Mesdames et Messieurs,

Bonne année. Je ne sais pas si elle sera bonne pour tout le monde mais
en tout cas, elle sera intéressante pour chacun d’entre nous.

L’exercice qui nous réunit ce midi est particulier. Des échéances
électorales importantes nous attendent, et je souhaite que la culture et la
communication puissent avoir toute leur place dans les débats qui
s’annoncent.

Comme vous le savez sans doute, je viens de publier un livre, qui s’intitule
Le désir et la chance. J’ai voulu y rendre hommage à tous ceux avec qui
j’ai le plaisir de travailler, les équipes du ministère, les élus, les artistes,
tous les acteurs de la culture qui font de ce pays une terre particulière en
Europe et dans le monde, où les pouvoirs publics sont présents pour
accompagner les artistes, les métiers du patrimoine, les industries
culturelles, un pays où l’on considère que la diversité culturelle ne va pas
de soi, qu’elle a besoin d’être préservée et stimulée. J’ai voulu également
partager avec les Français un regard sur une grande institution, unique en
son genre, qui existe maintenant depuis un peu plus de cinquante ans, si
familière finalement à nos concitoyens que parfois, finalement, on la
connaît peu. J’ai voulu y décrire les grands chantiers qui motivent mon
action, les convictions qui m’animent, et tordre le cou, au passage, à
quelques idées reçues et néanmoins tenaces.

Les chiffres qui viennent récemment d’être rendu publics, sur la
fréquentation record des salles de cinéma, avec la hausse du nombre de
spectateurs et des recettes, ainsi que la reconnaissance internationale
apportée à des films comme The Artist, la fréquentation des salles de
spectacle, celle des musées et des expositions viennent en effet contredire
aisément ceux qui veulent croire à une « dépression culturelle », dont les
corollaires seraient bien entendu un désintérêt du gouvernement et un
désengagement de l’Etat. Il y aussi des secteurs qui souffrent plus dans un
contexte de crise – comme les librairies ou la filière musicale – et j’y
reviendrai.

Je ne souhaite pas aujourd’hui procéder à un inventaire exhaustif de ce
que nous avons accompli depuis 2009. Je voudrais revenir sur quelques
points qui me paraissent essentiels concernant les acquis que nous avons
consolidés, et les principaux chantiers que j’entends porter dans les
prochains mois.

Un mot, tout d’abord, concernant le budget de la Culture et de la
Communication. J’entends dire par les tenants de cette mythique
« dépression culturelle » qu’il n’y a plus d’argent pour la culture. La vérité
est tout autre : le budget de mon ministère a été préservé, alors même que
nous traversons une crise économique et financière de première
importance. Je me suis battu pour le défendre, et j’ai reçu en cela le plein
soutien du Premier Ministre et du Président de la République. Mon
ministère participe, comme tous les autres, à l’effort budgétaire que nous
impose une situation contrainte, mais sans remettre en question ses
missions fondamentales. La culture, en France, n’a pas servi de variable
d’ajustement, comme cela peut être le cas, et je le déplore parce que nous
portons ensemble la responsabilité du paysage culturel européen, pour
certains de nos partenaires de l’Union ; c’est le signe d’un engagement
très fort d’un gouvernement pour lequel la culture est une dimension
essentielle de nos valeurs et de notre démocratie, de notre cohésion
sociale, de notre développement économique et de l’attractivité de nos
territoires, de notre rayonnement international.

Tous les domaines d’action du ministère se situent à des degrés divers au
croisement de ces différentes dimensions, et j’ai tenu à faire en sorte, pour
les actions que nous menons, que chaque perspective puisse être prise en
compte de manière synthétique et non isolément. Le vaste domaine du
patrimoine l’illustre particulièrement bien.

