Historique et textes de référence
En Occident, la notion de prison où l'on enferme les personnes pour les punir et les faire travailler remonte au Moyen Âge. Elle réapparaît à l'époque de l'inquisition comme punition religieuse, mais ce n'est que dans la seconde moitié du XVIIIème siècle que naît véritablement la prison pour peine. Sous l'influence de la philosophie des Lumières qui se développe en Europe, on cherche à substituer à l'arbitraire royal une loi égale pour tous en créant des codes pénaux écrits qui condamnent le crime mais se préoccupent aussi du devenir des auteurs d'infractions.
En France, la prison apparaît dans le code pénal révolutionnaire de 1791. Elle a pour mission la garde, la punition et l'amendement par le travail. Au XIXème siècle, les enfants font l'objet d'un traitement minoré et sont accueillis dans des établissements spécifiques pour mineurs ou dans des lieux d'enfermement privés à la campagne, les colonies pénitentiaires, où les conditions de vie sont très rudes.
Le premier objet culturel qui apparaît en prison est le livre, apporté aux détenus par les aumôniers, et on trouve la trace de bibliothèques en détention dès l'Empire.
La circulaire du 11 Mars 1949 précise que la lecture « par les conseils, les exemples que les détenus y rencontrent, contribue puissamment à leur relèvement moral ». Celle du 16 Juin 1965 rappelle « qu'il faut développer la lecture dans les prisons car cette activité occupe une place importante dans l'organisation des loisirs des détenus ». Dès 1963, un bibliothécaire assure la responsabilité du service des bibliothèques à la Direction de l'administration pénitentiaire.
Mais il faut attendre 1986 et la volonté de deux hommes politiques, à la tête des deux administrations respectives de la Culture et de la Justice, Jack Lang et Robert Badinter, pour que l'introduction d'activités culturelles dans toutes les disciplines soit préconisée en prison, avec la signature du premier protocole interministériel. La culture constitue en effet un facteur de construction, voire de reconstruction de la personne et un élément majeur dans un parcours de réinsertion.
Un second protocole, signé en 1990, vient affirmer quatre principes de fonctionnement :
- Le partenariat avec des structures culturelles locales ;
- Le recours à des professionnels de la culture pour mener à bien les actions ;
- La mise en place d’une programmation annuelle de qualité ;
- Et l’évaluation des actions réalisées.
L'offre en direction des personnes faisant l'objet d'une mesure de justice et suivies en milieu ouvert et des mineurs suivis par la Protection judiciaire de la jeunesse est plus récente et apparaît dans le troisième protocole de 2009. Des dispositifs spécifiques sont mis en place conjointement par la Protection judiciaire de la jeunesse et le ministère de la Culture qui soutient notamment les trois grandes manifestations culturelles de la PJJ qui ont pour objectifs de permettre aux jeunes d’exprimer leur créativité, de promouvoir la citoyenneté, la solidarité, le respect de soi et de l’autre et de favoriser l’insertion sociale, scolaire et professionnelles des jeunes en conflit avec la loi.
Une circulaire d'application de ce troisième protocole a été signée le 3 mai 2012 : elle reprend, thématique par thématique, les différentes orientations à mettre en œuvre de façon très concrète. Pour ce faire, elle s'accompagne de 7 fiches techniques (accessibles au format pdf ci-dessous).
Le 14 mars 2022, un quatrième protocole a été signé par les deux ministères. Il défend et réaffirme quatre objectifs :
- La défense d’une offre artistique et culturelle pluridisciplinaire exigeante et de grande qualité qui garantisse l’accès et la participation de toutes les personnes placées sous main de justice, qu’elles soient adultes ou mineures, à ces pratiques, dans le respect des droits culturels.
- L’importance de la formation et de la professionnalisation des personnels, des intervenants et des bénéficiaires.
- La volonté de tisser des liens toujours plus étroits entre le dedans/dehors en encourageant l’inscription des bénéficiaires dans les dispositifs de droit commun et en leur donnant accès aux offres culturelles des territoires via une politique de conventionnements avec les collectivités territoriales et les acteurs locaux. Au niveau national, les grandes manifestations nationales lancées par le ministère de la Culture (Semaine de la Langue Française, Printemps des Poètes, Partir en Livre, Fête de la Musique, Passeur d'Images, Le mois du film documentaire, la Nuit des Musées, les Journées du Patrimoine, les Nuits de la lecture...) sont souvent déclinées en milieu pénitentiaire et contribuent à la valorisation vers l'extérieur des activités culturelles menées en milieu pénitentiaire. Par ailleurs, le protocole encourage la diffusion à l’extérieur auprès du grand public de productions artistiques réalisées en détention.
- Enfin, la nécessité d’équiper tous les établissements pénitentiaires d’espaces adaptés aux pratiques culturelles. Les projets de création et de rénovation devront ainsi prendre en compte l’aménagement de lieux de diffusion de films, de spectacles, et de salles adaptées aux activités culturelles. En imaginant des espaces de création artistique au sein même des prisons, l’objectif est d’atténuer les frontières entre l’intérieur et l’extérieur et, ainsi, de contribuer à une plus grande porosité entre la sphère pénitentiaire et la sphère culturelle.
Dans le prolongement de ce protocole, une nouvelle convention entre le ministère de la Culture et l’École nationale de l’administration pénitentiaire a été signée le 16 septembre 2022, et vient préciser les ambitions partagées sur les enjeux de formation des personnels pénitentiaires. Elle confirme notamment l’inclusion de la culture dans les programmes de formation de tous les personnels de l’administration pénitentiaire et dans leur vie professionnelle future. Cette démarche nationale est relayée en régions par des journées interprofessionnelles culture/justice organisées dans le cadre des conventions régionales culture/justice.
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