Les objectifs et les moyens sont des mots qui appartiennent autant au
discours consacré à l’art de la guerre qu’à celui du bon gouvernement. On
oscille entre Clausewitz et Machiavel, entre Sun Zu et Pierre de l’Etoile.
Ars belli, ars governandi ! Je me contenterai de tenir le rôle de ministre de
la Culture et de la Communication et de tirer parti de cette signature pour
tracer les grandes lignes de notre politique en matière d’audiovisuel public.
Nous sommes en effet réunis aujourd'hui afin de procéder à la signature de
deux contrats d'objectifs et de moyens (COM) décisifs pour le secteur
audiovisuel public : ceux de Radio France et de l'Institut national de
l'audiovisuel, qui couvriront tous deux la période 2010-2014.
La signature de tels contrats n'est pas inédite puisque nous nous
apprêtons à signer le deuxième COM de Radio France et le troisième pour
l'INA. L'INA avait d'ailleurs joué le rôle de précurseur, puisque le premier
COM de l'Institut a été signé le 27 avril 2000 très exactement, avant même
la loi du 1er août 2000 prévoyant la conclusion de tels contrats entre les
organismes audiovisuels publics et l'Etat. Ce tout premier COM marquait
un recentrage de l’activité de l’INA autour de ses missions fondamentales
de conservation et de valorisation des archives. Plusieurs projets ambitieux
avaient alors été lancés au premier rang desquels figuraient le plan de
sauvegarde et de numérisation et la recherche d’une meilleure accessibilité
des archives exploitées, réussites qui se poursuivent encore aujourd'hui.
Je tiens à souligner combien, depuis le début des années 2000,
l'élaboration de ces documents contractuels, représente un progrès
manifeste. Elle offre en effet une visibilité pluriannuelle de la stratégie de
l'organisme, de sa gestion, et de son financement, au bénéfice à la fois de
l'organisme et de l'État.
Ces contrats sont le fruit d'un profond travail de concertation, et je tiens à
saluer la qualité du dialogue mené entre les administrations concernées et
Radio France d'une part, et l'INA d'autre part. Les projets élaborés ont
ensuite, conformément à la loi, été transmis aux commissions
parlementaires, qui pouvaient formuler un avis, ainsi qu'au Conseil
supérieur de l'audiovisuel. Je tiens d’ailleurs à relever qu’un certain nombre
de recommandations de la Commission de la culture, de l'éducation et de
la communication du Sénat ont été suivies. Depuis lors, les conseils
d'administration des deux organismes ont approuvé ces COM, ce dont
nous ne pouvons que nous réjouir.
Venons-en maintenant au fond. Les deux COM que nous nous apprêtons à
signer sont le reflet de stratégies ambitieuses à l'ère du numérique. Je
laisserai aux présidents de Radio France et de l'INA l'honneur de les
détailler, mais je tiens à en souligner les aspects essentiels.
1. Pour Radio France, premier groupe radiophonique français, le COM
2010-2014 est le reflet de la stratégie mise en oeuvre dans l'univers
médiatique et technologique d'aujourd'hui : une stratégie qui donne la
priorité à des contenus d'une grande qualité, mission première du service
public qui les décline sur ses 7 antennes : France Inter, France Info,
France Culture, France Musique, France Bleu, Le Mouv' et FIP.
Ces contenus doivent être disponibles partout et sur tous les supports. En
diffusion hertzienne tout d’abord : c'est le sens du développement du
réseau local France Bleu, pour lequel le Gouvernement vient d’user de
son droit de préemption d'une fréquence à Toulouse, qui permettra de
développer ce service public de proximité en Midi-Pyrénées, région la plus
vaste de France, dont il était pour l'heure absent. C'est également
pourquoi le COM prévoit que Radio France participera au déploiement de
la radio numérique terrestre dans le cadre qui sera fixé par les pouvoirs
publics et qui fait l'objet d'une mission confiée par le Premier ministre à M.
