateurs pour différents usages. Elles peuvent être valorisées dans des projets pédagogiques, de recherche, de valorisation d’un territoire ou d’une thématique. Elles peuvent aussi servir à la création par les industries culturelles et créatives de services numériques innovants. Ceux-ci contribueront à leur tour à rendre les contenus plus visibles, plus accessibles, plus attrayants.
L'agrégation de données culturelles vise ainsi à accroître le référencement par les moteurs de recherche, et à offrir aux utilisateurs des interfaces adaptées à leurs usages, qui facilitent la recherche, la navigation, la découverte de nouveaux contenus. Elle doit également permettre de développer le potentiel de réutilisation des métadonnées.
Pour remplir ces objectifs, l’agrégation de données culturelles doit prendre en compte l’évolution de l’écosystème culturel. La démarche doit aussi intégrer les nouveaux modes de description et d’exposition des données culturelles sous la forme de graphes de connaissances. Les principes mis en œuvre dans le web des données liées modifient ainsi considérablement les modes de production et d’exposition des métadonnées culturelles collectées.
Le rôle des agrégateurs
Pour que l’agrégation de données culturelles soit un processus efficace et rende au public comme aux institutions culturelles les services attendus, elle doit être organisée. C’est le rôle des agrégateurs, organismes chargés de collecter les métadonnées et de les redistribuer.
Les agrégateurs interviennent à différentes étapes, depuis la sensibilisation des institutions culturelles aux enjeux de la numérisation et de la valorisation de leurs fonds jusqu’à leur diffusion. Au fait des normes, standards et recommandations, les agrégateurs vont veiller à ce que les métadonnées soient trouvables, accessibles, interopérables et réutilisables. Pour cela, ils accompagnent leurs partenaires et leur permettent de gagner en compétence. Ils œuvrent sur les questions de qualité des contenus, d’enrichissement des métadonnées, d’identification pérenne des entités, de licences et d’ouverture des données et des contenus, etc. Ils assurent enfin la redistribution des métadonnées vers un autre niveau d’agrégation (du local au national, du national à l’européen ou à l’international) ou vers d’autres portails.
En France, l’agrégation de données culturelles s’est organisée autour de grands domaines thématiques, comme le portail Gallica, bibliothèque numérique de la Bibliothèque nationale de France et de ses partenaires ou le portail FranceArchives, offrant un accès simplifié aux archives référencées dispersées sur le territoire.
Le moteur Collections opéré par le ministère de la culture a quant à lui une vocation généraliste. Depuis sa mise en ligne en 2007, il a permis d’offrir aux internautes un portail d’accès unique à plus de 7,4 millions de documents et à plus de 5,6 millions d'images couvrant tous les domaines de la culture, de l’architecture aux musées en passant par le patrimoine immatériel, l’archéologie, la photographie, le spectacle vivant … Un réseau se met en place autour de nouveaux agrégateurs locaux ou thématiques qui vont permettre de démultiplier la capacité d’action du ministère.
Europeana, un accès au patrimoine culturel numérique de toute l'Europe
L'initiative Europeana sert un projet culturel commun destiné à offrir un accès au patrimoine culturel européen et à le mettre en valeur. Le portail Europeana a été lancé en 2008 et donne un accès en ligne et multilingue aux collections numériques des États membres de l'Union Européenne relatives au patrimoine culturel.
Europeana rassemble aujourd’hui plus de 62 millions d’objets numériques fournis par plus de 4500 institutions culturelles.
Depuis 2018, la gouvernance d'Europeana repose sur trois piliers : la Fondation Europeana, le Forum des Agrégateurs d'Europeana et l'Association du réseau des professionnels d'Europeana. Depuis 2021, la France est impliquée dans cette gouvernance par son rôle de président du Forum des Agrégateurs d'Europeana.
Des collections thématiques et des galeries
Europeana offre un point d'accès aux objets et collections via un portail. Elle fournit aussi une entrée vers des collections thématiques, avec une éditorialisation des contenus. L'initiative a ainsi contribué à la reconstitution d’ensembles thématiques témoignant de l’histoire et de la culture de l’Europe au travers de projets de numérisation tels que Europeana Regia (manuscrits royaux européens), Europeana Collection 14-18 (patrimoine de la Grande Guerre), Europeana Newspapers (presse européenne), Europeana Sounds (patrimoine sonore européen). Certains d’entre eux, comme récemment le projet sur la guerre 14-18, ont connu un énorme succès auprès des citoyens européens.
Une expertise au service de l'ouverture et de l'interopérabilité des données
Europeana a joué un rôle précurseur et novateur en matière d’interopérabilité des données, en impulsant auprès des différents États membres les pratiques d’ouverture des données ou leur interconnexion sémantique. L’initiative réunit un important réseau de professionnels et d’experts et a fortement contribué à sensibiliser les institutions culturelles à ces enjeux.
Sur l’espace professionnel de son site, Europeana met à disposition des institutions un ensemble de documents regroupant guides et recommandations pour la structuration et la diffusion des données sur Europeana.
En lien avec son réseau de professionnels et d'agrégateurs, Europeana a ainsi élaboré un centre de publications qui définit une charte de qualité des contenus et des métadonnées, ainsi qu'un ensemble de déclarations de droits standardisés applicables au patrimoine culturel en ligne (www.rightstatements.org) et un modèle sémantique commun pour décrire les contenus (EDM, the European Data Model).
Contribution française à Europeana
La France a été l'un des pays fondateurs d'Europeana et a depuis toujours apporté son soutien politique à ce projet culturel unique. Europeana compte notamment parmi ses membres fondateurs la Bibliothèque nationale de France (BnF) et l'Institut national de l'Audiovisuel (INA).
L’agrégation des contenus vers Europeana passe, en France, par trois canaux :
- la bibliothèque numérique Gallica de la BnF, agrégateur thématique pour les objets et collections des bibliothèques,
- le portail national des archives FranceArchives ,agrégateur thématique pour les ressources archivistiques,
- le moteur Collections du ministère de la culture, agrégateur national pour les objets et collections de tous domaines.
Europeana propose un point d’accès aux objets et collections via un portail mais aussi vers des collections thématiques avec une éditorialisation des contenus.
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