Avec la mise en place des Aires de mise en valeur de l’architecture et du
patrimoine (AVAP), nous disposons désormais des outils pour une
politique du paysage à la fois protectrice et innovante, qui en favorise
l’intelligence, en prenant en compte, de manière intégrée, la protection du
bâti, nos engagements en matière de protection de l’environnement, de
continuité historique et visuelle de ce que l’histoire nous a légué. À ma
demande, les schémas régionaux éoliens seront ainsi désormais soumis
aux commissions régionales du Patrimoine et des Sites, qui en mesureront
l’impact visuel. Je n’ignore pas qu’il reste une étape à franchir : que ce
passage par nos commissions soit suivi d’avis obligatoire. J’y travaille
ardemment. Nos politiques de classement s’étendent désormais à de
nouveaux champs de protection et de mise en valeur, qui compte
désormais les phares, les avions, par exemple, l’habitat social, ou encore
le patrimoine du XXème siècle. J’ai tenu également à relancer la
dynamique des Centres culturels de rencontre, qui permettent de croiser la
mise en valeur d’un patrimoine exceptionnel, à l’image de l’emblématique
Abbaye de Royaumont, avec la création contemporaine.

Quand je soutiens pleinement la restructuration du Musée National
Picasso, dont le coût est pour une part très importante compensé par les
recettes d’une politique intelligente d’expositions internationales de l’oeuvre
du maître, on aura tôt fait d’accuser mon ministère de privilégier Paris…

Alors même que pour nos musées, j’ai veillé à ce que nous développions
une politique ambitieuse pour renforcer le maillage territorial de l’offre
culturelle. À peine inauguré en mai 2010 par le Président de la République,
le Centre Pompidou-Metz rencontre une adhésion du public français et
européen qui va bien au-delà des prévisions initiales. Le Centre Pompidou
Mobile, qui propose une rencontre inédite avec une sélection de chefsd’oeuvre
d’une des plus importantes collections d’art moderne du monde
dans un musée nomade, vient de clore avec succès son étape inaugurale
à Chaumont, avec 35 000 visiteurs en trois mois, avant de prendre la route
pour Cambrai. Le chantier de l’ambitieux Louvre-Lens est sur les rails pour
la fin 2012, tout comme celui du MuCEM à Marseille. Le maillage territorial,
c’est aussi le Plan Musées en région, ou encore le label « Maisons des
illustres » qui oeuvre à une mise en réseau et à une plus grande visibilité
de plus d’une centaine de demeures nous donnant un éclairage sur la
mémoire artistique, politique, scientifique de notre héritage commun. Notre
politique des musées, c’est également une politique tarifaire généreuse
depuis 2009, avec environ quatre visites sur dix qui sont gratuites.

Dans le domaine du patrimoine immatériel, nous avons réussi à intégrer le
repas gastronomique au patrimoine mondial. C’est une chance formidable
de mieux mettre en valeur l’ensemble des métiers qui concourent à une
tradition dans laquelle chacun peut se retrouver, et je veillerai à ce que
nous puissions identifier le lieu le plus adapté pour la Cité de la
gastronomie. Le Cadre noir de Saumur, symbole de l’équitation française,
vient lui aussi d’être inscrit au patrimoine mondial.

Quant aux archives, je n’ai pas peur de le dire : jamais un gouvernement
n’aura fait autant pour les archives.

Parlons des prochains mois.

Pour les archives, la livraison du magnifique bâtiment de Pierrefitte-sur-
Seine signé Massimiliano Fuksas permettra d’enclencher le
déménagement des fonds qui viendront intégrer un Centre qui participe
pleinement de l’équipement culturel du Grand Paris, adapté aux
chercheurs et au public. L’Etat a fait preuve d’un engagement sans
précédent, y compris en termes de moyens financiers en engageant 125
millions d’euros, pour défendre l’idée d’une mémoire ouverte.

En la matière, la Maison de l’histoire de France propose un nouveau
modèle d’établissement en réseau, fondé sur les partenariats. La très belle
exposition des plans reliefs que nous allons inaugurer au Grand Palais est
précisément la première illustration de ce qu’il sera possible de faire avec
une telle structure. Souvenons-nous des débats dont fit l’objet, lors de sa
conception, le Musée du Quai Branly, que bon nombre avait tôt fait de
stigmatiser comme « inutile et incertain », comme Pascal disait de
Descartes. Le Musée du Quai Branly est aujourd’hui parfaitement intégré
au paysage culturel français, et connaît des hausses de fréquentation
spectaculaires. Je suis convaincu qu’il en sera de même pour la Maison de
l’histoire de France : quand elle sera là, on oubliera bien vite les
controverses liées à sa naissance.

