Les travaux de restauration du château de Castries, situé dans l'Hérault, classé parmi les Monuments historiques avec l’ensemble de son domaine, une des plus grandioses constructions d'ancien Régime en Occitanie, ont été inaugurés le 22 février 2020 en présence de nombreux représentants de l’État et des collectivités.

La salle des États avant travaux, juillet 2019

Ce château  surnommé « le petit Versailles du Languedoc » a appartenu à la famille de Castries jusqu' à la mort du fameux duc et académicien, en 1985. Après un legs contesté à l’Académie française, il est acquis par la commune de Castries en 2013. Construit à partir du 16e siècle sur les vestiges d'un château médiéval, il est achevé dans le dernier tiers du 17e siècle, période pendant laquelle Pierre-Paul Riquet, concepteur du canal du Midi, aménage l'aqueduc pour l'alimentation en eau des jardins, attribués à Lenôtre.


















Les bâtiments et les terrains (parc et jardins) composant le domaine du château sont classés Monuments historiques le 14/05/2004. Cette mesure de protection récente a permis de régulariser des statuts juridiques différenciés, n’offrant qu’un classement partiel de l’ensemble monumental : ainsi, si l'aqueduc a été classé dès 1949, le château ne l'est que 17 ans plus tard. La pièce majeure du château est la salle des Etats du Languedoc, dans laquelle l’assemblée s’est réunie sous l’Ancien Régime. Les États de Languedoc ont joué un rôle important dans l’aménagement et la dynamisation économique de la province, avec la construction du canal du Midi, du port de Sète, de la place royale du Peyrou à Montpellier. Après avoir été longtemps itinérante, de villes en châteaux, l’Assemblé fixe son siège de réunions à Montpellier en 1737. La grande pièce a fait l’objet d’une restauration complète, des huisseries de fenêtres au plafond de plâtre sur lattis, en passant par la remise en teintes des murs de couleur rouge-orange, dernier état connu hérité du 20e siècle qu’il a été fait le choix de conserver. Le poêle de faïence monumental, œuvre majeure d’origine alsacienne du 18e siècle, a conservé sa place à l’entrée de la salle et retrouvera prochainement tout son lustre.

 

La campagne actuelle de travaux de restauration a été lancée en 2016, sous la maîtrise d’ouvrage de la commune, propriétaire. Le chantier a pu ouvrir dès 2017. Elle est conduite sous la maîtrise d’œuvre d’Antoine Madélénat, architecte en chef des Monuments historiques (cabinet RL&A, Paris), et fait appel à une dizaine d’entreprises spécialisées.

La restauration du château de Castries, un chantier en cours

La conservation régionale des Monuments historiques (CRMH) de la DRAC Occitanie, assure le contrôle scientifique et technique de ces travaux, en validant les grandes orientations et les choix techniques, participant aux réunions de chantier hebdomadaires et accompagnant les services municipaux de la commune de Castries dans la gestion au quotidien d’un tel chantier. La DRAC soutient également financièrement ce projet, inscrit au Contrat de Plan Etat-Région 2015-2020.

Ces travaux font suite à une première intervention à la fin des années 2000, qui avait restitué l’imposante couverture en tuiles vernissées, dominant les alentours et imposant la silhouette du château dans le paysage de la campagne montpelliéraine.

L’opération consiste aujourd’hui en la restauration et l'aménagement partiels des intérieurs du château. Le rez-de-chaussée est destiné à l’accueil de salles d’exposition ou d’évènements ; les étages seront ouverts à la visite du grand public, rendue notamment possible par la réalisation d’un ascenseur. Les travaux dans la cage d’escalier et la bibliothèque sont aujourd’hui terminés, tandis qu’a débuté en mars 2020 la restauration de l’enfilade de salons et de chambres situés au premier étage de l’aile nord. Les nombreux papiers peints et tissus ornementaux doivent être déposés et traités avant de retrouver leurs supports d’origine. La chambre de Mac Mahon, située au deuxième étage, ornée de remarquables papiers peints de couleur gris-vert, nécessite elle-aussi d’importants travaux avant son ouverture au public.

La restauration du mobilier et des collections du château : un chantier d’exception

 « En fait, l'un et l'autre, mobilier et château, sont inséparables, et d'abord dans l'esprit des donateurs qui, pendant de longues années, par de patientes et constantes recherches, ont réussi à composer un ensemble remarquable qui donne au château son sens et sa vie ». Ce constat, établi par l’Académie en 1985, illustre la symbiose incontestable qui s’est opérée au fil des ans entre l’architecture et le mobilier, par la volonté du dernier Duc propriétaire. La restauration actuelle s’attache à maintenir ce lien essentiel, pour que les futurs visiteurs puissent découvrir un château meublé et vivant. La restauration du mobilier et sa remise en place dans le monument constituent donc des étapes structurantes du chantier.

