Grâce aux moyens de sécurisation mis en place par les services de la Direction régionale des affaires culturelle (Unité départemental de l’architecture et du patrimoine de l’Aisne et Conservation régionale des monuments historiques) suite à la tempête Egon qui a frappé la rose occidentale de la Cathédrale Saint-Gervais-Saint-Protais de Soissons en janvier 2017, la maîtrise d’œuvre a pu, dans le cadre de son étude de diagnostic, bénéficier de moyens d’accès exceptionnels pour réaliser les relevés d’état sanitaire au niveau des décors sculptés de l’arc brisé de la façade.
Des éléments anthropomorphes authentiques mis à jour au cours des études de l’architecte en chef des monuments historiques
Des petites têtes anthropomorphes ont été distinguées de la plupart des fleurons à motifs végétaux. Celles-ci sont discrètement dissimulées : les personnages se trouvent au centre de la composition, à la place des stigmates des fleurons, encadrés de part et d’autre par les pétales qui font penser à une épaisse chevelure. (cf photo 1)
Compte tenu de la longue durée de chantier de construction du massif occidental au long du XIIIe siècle, la présence de ces éléments dont les traits et l’expressivité rappellent encore les prémices de la sculpture gothique, n’est pas si étonnante.
Quelques derniers éléments anthropomorphes authentiques ont survécu malgré l’uniformisation progressive des décors sculptés. En effet, à partir du XIIIe siècle, ils ont été presque systématiquement remplacés par des crochets à motifs floraux ou végétaux.
Ils sont retombés au niveau des archivoltes des portails occidentaux, éléments de la corniche sculptée du Chœur, couronnement de contreforts, pinacles des arcs-boutants et sous-face des gargouilles… Éparpillés dans différentes parties de la cathédrale, ces rares petits personnages se révèlent à nos yeux au fur et à mesure que les études sont conduites par l’architecte en chef des monuments historiques.
D’autres visages sculptés présents sur l’arc brisé datent clairement des travaux de la reconstruction après-guerre (comme en témoigne la documentation disponible – plans Emile Brunet), mais la qualité de leur exécution est également soignée.
Utilisation ponctuelle de rayons laser préconisée pour la restauration
En raison de leur exposition aux intempéries et de la nature de la pierre locale mise en œuvre, ces décors présentaient pour la plupart un épiderme fragilisé.
C’est pourquoi l’utilisation ponctuelle de rayons laser a été préconisée par la maîtrise d’œuvre à l’issue de son étude. En effet, outre leur beauté, la singularité de ces décors imposait une technique de nettoyage adaptée à leur finesse, qui pouvait être devinée malgré l’épaisse croûte noire qui les recouvrait.
Afin de retenir le protocole adapté pour la restauration du décor sculpté, des essais de nettoyage différencié ont été réalisés en début de chantier (cf photos 2 et 3). Les petites fenêtres d’essais réalisées au début du chantier par la société TOLLIS, attributaire du marché de restauration du décor sculpté, ont permis de confirmer le choix de l’architecte et les résultats ont été conformes aux attentes : les croûtes noires ont pu être pulvérisées, tout en conservant les traits de la sculpture et l’épiderme de la pierre intacts.
Utilisation d’une machine unique
C’est pourquoi, après avoir réalisé un micro-gommage fin et délicat, ces crochets anthropomorphes ont fait l’objet d’un nettoyage complémentaire à l’aide d’une machine émettant un rayonnement LASER. Cette machine, à exemplaire unique, est le fruit du développement de la société TOLLIS de 2014 à 2018 dans le but d’élaborer un LASER de nouvelle génération.
Généré par une diode laser à haut rendement (et non plus par une lampe flash) son rayonnement ultra-précis permet une désintégration photonique des encroûtements noirs qui sont littéralement pulvérisés sous l’effet de l’accumulation de l’énergie lumineuse transmise. La pierre sous-jacente étant de couleur claire, celle-ci ne peut accumuler cette énergie et elle se retrouve ainsi protégée, assurant ainsi la très grande sélectivité du nettoyage. L’énergie du faisceau est systématiquement calibrée pour poursuivre cet objectif.
L’application de rayons laser a ainsi remarquablement contribué à la redécouverte et à la mise en valeur de ces petits personnages sculptés de l’arc brisé de la façade occidentale de la Cathédrale, dont la délicatesse permet de tempérer le caractère austère et robuste de cette façade du XIIIe siècle.
Le reste du décor sculpté a fait l’objet d’un nettoyage délicat plus « classique » par micro-grommage consistant à projeter à très faible pression un granulat très fin (Archifine) sur l’épiderme à restaurer.
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