David KESSLER. Mais ces contenus doivent aussi être diffusés sur
l'ensemble des supports numériques, qui permettent aux citoyens d'y
accéder en tout lieu et en tout temps, et donc de mettre en oeuvre
l'ambition de la « culture pour chacun » qui me tient, comme vous le
savez, particulièrement à coeur. Les écoutes différées qui sont un grand
succès pour Radio France et le partage citoyen de l'information que
permet le réseau internet sont au coeur de cette ambition qui veut
atteindre les publics dans leur diversité, leurs attentes et leurs exigences
propres. Signe de la réussite de cette politique, nous ne pouvons que
nous féliciter du fait que France Inter ait enregistré le plus grande nombre
de téléchargements en matière de radio de rattrapage, en juin, avec près
de 4,3 millions de téléchargements, devant ses consoeurs privées. Audelà
de ses bons résultats, j’ai la profonde conviction que les médias
audiovisuels, et en particulier le service public incarné par Radio France et
par l’INA, du fait de leur capacité de diffusion exceptionnelle, constituent
dans la plupart des foyers le premier moyen d'accès à la culture et à la
connaissance. Radio France et l’INA sont par excellence les vecteurs
d’une culture qui sait allier popularité et qualité, différence et exigence.
Les COM que nous signons aujourd’hui doivent contribuer encore plus
fortement à la diffusion et à la promotion de cette ambition.
Réunir un public large et représentatif de la diversité française autour
d'une offre riche en culture, en débat et en création est un objectif phare
du contrat de Radio France. Cet objectif vaut d'ailleurs également pour les
excellentes formations musicales de Radio France, qui disposeront à
compter de 2013 d'un auditorium dans l'enceinte de la Maison de la
Radio.
Pour répondre à cette ambition, l'ensemble des ressources humaines et
techniques de Radio France seront mobilisées. La réhabilitation de la
Maison de Radio France fait également pleinement partie du projet : une
part de la ressource publique lui sera spécifiquement consacrée, avec un
financement qui est prévu, au-delà du terme du COM, jusqu'en 2016.
L'Etat assume sa responsabilité de financeur, en donnant les moyens à
Radio France d'accomplir ce grand chantier, sans réduire les moyens
consacrés à ses missions. Je suis en effet persuadé que la qualité de la
programmation est inséparable d’un outil de production et de création aux
exigences techniques et artistiques élevées.
2. Concernant l'INA, j'ai tout à l'heure évoqué brièvement les orientations
de l'organisme : depuis sa création, et de manière renforcée depuis son
premier COM, l'INA s'est en effet dédié à la mémoire audiovisuelle. Je
tiens à souligner que l’attachement de l’Etat à cet organisme et à ses
missions n’a jamais failli. Dans la société de l’image, il n’est de futur sans
passé, il n’est de création sans mémoire : face au culte de l’immédiateté
et à l’hypertrophie du présent, les missions de l’audiovisuel public
consistent précisément à donner de la profondeur et du recul pour mieux
appréhender les enjeux du monde contemporain.
Ainsi, dans la lignée de ses missions fondamentales, le troisième COM de
l'INA met l'accent sur la poursuite du plan de sauvegarde et de
numérisation des archives, sur le développement du dépôt légal et sur des
projets d'envergure en matière d'enseignement et de recherche : cette
activité, prévue par le cahier des missions et des charges de l’Institut,
s’est développée ces dernières années, notamment par l’habilitation,
depuis 2007, à dispenser des enseignements et diplômes d’enseignement
supérieur. Dans la compétition internationale pour la « société de la
connaissance », cette mission de l’INA dans le domaine de l’expertise et
de l’éducation à l’image est tout à fondamentale.
Le développement et le partage de la richesse audiovisuelle de l'Institut,
tant par la formation qu'il dispense que par la mise en ligne d'archives
pour le grand public, sont donc au coeur du présent contrat, et ont même
été accru à l’invitation du Parlement.
Le soutien apporté par l'Etat à ces ambitions est manifeste Grâce au
développement de ses recettes commerciales mais aussi à des charges
maîtrisées au regard d'objectifs ambitieux, l'Institut aura les moyens de
continuer à être un acteur de premier plan de l'ère numérique.
Pour conclure, ces COM offrent à Radio France, à l'INA et à l'Etat une
perspective stratégique jusqu'en 2014. Celle-ci est garantie par des
ressources, élément clé de l'indépendance nécessaire de nos grands
acteurs de l'audiovisuel public. Je me réjouis particulièrement de leur
signature qui traduit une ambition, un projet mais aussi une vision
partagée pour deux grands opérateurs de l’audiovisuel public.
Je vous remercie.
Discours
Discours de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé à l’occasion de la signature des Contrats d'objectifs et de moyens 2010-2014 de Radio France et de l'Institut national de l'audiovisuel (INA)
Messieurs les présidents, cher Jean-Luc Hess, cher Mathieu Gallet,Mesdames et messieurs,
Partager la page