Le château renferme une importante collection de mobilier ancien, correspondant à l’ameublement de l’édifice voulu par le duc de Castries au cours du 20e siècle. C’est un ensemble riche de plusieurs milliers d'objets, tableaux, sièges, petits meubles, porcelaines, tapisseries et bibelots divers. La protection juridique s’est imposée pour les pièces majeures, compte tenu de leur intérêt historique et de la valeur d'ensemble de cette collection : 305 pièces sont protégées au titre des Monuments historiques (81 ont été classées le 25/12/2000 et 224 inscrites le 23/11/2007), ce qui en fait une des demeures les plus dotées de la région.

Les collections du château sont liées à l’histoire de la famille de Castries, dont certains membres ont eu un rôle éminent dans l’histoire de France. C’est le cas du 4e marquis de Castries, maréchal de France, ministre de la marine de Louis XVI et vainqueur de la bataille de Clostercamp. D’autres sont apparentés à de célèbres personnages de l’histoire régionale ou nationale, comme le cardinal de Fleury, dont deux portraits ornent le château, ou Patrice de Mac Mahon, duc de Magenta, président de la République, qui avait épousé une sœur de la branche aînée des Castries.

 

 

Le mobilier provient de plusieurs résidences de la famille, d’hôtels parisiens comme celui de la rue de Varenne ou de châteaux, notamment du château de Gaujac ou du château de la Norville près d’Arpajon, ou encore celui d’Olainville aujourd’hui détruit. Les tableaux et objets ont été parfois rachetés après dispersion. Ils ont été rassemblés et regroupés, avec les œuvres qui ont toujours figuré à Castries, par le duc René de Castries, qui a voulu ainsi faire de ce lieu un conservatoire d’histoire de sa famille.

Les portraits, certes de qualité inégale, sont ceux de tous les membres successifs de cette grande famille qui a marqué l’histoire. Ils ont été répertoriés et les attributions ont été vérifiées et complétées. Par exemple, le portrait du cardinal de Bonzi, précédemment attribué à Jean de Troy, a été identifié comme un portrait peint par Antoine Ranc ; celui du chevalier de Fleury, que l’on considérait comme le duc de Guines par Louis Tocqué, a été redonné à Marianne Loir, comme deux autres portraits figurant dans les collections du château.

Parmi les souvenirs de famille, figure notamment dans la salle des Etats, un bas-relief représentant la mort du chevalier d’Assas, par le sculpteur d’Antoine, daté de 1776, qui est le modello en terre cuite de la réalisation en marbre figurant sur la fontaine de la Licorne de la place de la Canourgue à Montpellier.

 

Le mobilier présenté a donc été sélectionné en fonction de son caractère historique (lit et bureau du maréchal de Mac Mahon par exemple) ou de sa qualité exceptionnelle, meubles estampillés de célèbres ébénistes (Nogaret, Tilliard…), de sa rareté, comme l’horloge au sol du début du 19e siècle surmontée d’une figure de Saturne, l’important surtout de table en porcelaine Capodimonte, ou encore comme témoin de l'ameublement d'une époque et reflet du goût de ses propriétaires.

Des restaurations au fil des ans

Une opération en conservation préventive été réalisée dès 2006 (cofinancée par l’Etat et la Région), comprenant l’inventaire de plus de 2 000 objets, le traitement de désinsectisation du mobilier stocké dans la salle des Etats sous une immense bulle d'anoxie (privation d’oxygène), et les premières urgences en restauration.

L’étage particulièrement vaste des combles sert aujourd’hui de lieu de récolement et de stockage pendant les travaux. Les espaces techniques seraient d’ailleurs suffisants pour le traitement et la restauration de certaines pièces de mobilier, ce qui a laissé un temps germer l’idée d’en faire un atelier de restauration provisoire.

 

 

Un nouveau programme permet de poursuivre ces opérations et mener à bien des interventions en restauration en vue de remeubler la salle des Etats aujourd’hui restaurée.

Ce programme, prévu pour s’achever au printemps 2021, concerne un ensemble de 12 tableaux, des chaises et fauteuils du 18e siècle, le bureau du duc, des bas-reliefs et luminaires qui reprendront place tels que depuis les années 1960, ainsi que le nettoyage du grand poêle : ces objets fragiles et complexes seront confiés aux soins de conservateurs-restaurateurs spécialisés.

Une autre campagne de restauration est à prévoir pour que la salle à manger, les salons et chambres soient de nouveaux meublés de tous les lits, tables, guéridons, commodes, tabourets, miroirs ou bibelots qui constituaient le charme d’une demeure habitée.

Conjointement, l’autre volet du « chantier des collections » sera réalisé par les bénévoles de l’association de sauvegarde du château, sous la surveillance et les conseils d’un spécialiste en conservation préventive. Il consistera à déménager, dépoussiérer, nettoyer et remettre à leur emplacement d’origine les meubles qui ne nécessitent pas de restauration.