Madame la Préfète du Cher, chère Catherine Ferrier,
Mesdames et messieurs les Députés,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Monsieur le Maire,
Monsieur le Directeur, cher Olivier Atlan,
Mesdames et messieurs,
Chers amis,
La meilleure façon d’être fidèle à un héritage, parfois, c’est de le réinventer. Nous en partageons un : celui laissé par André Malraux. C’est l’héritage du ministère que j’occupe, qui fut taillé pour lui, et en premier lieu par lui. Ce sont les maisons de la Culture, emblèmes de la décentralisation culturelle qu’il accompagna. Celle de Bourges fut l’une des premières.
Cet héritage est à la fois une chance et une responsabilité. Une responsabilité car c’est à nous de le porter. A nous de décider ce que nous voulons en faire. Ce n’est pas un choix binaire : ce n’est pas à prendre ou à laisser.
Pour être fidèle à une philosophie, il faut savoir s’adapter, engranger les leçons du passé, tenir compte de nouvelles urgences, de nouveaux défis. Oser une forme de rupture dans la continuité. Au fond, il faut avoir le courage de la différence.
Du courage, parce que la différence dérange. Je le mesure chaque jour. Et il faut s’y accrocher. Il faut de la résistance, contre la tentation du retour à l’ordre établi. Le conservatisme est un refuge confortable en politique. C’est même le plus sûr des abris.
Mais les Français méritent mieux. Ils méritent qu’on se batte, encore, pour faire tomber les inégalités d’accès à la culture. Pour faire tomber les barrières qui privent certains des œuvres et des lieux accessibles à d’autres.
Je refuse la fatalité. Je refuse la résignation. Vous aussi : vous en donnez la preuve ici, en construisant cette nouvelle Maison de la Culture.
Vous prolongez le pari de Malraux. Le pari de « l’ordre de l’esprit », comme il le disait : c’est-à-dire le pari de la culture, et de l’engouement qu’elle rencontre à chaque fois que ses portes s’ouvrent.
Il avait aussi fait le pari des territoires, de leur vie culturelle et des volontés qui s’y trouvent : celles des élus, des professionnels, des entrepreneurs, des artistes, de tous les militants de la culture que compte notre pays. Et quand je regarde l’assemblée que vous formez, je me dis que là non plus, il ne s’était pas trompé.
Ce double pari, vous le prolongez depuis 1964. Et vous avez trouvé le moyen de le prolonger quand la Maison historique a fermé ses portes.
Vous avez su réinventer l’héritage. Faire différemment. Vous avez eu le courage de la différence, dans la méthode et dans l’action, pour servir une ambition inchangée.
Je veux rendre hommage au travail initié par Pierre-François Roussillon, et prolongé par Olivier Atlan. Cher Olivier, voilà sept ans que grâce à vous, la Maison de la Culture existe « hors les murs ».
Voilà sept ans que vous sillonnez la région pour y faire circuler des artistes, des créations, des spectacles. Vous investissez tous les lieux possibles : ici une école, là une salle des fêtes, là un ancien hôpital…
Et je suis convaincue que vous ne perdrez jamais l’état d’esprit que vous aurez nourri pendant plus d’une décennie : celui de l’itinérance, du voyage culturel, de l’animation des territoires, du contact avec les habitants… Je sais que c’est votre préoccupation constante, cher Olivier.
La Maison de la Culture va retrouver ses murs : ceux dont nous posons aujourd’hui la première pierre. Mais là encore, vous promettez de réinventer l’héritage, avec une maison de la Culture « nouvelle génération » : un véritable lieu de vie, ouvert chaque jour de la semaine, avec des salles de représentations, mais aussi de répétition, un restaurant, un grand hall d’accueil. Ce sera une maison pour les artistes, autant que pour les citoyens, professionnels, étudiants, écoliers.
Une maison pour tous les Berruyers, tous les Français.
Je vous souhaite d’en faire une Maison aussi ouverte qu’elle l’est aujourd’hui, sans ses murs.
Poursuivez les rencontres sur le territoire. Ne vous laissez jamais enfermer.
Ni par la facilité. Ni par l’ordre établi. Avoir le courage de la différence : c’est aussi la ligne que je me donne.
C’est l’esprit des mesures que j’ai présentées le mois dernier, pour la circulation des œuvres et des artistes sur les routes de France : le plan pour la « Culture près de chez vous ».
Ce n’est ni une négation de ce qui est fait par les acteurs en régions, ni une grande croisade depuis Paris – comme j’ai pu l’entendre parfois. C’est précisément le contraire. Il n’y a pas d’opposition à créer, de peur à nourrir.
L’objectif, c’est de s’appuyer sur les ressources culturelles dont notre territoire regorge mais qui restent inaccessibles à beaucoup de Français.
S’appuyer sur ce qui a été accompli pendant soixante ans, sur le maillage institutionnel – l’une des chances de l’héritage que j’évoquais –, et rendre cette culture accessible « autrement » : exactement comme vous le faites ici.
Mettre la culture à la portée de ceux qui restent à ses portes aujourd’hui, ou qui vivent trop loin.
Je veux prolonger l’ambition de la décentralisation culturelle, mais par un nouveau chemin. Ouvrir une nouvelle page :
Nous allons soutenir les projets d’itinérance. Soutenir les troupes qui sillonnent les territoires dans lesquels sont ancrées ces institutions, nos labels, notamment : vous le faites ici de façon exemplaire.
Nous allons soutenir aussi les tournées de nos grandes institutions nationales hors de Paris : pour que les habitants de cette région aient accès aux productions des artistes qui sont installés ici, mais aussi de la Comédie Française ou de l’Opéra Garnier. Tout simplement parce que c’est du service public culturel, et que le service public, dans notre pays, puisqu’il est financé par tous, a vocation à être universel ;
Nous allons faire voyager les chefs d’œuvre iconiques de nos grands musées, pour les mêmes raisons : j’ai nommé deux commissaires d’exposition qui livreront fin mai une première liste des œuvres qui peuvent se déplacer.
Et nous allons développer les musées numériques, pour celles qui ne peuvent pas voyager ;
J’ai annoncé que l’Etat soutiendrait la création de 200 « micro-folies », le musée numérique que l’on trouve aujourd’hui à La Villette à Paris, ouvert à tous, et qui rencontre un très grand succès.
Olivier Atlan a immédiatement proposé d’accueillir une Micro-Folie – Maison de la culture ici à Bourges, dans le quartier de la Chancellerie: je veux le saluer pour son enthousiasme et son volontarisme. Je m’en réjouis.
Mesdames et messieurs,
En posant cette pierre, nous ne répétons pas l’Histoire, nous en tirons le fil.
Je veux remercier toutes celles et ceux qui ont contribué à ce projet, et qui vont l’accompagner dans les mois à venir.
Vous prolongez l’héritage qui vous a été confié. Mais vous le faites en y imprimant votre empreinte, en vous risquant parfois à sortir des sillons tout tracés.
Pour cette audace, je veux vous remercier.
Pour l’énergie déployée à Bourges et au-delà, sur le territoire, pour l’accès à la culture, je veux vous remercier.
Vous trouverez toujours, dans ce combat, mon ministère à vos côtés.