À Marseille, je veillerai à ce que le Musée des Civilisations de l’Europe et
de la Méditerranée (MuCEM), signé par l’architecte Rudy Ricciotti, puisse
finaliser son projet dans les meilleures conditions, afin que son
inauguration dans le cadre de Marseille 2013 – Capitale européenne de la
Culture puisse répondre pleinement à son ambition. Egalement en matière
de dialogue interculturel, j’accompagne également la finalisation du
département des Arts de l’Islam, du Louvre, qui est désormais prêt, et qui
rentre dans la phase finale de sa réalisation. Quant au Louvre Abu Dhabi,
je tiens à souligner mon attention constante sur l’avancement du projet, et
je me rendrai sur place à cet effet en février.
En matière d’éducation artistique et culturelle, j’ai multiplié les chantiers, en
prenant le soin de m’appuyer sur des missions brèves menées par des
personnalités dont la compétence et la reconnaissance permettent de
prendre en compte la variété des points de vue et de fédérer autour de
priorités partagées. Je pense par exemple à la mission sur l’enseignement
de la musique menée par Didier Lockwood, qui vient de me rendre son
rapport : j’y vois une avancée très importante, pour les collectivités et
l’Etat, qui permettra aux conservatoires et aux écoles de mieux intégrer les
pratiques collectives, l’apprentissage intuitif et les outils pédagogiques
numériques dans l’enseignement de la musique.

À l’heure où l’histoire des arts est désormais obligatoire dans
l’enseignement primaire et secondaire, j’ai voulu donner une nouvelle
dynamique à une discipline parfois trop peu connue du grand public, et où
pourtant la France excelle, depuis notamment que ses bases ont été
consolidées par André Chastel, dont nous commémorons cette année le
centenaire. J’ai créé ainsi le Festival d’Histoire de l’Art, dont la deuxième
édition se tiendra à Fontainebleau en juin prochain, et qui permettra à
nouveau de faire se rencontrer les producteurs de savoir et le grand public.

L’enseignement supérieur Culture, avec son réseau remarquable
d’établissements, profite pleinement de l’impulsion créée par la
restructuration de l’enseignement supérieur et de la recherche. Bon
nombre d’établissements, tout en gardant leurs spécificités sont désormais
intégrés dans les pôles de recherche et les laboratoires d’excellence, et
nous avons établi avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la
Recherche les bases d’une collaboration étroite dont les gains en matière
de visibilité, de possibilités de financement et de croisement des disciplines
seront considérables.

Dans le domaine du spectacle vivant, je voudrais revenir sur un chantier
emblématique. J’ai relancé le projet de la Philharmonie, pour lequel il fallait
montrer une volonté politique claire afin de le sortir des impasses
administratives qui le menaçait. Le « trou d’eau » du Parc de La Villette est
désormais redevenu un grand chantier qui avance désormais à un rythme
soutenu et suivant un calendrier maîtrisé. Bientôt, la capitale pourra
disposer d’un équipement sans équivalent, afin que la France puisse
rattraper son retard en la matière, accueillir comme il se doit les plus
grandes formations au monde, dans un établissement qui jouera un rôle
clef pour la musique en France, en matière de diffusion, d’éducation et de
transmission, en associant notamment les conservatoires et les orchestres
régionaux.

