Conclusion
La Frontale ne s'inscrit pas en rupture avec le centre historique, mais crée un mur de scène - Photographie en noir et blanc, datée du 6 mars 1952. Vue aérienne du chantier. Rapprochement entre les façades-écrans incurvées des cages d’escalierset les galbes baroques de la façade de l’église Saint-François-de-Paule. © Toulon. Direction départementale de l’équipement. Bibliothèque. Album photographique “Reconstruction du port de Toulon”.
La reconstruction de Toulon est un exemple remarquable de l'architecture et l'urbanisme de l'après-guerre, fondé sur le recours à la préfabrication et l'utilisation d'une trame modulaire.
Incomprise au moment de sa construction, comme l'a été la Cité Radieuse de Marseille, la Frontale est surnommée "La muraille de Chine" par ses détracteurs. Mais ces derniers n'ont pas su voir le formidable atout qu'elle offre à la ville : l'unique front de mer méditerranéen entièrement dévolu à la promenade et préservé des nuisances sonores urbaines.
En respectant l'échelle de la ville, la Frontale ne s'inscrit pas en rupture avec le centre historique, mais crée un mur de scène qui s'impose à la sortie du dédale de ruelles sinueuses et sombres composant le paysage coutumier de la vieille ville. Ce mur de scène s'affiche de façon monumentale par le relief incurvé de ses cages d'escaliers, et n'est pas s'en rappeler les galbes incurvés de la façade baroque de l'église Saint-François-de-Paule, toute proche.
De même une certaine concession à l'architecture locale est visible dans le maintien des toitures, en pente douce, couvertes en tuiles creuses, l'emploi de la pierre et des tomettes. On la retrouve aussi dans les coursives, traitées comme des "rues extérieures", agrémentées de bancs (moulés dans du béton où se mélangent galets et coquillages), éléments forts de la sociabilité méditerranéenne, et de jardinières disposées au niveau de l'appui des baies aménagées dans les claustras.
La Frontale du port de Toulon fonde malheureusement sa renommée sur une mauvaise réputation, acquise dès les débuts de sa construction. Comme un juste retour des choses, cela lui permet aujourd'hui d'être l'une des réalisations les plus incontournables du paysage urbain.
Visiter Toulon, voir la Frontale et le Port-Marchand apparaît comme une nécessité culturelle pour comprendre l'application des thèses du Mouvement Moderne dans les années 1950, car l'expérience toulonnaise se révèle aujourd'hui d'un intérêt patrimonial de premier plan, au même titre que les célèbres reconstructions du Havre par Auguste Perret, de Maubeuge par André Lurçat ou de Royan par Claude Ferret.
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