Mesdames et messieurs,
Chers amis,
Merci à chacune et chacun d’entre vous d’être présents aujourd’hui en dépit des difficultés de circulation à Paris et dans nos territoires.
Comme l’a très bien montré la pastille INA que nous venons de visionner, le neuvième art est devenu une véritable passion culturelle française.
La bande dessinée a conquis le cœur des français grâce au talent de ses créatrices et de ses créateurs, grâce à la passion de toute une filière : artistes, éditeurs, libraires, festivals et bibliothèques.
Aujourd’hui c’est près d’un français sur trois qui lit régulièrement une bande dessinée.
Alors que cette année s’achève, je suis très heureux de vous présenter aujourd’hui la programmation de « BD 2020 ». Une année aux couleurs du 9e art !
« BD 2020 » mettra en valeur la formidable vitalité de la bande dessinée, le savoir-faire et la créativité de nos artistes, la richesse et la diversité des œuvres, et un patrimoine remarquable.
Oui, la bande dessinée est un art singulier. Un art à part entière.
Ce constat s’impose aujourd’hui comme une évidence, mais cette reconnaissance a été tardive.
Art du récit, la bande-dessinée a trop souvent été regardée comme un simple divertissement s’écartant de littérature.
« Erreur grossière » « je dirais même plus, grossière erreur », aurait ajouté le génie d’Hergé.
Car c’est oublier que la BD est tout autant un art de la planche, un art du dessin, un art du trait et de la couleur, qui fait appel à des techniques variées.
Trop longtemps considérée comme « objet culturel non identifié », selon les mots de Thierry Groensteen, cette forme esthétique constitue un art en soi.
Loin du simple loisir, le 9e art est un espace de création qui explore toutes les formes et se renouvelle sans cesse.
« Plus vite que son ombre », aurait sans doute précisé Morris.
Le 9e art est toujours en mouvement. Il aime emprunter les chemins de traverse, il se détourne des voies toutes tracées.
La bande dessinée présente en cela une grande diversité de formats, de thèmes et de langages.
Il y a, bien sûr, les grandes séries populaires dont les héros sont devenus des figures incontournables de notre culture partagée – je pense à Tintin, Astérix ou Boule et Bill, et tous les autres.
Il y a aussi les planches satiriques ou parodiques qui perpétuent la tradition transgressive d’un art longtemps resté en marge.
Mais les œuvres ne cessent de se diversifier pour embrasser tous les genres, du roman graphique à l’autobiographie en passant par le reportage, mais aussi le manga.
Les quatre marraines et parrains de BD 2020 incarnent cette créativité et ce renouvellement.
Florence Cestac, Catherine Meurisse, Jul et Régis Loisel, nous font l’honneur d’accompagner cet événement. Je les en remercie chaleureusement.
Par la complémentarité de leurs regards, ils incarnent la richesse de l’art de la bande dessinée.
Le succès que connaissent leurs œuvres dit bien la place qu’occupe la BD dans le paysage culturel d’aujourd’hui.
Figurant parmi nos industries créatives et culturelles les plus dynamiques, elle est largement plébiscitée par nos concitoyens qui sont de plus en plus nombreux à l’intégrer à leurs habitudes de lecture.
La bande dessinée est un segment de l’édition en forte croissance : sa valeur a progressé d’un tiers en seulement 10 ans, de 2008 à 2018.
Particulièrement dynamique, la BD est le troisième marché de l’édition en nombre d’exemplaires vendus. Plus d’un livre sur sept acheté en France est une bande dessinée !
Je le rappelais en introduction, ce succès est celui de toute une filière : auteurs, éditeurs, libraires, festivals, bibliothèques, mus par le même engagement.
La BD noue également un dialogue de plus en plus nourri avec les autres disciplines artistiques.
C’est une source d’inspiration privilégiée pour le cinéma ou le jeu vidéo, où son esthétique s’impose comme une référence incontournable pour bien des créateurs.