Le plan d’action pour le spectacle vivant, avec 3,5 millions de mesures
nouvelles pour 2012, va nous permettre de développer certains réseaux
labellisés - je pense notamment aux centres nationaux des arts de la rue et
aux pôles nationaux des arts du cirque-, de mieux soutenir les compagnies
et les ensembles indépendants, et de renforcer le rayonnement
international. À cela s’ajoute le fait que les interventions de l’Etat ont été
confortées, avec la mise en place d’un plancher d’intervention de mon
ministère pour les scènes nationales et la clarification des taux
d’intervention de l’Etat pour les centres dramatiques nationaux et les
centres chorégraphiques nationaux, à la suite d’une concertation
approfondie avec les collectivités territoriales.
Dans les prochains mois, la mission sur les nouveaux financements pour le
spectacle vivant me remettra son rapport. Nous disposerons d’une série de
propositions pour donner de nouveaux moyens au théâtre public et privé,
pour conforter les budgets artistiques et favoriser la diffusion des
spectacles créés. À terme, nous devons pouvoir aboutir vers une loi
d’orientation, et le chef de l’Etat en a admis le principe.

Dans le domaine des arts plastiques et de la création contemporaine, deux
événements majeurs nous attendent dans les mois qui viennent : la
donation Lambert, et l’inauguration des nouveaux espaces du Palais de
Tokyo.

En Avignon, la Fondation Lambert constitue l’une des plus importantes
collections d’art contemporain en France. Le principe de sa donation est
désormais acquis. Avec près de 700 pièces pour une valeur d’environ 100
millions d’euros, c’est la plus grande donation à l’Etat depuis celle de
Picasso. Je souhaite que nous puissions très vite aboutir dans ce beau
projet.

Le 12 avril, j’inaugurerai les nouveaux espaces du Palais de Tokyo. Les
travaux conduits par Lacaton & Vassal, lauréats de l’équerre d’argent, sont
sur le point de s’achever. C’est un ensemble de plus de 20 000 m², sous la
direction de Jean de Loisy à qui l’on doit notamment l’exceptionnel
Monumenta d’Anish Kapoor l’année dernière au Grand Palais, qui sera
consacré à la création contemporaine émergente et confirmée, dans une
factory à la française qui sera également un lieu de vie, grâce aux
partenariats public-privé qui sont sa marque de fabrique depuis la création
de l’établissement il y a dix ans.

Dans un domaine qui m’est cher et qui concerne plusieurs domaines de
compétence de mon ministère, j’ai redonné également toute sa place à la
photographie, en créant au ministère une mission chargée de la
conservation du patrimoine photographique, du renforcement de l’aide au
photojournalisme et de la formation professionnelle. Avec le portail Arago,
avec une attention renouvelée aux donateurs, aux collections en
déshérence, en s’appuyant sur la dynamique du pôle d’Arles, avec bientôt
un nouveau centre d’exposition à Paris, à l’hôtel de Nevers, j’ai lancé des
projets majeurs dont l’aboutissement sera essentiel au cours des
prochaines semaines.

Pour ce qui est d’un domaine qui vous concerne directement, celui de la
presse, je voudrais rappeler que l’Etat a donné au secteur un soutien
exceptionnel depuis 2009, dans la continuité des Etats généraux de la
presse. Cet effort sur trois ans a permis d’accompagner la filière, qui
connaît une phase de transition économique et technologique
déterminante pour son devenir, en encourageant le développement de
nouveaux canaux de distribution comme l’aide au portage, en installant
une régulation plus efficace de la filière avec la réforme, l’année dernière,
du Conseil supérieur des messageries de presse, et la création de
l’Autorité de régulation de distribution de la presse, qui veille à la
préservation des équilibres des messageries de presse.

Je voudrais également évoquer le succès de l’opération « Mon journal
offert ». Plus de 600 000 inscrits ont bénéficié de cette opération de
reconquête du lectorat jeune.
J’ai également développé avec cinq directions régionales des affaires
culturelles une aide spécifique aux médias de quartier, avec des moyens
pour favoriser la professionnalisation des acteurs par des actions de
formation et l’utilisation des médias émergents. L’expérimentation
commence à porter ces fruits.

Dans les prochains mois, je continuerai à être très vigilant sur les
transformations que traverse la filière de la distribution. J’en appelle à la
responsabilité des acteurs de la filière et des éditeurs, afin de maintenir les
principes de solidarité qui ont prévalu au cours des dernières décennies.

