C’est un détail qui a son importance. En naviguant sur le site Internet du Palais de Tokyo, les visiteurs virtuels ont la possibilité de cliquer sur un bouton « Mode éco », situé en haut, à droite de la page d’accueil. Une fois l’icône activée, toutes les vidéos, toutes les images disparaissent de l’écran, au profit de légendes. Des balises « alt » renforcent l’accessibilité pour les déficients visuels. Quel est l’effet de ce dispositif ? Sans vidéo, ni image, le site est plus « léger » en bande passante, donc moins consommateur d’électricité, moins émetteur de gaz à effet de serre.
Ce bouton « Mode éco » est l’une des nouveautés du site éco-conçu et mis en ligne par le centre d’art en février 2022. « Les professionnels de la culture naviguent aujourd’hui entre des injonctions paradoxales. Alors que les usages numériques accélèrent, en particulier depuis le Covid, nous sommes amenés à refonder notre stratégie à l’aune d’un constat sans appel : l’impact environnemental, social, politique et sanitaire du numérique », souligne Mathieu Boncour, directeur de la communication et de la RSE au Palais de Tokyo.
Gagner en sobriété
Grâce à sa conception, le site Internet du Palais de Tokyo a réalisé un saut vers davantage de sobriété numérique. Comment ? « En plus du bouton « Mode éco », nous avons sélectionné un hébergeur responsable basé en France – ce qui garantit la souveraineté des données informatiques. Parmi ses innovations, Il n’utilise pas de climatiseurs pour refroidir ses serveurs. Il les immerge dans une solution d’huile minérale, ce qui minimise fortement l’impact énergétique », explique Lucile Crosetti, responsable de la communication digitale du Palais.
Autre exemple, près de 80% du site est directement conçu pour une lecture sur les téléphones mobiles, ce qui permet là encore de gagner en sobriété. « Nous avons aussi décidé de repenser notre communication sur les réseaux sociaux pour réduire son impact », argumente Lucille Crosetti.
Changement de paradigmes
Pour Romane Clément, co-fondatrice du studio de design « Ctrl S » qui traite du numérique responsable, « l'éco-conception est nécessaire, mais loin d'être suffisante dans le secteur culturel pour réduire l'impact du numérique ». Elle appelle à un double changement de regard. D’abord sur l’analyse des besoins des utilisateurs. « Il faut sans cesse que les professionnels se demandent : est-ce que l’utilisateur a besoin de de cette fonctionnalité pour comprendre le message ou est-ce un « gadget numérique » ? ».
Deuxième changement de paradigme : « L’éco-conception et la sobriété peuvent être sources de créativité, d’attractivité. On peut réaliser des sites alors la fois très réussis et sobres », conclut l’experte, qui anime avec Camille Pène des « Augures », le dispositif « Augures, Lab numérique responsable dans la culture ». Ce programme de recherche-action numérique responsable dans le secteur culturel permet à vingt institutions chaque année de concrétiser leurs démarches de sobriété numérique, et notamment d'éco-conception.
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