Cet art populaire pâtit pourtant d’une reconnaissance encore insuffisante au sein de nos institutions culturelles.
Ce constat enjoint à agir.
Chers amis,
Il est grand temps de consacrer à la BD toute l’attention qu’elle mérite !
De changer notre regard pour en finir avec les considérations simplistes qui, depuis longtemps déjà, ne reflètent pas la réalité du 9ème art.
Je vous remercie, cher Pierre Lungheretti, d’avoir établi un diagnostic très complet de la situation de la bande dessinée en France dans le rapport que vous m’avez remis en début d’année.
Consacrer l’année 2020 à la valorisation de la bande dessinée était l’une de vos propositions.
Depuis le plan lancé par Jack Lang il y a 30 ans, complété par Philippe Douste-Blazy, aucun gouvernement n’a pris d’initiative globale en faveur de la bande dessinée.
J’ai donc souhaité que soit donné un nouvel élan à la bande dessinée.
Qu’une nouvelle page s’écrive – ou se dessine – pour le 9e art.
C’est le sens de BD 2020.
Tout au long de l’année 2020, nous allons promouvoir la bande dessinée, dans toute sa diversité, partout en France et dans le monde, favoriser l’intégration de cet art à nos politiques culturelles et veiller à mieux accompagner tous les créateurs.
« LA FRANCE AIME LE 9EME ART » !
Cette déclaration d’amour qui accompagne BD 2020 incarne notre volonté de rendre le 9e art plus accessible, plus visible, plus attractif.
De donner à comprendre ce qui fait la singularité du travail de ses auteurs.
Pour cela, la bande dessinée doit s’enraciner dans les manifestations culturelles proposées dans tous nos territoires, trouver plus de place encore dans les bibliothèques et les médiathèques qui sont nos premiers services culturels de proximité.
Je sais que nous pouvons déjà compter sur les initiatives de nombreuses collectivités territoriales.
Je pense en particulier, bien entendu, à Angoulême, devenue depuis de nombreuses années la capitale mondiale de la bande dessinée.
Je tiens à saluer l’action de son maire, Xavier Bonnefont.
L’UNESCO vient d’ailleurs de distinguer Angoulême en lui accordant le label « Ville créative » dans la catégorie littérature pour sa place éminente dans le domaine de la BD.
Par-delà la ville, c’est tout un écosystème créatif qui s’est constitué autour de la bande dessinée sur les terres de Charente.
Bien d’autres collectivités s’emparent de la bande dessinée pour faire vivre la culture au cœur de leur territoire, en métropole et en Outre-mer, comme le montre la richesse de la programmation de BD 2020 qui se déploie de Chaumont à Cayenne, du pays voironnais à Marseille.
Pour enrichir notre patrimoine et le faire circuler partout en France, j’ai décidé de lancer une commande publique nationale d’estampes. Cette commande mettra en valeur le travail des artistes de la BD.
Leurs œuvres intègreront les collections du centre national des arts plastiques et pourront aussi être empruntées auprès des artothèques.
Notre amour pour la bande dessinée, nous devons également le porter haut à l’international.
Forte de l’ampleur et de la diversité de sa production, la France occupe une place privilégiée dans le marché mondial de la bande dessinée.
Cette attractivité est une grande fierté, mais ce n’est pas un aboutissement.
Comme nous le faisons pour nos autres industries créatives et culturelles, nous devons continuer à promouvoir ce secteur de l’édition, à valoriser le savoir-faire de nos auteurs et leur inestimable créativité.
En la plaçant au cœur de nos échanges culturels et économiques, la bande dessinée française doit demeurer une référence mondiale.
Le dynamisme de la BD française hors de nos frontières pourra naturellement s’appuyer sur la francophonie.
Créer en langue française, cette langue que nous partageons avec 300 millions de locuteurs à travers le monde, est aussi une chance dans une compétition internationale toujours plus intense.