Je continuerai à accompagner les situations les plus fragiles, qui
concernent actuellement certains titres de la presse quotidienne nationale.

J’ai eu il y a peu un entretien avec la directrice générale de La Tribune, et
je peux affirmer qu’il y a toujours un avenir pour ce titre. Il y va du soutien
de l’Etat au pluralisme de l’information. Ce soutien de l’Etat passe
également par l’attention que l’Etat doit porter aux dispositifs de retour à
l’emploi et aux actions en matière de formation.

De manière générale, je tiens à réaffirmer devant vous tout mon soutien
pour l’avenir de vos professions. Elles sont au coeur de l’exercice de la
démocratie, et elles traduisent un courage et un engagement souvent
exemplaires pour la liberté de l’information. Il y a un an, Lucas Dolega était
tué à Tunis. J’ai été frappé récemment par l’agression intolérable de
Carole Sinsz, journaliste de France 3, au Caire ; par la mort également de
Gilles Jacquier à Homs, et je renouvelle tout mon soutien à sa famille, à
ses proches et à ses collègues.

L’audiovisuel français vient de tourner une page importante de son histoire,
avec l’achèvement du passage à la télévision tout numérique, qui s’est
traduit par un effort financier majeur de la part de l’Etat. L’offre nationale
gratuite est ainsi passée de 6 à 19 chaînes, avec une qualité d’image et de
son considérablement améliorée, une offre diversifiée en matière de
programmes à la demande et en rattrapage, le lancement d’une
quarantaine de chaînes locales. Je suis fier d’avoir pu accompagner cette
transition majeure du paysage audiovisuel français.

Nous avons par ailleurs renouvelé les Contrats d’objectifs et de moyens
des sociétés du service public de l’audiovisuel, en donnant à ARTE les
moyens d’une reconquête de son public, et en renforçant les obligations de
Frances Télévisions en matière d’investissement dans la création originale.

ARTE comme France Télévisions vont également accroître leur
développement sur internet, afin de se donner les moyens de confirmer
leur rôle de prescripteur de référence. Je pense par exemple à la
plateforme internet de France Télévisions, consacrée à la diffusion du
spectacle vivant, qui sera lancée à la fin de l’année.

J’ai également tenu à ce que nous adaptions le compte de soutien du
Centre national du cinéma et de l’image animée, afin que les nouveaux
opérateurs, notamment les opérateurs de télécommunications, contribuent
à la création. Il faudra à terme y associer également les acteurs
internationaux du net. Dans la même logique, nous avons également
réformé la taxe sur les services de télévision (TST), en élargissant
l’assiette de la taxe sur les distributeurs, afin notamment de mettre fin aux
contournements fiscaux. Ces réformes sont la marque de mon
engagement et de la politique volontariste du gouvernement pour défendre
les ressources du CNC et un modèle français pour le cinéma conforté par
les succès nationaux et internationaux de l’année précédente, ainsi que
par les fréquentations record des salles de cinéma.

J’ai tenu à renforcer par ailleurs l’accompagnement par l’Etat du secteur du
jeu vidéo, notamment en ce qui concerne la structuration de la
rémunération des différents métiers qui travaillent dans ce secteur
d’excellence pour la France. Je crois par ailleurs que nous avons montré,
avec la très belle exposition Game Stories au Grand Palais, qui a
rencontré un grand succès, et bientôt la Cité du Jeu Vidéo portée par
Universcience à la Cité des Sciences, que le jeu vidéo a désormais toute
sa place dans le périmètre d’action du ministère et de ses établissements.

Dans les prochains mois, les chantiers ne manquent pas. Concernant le
cinéma, je pense notamment à l’accompagnement des industries
techniques du cinéma, qui connaissent les difficultés que l’on sait dans
cette phase de transition technologique, et auxquelles j’accorderai la plus
grande attention. Pour l’audiovisuel, des rendez-vous importants nous
attendent : la finalisation du contrat d’objectifs et de moyens de
l’Audiovisuel extérieur de la France, et l’attribution prochaine de six
nouvelles chaînes qui seront sélectionnées par le Conseil supérieur de
l’audiovisuel en mars prochain, sur la base des 34 dossiers présentés.

Nos industries culturelles, de manière générale, connaissent des mutations
majeures sur lesquelles il était indispensable de se mobiliser. Je veux
parler de la mise en place de la Haute Autorité pour la diffusion des
oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) et de l’approche
en termes de réponse graduée pour lutter contre le piratage. Les effets
commencent à se faire sentir : le piratage baisse plus en France
qu’ailleurs. C’est là le fruit d’une mobilisation qui va de pair avec le soutien
que nous apportons à la structuration et à la diversité des offres légales.

Ce modèle a par ailleurs suscité un intérêt croissant au plan international :
ayants droit et fournisseurs d’accès internet se sont mis d’accord aux
Etats-Unis pour développer un dispositif similaire, à l’instar également de la
Corée du Sud, ou des dispositifs législatifs mis en place en Espagne, au
Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande. La diabolisation de l’Hadopi en
dispositif répressif est parfaitement injuste.

Dans le domaine du livre, la loi sur le prix unique du livre numérique a
constitué une avancée majeure, avec sa portée extraterritoriale, qu’il nous
faudra défendre au niveau européen – de même que la TVA à taux réduit
sur le livre numérique. Par ces dispositions, nous avons établi les bases
pour accompagner un développement du livre numérique favorable qui
place en son coeur la diversité de l’offre et la rémunération des créateurs.

Face à ceux qui pensent que l’approche française n’est pas adaptée à la
nouvelle donne du numérique, je crois au contraire que nous avons écrit
une nouvelle page de l’histoire d’un modèle français qui paraît de moins en
moins exotique à nos partenaires communautaires.

L’Hadopi développe actuellement une expertise de l’impact du streaming
illégal et des mesures de protections utilisables. Les résultats seront prêts
d’ici février. Nous engageons dès à présent une action visant à
responsabiliser les intermédiaires qui commercent avec les sites de
streaming illégal, qui sont souvent des entreprises commerciales
prospères, ce qui n’est pas acceptable, comme l’a rappelé le président de
la République en Avignon, en novembre dernier.

Parmi les grands chantiers qui vont nous occuper dans les mois qui
viennent, je mentionnerai également la réflexion sur la filière musicale, et la
mise en place des bases du futur Centre national de la musique. La
mission de préfiguration conduite par Didier Selles travaille actuellement
en lien avec l’ensemble des professionnels. Je prends rendez-vous avec
vous au MIDEM pour que nous fassions un point sur son avancement,
pour lequel je souhaite que nous puissions aller le plus loin possible. Il
s’agit d’un moment historique pour le soutien à la filière dans son
ensemble.

Je voudrais également revenir sur la situation des librairies. Sur ce point, le
parallèle avec les exploitants de cinéma fait sens : il s’agit de faire en sorte
que les évolutions techniques ne nuisent pas aux principes qui régissent
l’aménagement culturel de nos territoires, en définissant par ailleurs, dans
le cas des librairies, une réponse française afin de ne pas être totalement
dépendants des acteurs globaux de l’internet. C’est le sens du réseau des
librairies de référence et des librairies indépendantes de référence, institué
en 2009, et que je continue à renforcer ; c’est le sens surtout de la mission
sur l’avenir de la librairie, que j’ai confiée à six personnalités dont la
notoriété permettra d’avancer suffisamment vite pour remettre leurs
propositions à la fin du premier trimestre de 2012, afin d’identifier des
pistes innovantes pour l’accès au financement, la préservation des marges
des libraires dans le contexte de l’augmentation du taux réduit de TVA, et
une allocation plus efficace des aides publiques.