Je sais pouvoir compter sur les actions menées par l’Institut français pour permettre aux œuvres de nos créateurs de rencontrer un public toujours plus large.
L’an prochain, l’Institut français proposera un « focus » spécial bande dessinée qui permettra la mise en œuvre de nombreuses et ambitieuses coopérations à l’international.
L’attachement des Français au 9e art a également vocation à s’incarner dans les partenariats et le mécénat des acteurs privés.
Je tiens d’ailleurs à saluer la création de la « Fondation Cité 9e art » par la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image. Sous l’égide de l’Institut de France, elle permettra de mobiliser des partenaires privés et des mécènes autour de projets qui bénéficieront à l’ensemble de la filière.
Je me réjouis de la création de ce nouvel outil fondé sur la participation d’acteurs privés aux côtés des institutions publiques, un modèle auquel je suis très attaché.
Je vous le disais, en mobilisant les énergies d’un grand nombre d’acteurs culturels, BD 2020 va favoriser une meilleure prise en compte de la bande dessinée dans les actions que nous menons pour favoriser l’accès de tous les Français à l’art et à la culture partout en France.
La bande dessinée est un formidable medium qui concourt à la découverte du plaisir de la lecture et la langue française, à l’acquisition de connaissances et à l’éducation artistique et culturelle.
N’oublions pas que l’album dessiné a, bien souvent, été la première de nos rencontres avec la lecture !
Vous le savez, l’un de nos objectifs prioritaires est que 100 % des enfants de 3 à 18 ans bénéficient d’actions d’éducation artistique et culturelle à l’école.
Dans cette perspective, je souhaite que la bande dessinée y trouve toute sa place.
Je salue l’implication du Ministère de l’Education nationale et de la jeunesse dans « BD 2020 » pour travailler ensemble dans cette direction.
Ainsi, nous permettrons que nos enfants se familiarisent avec le 9e art et aillent à la rencontre des créateurs, qui sont déjà nombreux à s’engager pour la transmission de leur art.
BD 2020 doit être aussi un espace de réflexion et d’action concernant la situation des auteurs de bande dessinée. Les difficultés auxquelles sont confrontés les auteurs de bande dessinée sont bien connues.
Elles nous interpellent tous.
Trop nombreux sont ceux qui souffrent au quotidien d’une précarité qui affecte leur travail de création.
Nous ne pouvons pas nous en satisfaire.
Au début de cette année, j’ai demandé à Bruno Racine de mener une mission d’analyse et de prospective autour des artistes auteurs, de leur place dans notre société.
Son travail est aujourd’hui achevé. Il me sera remis prochainement et nous permettra d’envisager des actions concrètes au service des auteurs et des créateurs.
Je veux faire de BD 2020 une chance pour entreprendre un certain nombre d’expérimentations au service des créateurs. Une occasion de conforter les éléments de connaissance dont nous avons besoin pour conduire notre action.
Le Ministère de la Culture financera donc la réalisation d’une étude qualitative approfondie dont le cahier des charges sera fixé avec les organisations syndicales d’auteurs. Cette étude prendra le relais de celle conduite en 2015 par ces mêmes organisations.
Nous disposerons ainsi collectivement d’une vision complète des conditions d’exercice des activités du secteur et des évolutions auxquelles sont confrontés les auteurs.
D’autre part, nous allons pleinement intégrer les auteurs de BD au dispositif d’allocations pour l’équipement d’ateliers mis en place par le ministère de la Culture.
En 2020, les auteurs de bande dessinée pourront se voir attribuer une aide à l’achat de matériel, à la hauteur de la réalité des besoins qui sont les leurs.
Nous souhaitons ainsi que les auteurs de BD profitent d’un financement directement utile à leur travail artistique.
Ce dispositif sera ensuite pérennisé dans la durée comme il l’est déjà pour les arts visuels.
BD 2020 doit également être un espace de réflexion autour de la politique culturelle des festivals de bande dessinée.