Sur tous ces points, force est de constater que la situation a passablement
évolué. La défense des droits des créateurs, qui pouvaient dans bien des
cas paraître menacée il y a trois ans, a fait l’objet de notre mobilisation
constante. Nous n’avons pas cédé, et force est de constater que notre
relation avec des acteurs globaux comme Google n’est plus la même
aujourd’hui. Les projets de numérisation massive sans rétribution et les
partenariats ne prenant pas en compte les acquis juridiques que nous
défendons ne sont désormais plus de mise, et je me réjouis du dialogue
désormais constructif que nous avons mis en place avec Google.

Ces mobilisations prennent du temps, elles nécessitent un engagement et
une volonté de dialogue qu’il nous faut renforcer au niveau européen. Je
me réjouis de la convergence de vue avec la commission européenne sur
la TVA à taux réduit sur le livre numérique ; c’est le fruit du travail de
conviction mené par Jacques Toubon. Reste encore à poursuivre ce travail
de persuasion auprès des Etats Membres.

Afin d’accompagner et d’encadrer cette démarche, j’ai souhaité proposer à
mes homologues européens un « décalogue » pour l’Europe de la Culture,
qui a reçu l’adhésion de vingt-deux Etats membres, avec le soutien
également de la Commissaire Vassiliou. Il constitue une feuille de route
pour nos engagements communs. À l’heure où le projet européen est
amené à connaître un renouveau, il était indispensable que nous
inscrivions les politiques culturelles sur son nouvel agenda. Ce texte sera
rendu public dans les prochains jours.
Lors de mes nombreux déplacements à l’étranger, j’ai tenu à renouveler ou
à créer, en collaboration avec le ministère des Affaires étrangères et
l’Institut Français, des accords de coopération culturelle qui contribuent au
rayonnement de nos politiques culturelles et de nos établissements. Je
pense au Louvre Abu Dhabi ; je pense également aux accords de
coproduction cinématographique que nous avons mis en place avec
l’Ukraine, l’Afrique du Sud, au projet d’académie franco-russe du cinéma
qui est à l’étude, à l’accord franco-allemand pour le cinéma, ou encore à
l’accord franco-iltaien sur la musique que j’ai signé récemment à Rome.

J’ai également eu à coeur de contribuer à accroître l’attractivité de la
France pour la visibilité des cultures du monde, en m’impliquant dans la
réussite des saisons culturelles, avec la Russie, l’Estonie, la Croatie ; de
développer des actions de solidarité, avec Haïti, avec le Japon, avec le
Cambodge, et d’accompagner les politiques culturelles des pays en
transition.

Parmi les actions qui vont nous mobiliser dans les mois à venir, je voudrais
évoquer l’exposition Plaisirs de France, qui proposera une sélection de
chefs-d’oeuvre de nos collections nationales, issues de nos grands
établissements et de nos musées en région, à Bakou en mars prochain,
puis à Almaty. L’Azerbaïdjan et le Kazakhstan font désormais partie des
partenaires qui comptent de plus en plus pour notre pays : donner une
dimension culturelle à nos coopérations, au-delà des relations
économiques et commerciales, c’est apporter, j’en suis persuadé, une
contribution importante au dialogue interculturel.

Autre projet qui m’est cher, la transformation du Fonds Sud en fonds de
soutien aux cinémas du monde. J’ai organisé il y a quelques mois une
rencontre importante à la Maison de la culture d’Amiens entre cinéastes,
producteurs, distributeurs et bailleurs de fonds, afin que nous puissions
lancer les bases d’une mise en cohérence des différents dispositifs d’aide
au cinéma du sud existants en Europe. Je serai particulièrement attentif à
ce que nous puissions consolider les acquis de cette concertation inédite.

Pour conclure, je voudrais revenir sur quelques chantiers qui me sont
chers, qui concernent la diversité et la démocratisation culturelles. Il s’agit,
vous le savez, d’une ambition à la fois sociale et territoriale propre à ce
ministère quasiment depuis sa création. J’évoquerai trois points qui
constituent à mes yeux une relance essentielle de cette dimension de
l’action de mon ministère :

J’ai relancé les conventions avec les collectivités locales. Ce sont plus
d’une soixantaine de conventions qui ont ainsi été signées avec les
collectivités les plus diverses, des grandes villes aux territoires ruraux, afin
de nous doter, Etats et collectivités, d’un cadre commun d’action. L’action
culturelle en France dépend plus que jamais d’une collaboration la plus
étroite possible entre l’Etat et les collectivités, et c’est tout le sens de
l’attention particulière que j’apporte au dialogue qui se noue au sein du
Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, afin
de renforcer l’irrigation de l’offre culturelle dans l’ensemble de nos
territoires, y compris ruraux dans le cadre d’un partenariat renouvelé avec
le ministère de l’agriculture, afin d’identifier, avec les collectivités, avec la
mobilisation de nos directions régionales des affaires culturelles, les
meilleures initiatives associatives en matière de « culture partagée ». Sur
ce dernier point, l’apport du mécénat me paraît également essentiel : nous
sommes en train de finaliser un fonds de dotation pour la démocratisation
culturelle qui permettra de renforcer, pour ces actions, les moyens mis en
oeuvre et leur continuité dans la durée.

Cette ambition sociale et territoriale renouvelée pour mon ministère, c’est
également celle du Grand Paris – un projet essentiel, au long cours, dont
la dimension culturelle est désormais pleinement prise en compte, non
seulement par le travail des architectes au sein de l’Atelier du Grand Paris,
mais aussi en termes de démocratisation culturelle et de maillage
territorial. Je souhaite que dans les semaines qui viennent, nous puissions
consolider le projet de la Tour Médicis afin de renforcer sa capacité à
héberger les projets les plus forts, en s’appuyant sur le tissu local des
établissements voisins et des associations, en visant la mise en valeur des
pratiques amateurs. Je veux que ce projet soit le signe d’un
infléchissement majeur de notre politique culturelle, afin de prendre
pleinement la mesure du potentiel inexploité de ces territoires.

Autre « angle mort », jusque-là, de nos politiques culturelles : les Outremer.
J’ai profité de l’occasion qui nous était offerte avec l’Année des Outremer
pour relancer notre action culturelle dans les territoires ultramarins.

Par leur apport culturel inestimable, par la diversité de leur patrimoine, les
Outre-mer représentent une chance pour la culture française. J’ai conforté
pour cela les moyens des directions des affaires culturelles des Outre-mer,
et j’ai lancé des projets emblématiques, comme la maison des mémoires et
des cultures guyanaises, ou le musée de Mayotte. J’ai veillé à relancer
dans les Outre-mer le plan d’action en faveur du livre et de la lecture, la
rénovation des bibliothèque, les contrats territoire-lecture ou encore la
traduction en créole de classiques français ; j’ai relancé les chantiers de
rénovation de plusieurs musées ultramarins, avec une campagne de
classement et de valorisation du patrimoine bâti et du patrimoine
immatériel. À ce titre, je me rendrai le mois prochain en Martinique et en
Guadeloupe pour suivre l’avancement de ces projets. Dans le domaine des
langues, les Etats généraux du multilinguisme dans les Outre-mer, que j’ai
eu le plaisir de clore à Cayenne en décembre dernier, ont constitué, je
crois, un tournant majeur pour la reconnaissance des quelques 50 langues
de France qui sont les langues maternelles de près de trois millions de
Français : nous allons dans les semaines qui viennent, avec les directions
des affaires culturelles d’Outre-mer, établir un plan d’action qui prendra en
compte les propositions issues de ces rencontres. Dans les prochaines
semaines également, nous allons lancer avec le ministère de l’Outre-Mer
une agence qui sera dédiée aux cultures ultramarines, qui jouera un rôle
clef notamment pour leur promotion en métropole.

Sur tous ces chantiers, j’entends m’investir pleinement jusqu’au bout, afin
que notre ministère puisse continuer à être force de proposition.

L’approche des présidentielles me donne également l’occasion de rendre
visible notre action, de susciter les débats, de ne pas avoir peur des
controverses. Ils ne peuvent que renforcer une cause que je suis fier de
servir.

Je vous remercie.