Comme vous le savez, je souhaite replacer les auteurs au cœur de nos politiques culturelles, affirmer leur capacité à être des relais concrets des mouvements qui traversent notre société.
BD 2020 doit donc être l’occasion de réfléchir avec l’ensemble des acteurs à un enrichissement de leurs propositions culturelles afin de permettre à tout auteur de bande dessinée invité à un festival d’être intégré à une activité collective en direction du public.
Certaines manifestations fonctionnent d’ores et déjà sur ce modèle et peuvent nous servir d’exemples. Je pense aux Rendez-vous de la bande dessinée à Amiens, à Lyon BD festival, à Quai des Bulles à Saint Malo ou encore à BD Boum à Blois.
Mobilisons l’énergie des créateurs du 9e art autour d’activités au contenu culturel plus exigeant.
Créons ensemble les conditions d’un lien, d’un échange, d’une interaction plus riche avec le public.
C’est cet effort collectif que je propose aux différents acteurs d’accomplir et que l’État est prêt à accompagner. Je mets mes services à votre disposition pour organiser cette réflexion et endosser le rôle de médiateur qu’ils ont souvent joué.
Afin d’engager cette réflexion, l’État via le CNL apportera en 2020, à titre exceptionnel et transitoire, une aide complémentaire aux festivals de bande dessinée qu’il soutient, pour permettre de rémunérer tous les auteurs lors de ces manifestations.
En contrepartie de ce financement, les festivals s’engageront à faire évoluer leur modèle pour intégrer à leurs programmation culturelle la très grande majorité des auteurs présents.
J’invite tous les acteurs de la filière de la bande dessinée à participer à cet effort pour construire un modèle pérenne, épanouissant pour les auteurs, et plus enrichissant pour les amoureux de la bande dessinée.
BD 2020 sera également l’occasion de donner une ampleur inédite à la valorisation de la bande dessinée au plus près de tous les Français.
L’année de la BD verra se déployer une programmation multiple et protéiforme.
Sa variété est une preuve de plus du dynamisme de la filière de la BD en France.
Elle tient aussi à l’implication remarquable de ses organisateurs, le Centre national du Livre et la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image.
Je tiens à saluer Vincent Monadé, Emmanuelle Bensimon-Weiler, Pierre Lungheretti, ainsi que toutes leurs équipes, qui seront fortement mobilisées tout au long de l’année 2020.
Je salue également les équipes de la Direction générale des médias et des industries culturelles, et en particulier Laurence Cassegrain.
Je remercie les partenaires qui les soutiennent et apportent une contribution indispensable à cette opération.
Je tiens également à saluer la participation des autres ministères : le ministère de l’Europe et des affaires étrangères (M. Le Drian), le ministère de la Justice (Mme Belloubet), le ministère des Armées (Mme Parly), le ministère de l’Education nationale et de la jeunesse (M. Blanquer), le ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (Mme Vidal).
A cette heure, la programmation de BD 2020 compte déjà plus de 350 événements. Elle va continuer à s’enrichir au cours des prochains mois.
Elle témoigne d’un véritable engouement des institutions culturelles, des collectivités territoriales, des acteurs associatifs…
Il m’est impossible de tous les citer, mais vous retrouverez un grand nombre d’entre eux dans le dossier de presse de BD 2020.
C’est bien toute la France qui sera investie par le 9e art : des expositions abritées par les musées (comme le musée des arts décoratifs, le musée Picasso à Paris ou le musée de la Résistance de Limoges) aux expositions itinérantes dans les gares, des conférences au Collège de France aux rencontres dans les bibliothèques ou les festivals…
Autant d’occasions données aux Français de se rassembler autour de la bande dessinée !
Après 2020, plus rien ne sera comme avant.
Je vous remercie à nouveau d’être venus si nombreux témoigner de votre mobilisation pour l’année de la bande dessinée qui s’apprête à débuter.