C’est un anniversaire empreint de fierté et d’ambition que la Ville du Havre célèbre aujourd’hui : les 20 ans de son inscription sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, en présence d’Édouard Philippe, maire du Havre, de Jean-Benoît Albertini, préfet de la région Normandie, et de Jean-Michel Knop, directeur régional des affaires culturelles de Normandie. L’occasion de saluer un parcours exemplaire, celui d’une ville qui, après les blessures de la guerre, a su se réinventer avec audace, sous la houlette d’Auguste Perret, en offrant au monde un chef-d’œuvre d’urbanisme moderne, fondé sur la lumière, la régularité, la clarté et la force du béton armé.
Pour cet anniversaire, un concert exceptionnel s’est tenu en l’église Saint-Joseph, joyau emblématique du Havre reconstruit, Ce moment musical, à la hauteur du site classé, a réuni deux pianistes, trois violonistes, un altiste, un violoncelliste et une chanteuse autour d’un programme en trois mouvements : la lumière, avec des œuvres de Mozart ou Schubert, la méditation, portée par les compositions sensibles de Ludovico Einaudi, Ástor Piazzolla ou Giulio Caccini, et enfin 1957, clin d’œil à l’année d’achèvement de l’église, évoquée à travers les musiques de Nat King Cole ou de Vladimir Cosma. Un hommage sensible et élégant à l’esprit du lieu, à son histoire et à son architecture lumineuse.
Une œuvre urbaine collective et exemplaire
Si Auguste Perret en fut le chef d’orchestre, la reconstruction du Havre est avant tout une œuvre collective, cohérente et visionnaire, aujourd’hui reconnue comme un modèle unique d’urbanisme du XXe siècle. Inscrite en 2005 sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, la ville témoigne d’une capacité exceptionnelle à allier innovation architecturale, ambition sociale et esthétique moderniste. Autour de Perret, c’est une équipe d’architectes talentueux – parmi lesquels Jacques Poirrier, Gérard Thurnauer, André Hermant ou encore Raymond Audigier – qui a œuvré à la réinvention du Havre, suivant un plan d’ensemble rigoureux mais évolutif, dans un dialogue constant entre structure, lumière et cadre de vie. L’usage magistral du béton armé, non pas brut mais travaillé avec une grande finesse, permet d’imaginer une ville lumineuse, ouverte, rationnelle mais jamais froide.
Parmi les réalisations emblématiques, l’on admire l’église Saint-Joseph, chef-d’œuvre spirituel et technique dont la tour-lanterne veille sur la ville, mais aussi la place de l’Hôtel de Ville, la porte océane, les logements modulaires, les écoles, commerces et équipements publics, tous pensés pour répondre aux besoins de la vie quotidienne, dans un ensemble d’une rare unité stylistique. Le Volcan, signé Oscar Niemeyer dans les années 1980, vient enrichir ce patrimoine d’une dimension contemporaine forte, dialoguant avec l’héritage de la reconstruction dans un esprit de continuité culturelle.
Le Havre incarne ainsi un urbanisme humaniste, qui place l’habitant au cœur de la réflexion, et où la fonctionnalité rejoint la beauté. C’est cette vision ambitieuse et généreuse que l’UNESCO a saluée : une ville résolument tournée vers l’avenir, sans jamais renier son histoire.
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Une reconnaissance internationale pleinement assumée
Depuis son inscription en 2005, « Le Havre, la ville reconstruite par Auguste Perret » incarne une modernité patrimoniale assumée. L’ensemble urbain reconstruit, cohérent et unique au monde, est aujourd’hui l’objet d’un soin attentif et partagé entre les acteurs locaux, régionaux, nationaux et internationaux. Cet anniversaire est aussi un moment pour renforcer l'engagement de tous autour de la préservation de la valeur universelle exceptionnelle (VUE) du site. Car un bien inscrit à l’UNESCO est vivant : il évolue, se transforme, et sa gestion s’inscrit dans un processus permanent de dialogue, d’adaptation et de prospective.
Une gouvernance renforcée et des outils en place
Dans cette dynamique, la gouvernance du bien a fait l’objet d’évolutions structurantes, portées par la volonté partagée de la Ville et de l’État. Le plan de gestion élaboré en 2018 prévoyait un cadre clair : coordination générale entre l’État et la Ville, pilotage par un comité de gestion du bien, et mise en œuvre d’un comité scientifique. Ces dispositifs sont désormais en voie de pleine activation :
- La commission locale du Site Patrimonial Remarquable (SPR) assurera le rôle de comité de gestion du bien. Sa réunion prochaine à la rentrée de septembre constitue une étape importante dans le renforcement de la concertation et du pilotage local du site.
- Le comité scientifique, réuni pour la première fois le 6 juin 2025, vient compléter ce dispositif. Il doit jouer un rôle central : veille scientifique, soutien à la recherche, conseil sur les enjeux de conservation, valorisation des connaissances… autant de missions essentielles pour garantir la pérennité du bien dans le respect de ses qualités historiques et architecturales.
Des ajustements concertés au service d’un développement harmonieux
L’inscription à l’UNESCO n’interdit pas l’évolution de la ville : elle l’encadre. Et c’est dans cet équilibre entre patrimoine et projet, entre héritage et innovation, que se situe le dialogue constant entre les services de la Ville, l’État, la DRAC de Normandie et les instances internationales. Certains ajustements peuvent être nécessaires, notamment pour garantir l’adéquation des documents d’urbanisme avec les recommandations formulées par le Centre du patrimoine mondial. Ainsi, les réflexions sur les hauteurs maximales dans la zone tampon, ou la prise en compte du cadre plus large du bien, s’inscrivent dans une logique constructive, visant à consolider la reconnaissance internationale du Havre tout en accompagnant son développement. Le rôle des services de la DRAC de Normandie, dans ce cadre, est essentiel : par leur expertise, leur capacité d’écoute et leur dialogue constant avec les collectivités, ils constituent un pivot de la bonne entente entre la Ville, l’État et l’UNESCO.
Un regard tourné vers l’avenir
Le Havre aborde cette troisième décennie d’inscription au patrimoine mondial avec sérénité, responsabilité et ambition. L’élaboration du rapport actualisé sur l’état de conservation du bien, attendu par le Centre du patrimoine mondial d’ici décembre 2025, s’inscrira dans cette dynamique proactive, appuyée par une gouvernance clarifiée et des outils de gestion opérationnels.
Aujourd’hui, Le Havre célèbre non seulement le 20e anniversaire de son classement à l’UNESCO, mais un modèle de résilience et de modernité, une fierté partagée entre patrimoine et avenir. L’inscription à l’UNESCO est un honneur, mais surtout une responsabilité, que la Ville assume avec constance, accompagnée par ses partenaires, au premier rang desquels l’État et la DRAC. Le Havre prouve qu’il est possible de conjuguer mémoire et mouvement, racines et renouveau, dans une cohérence fidèle à l’esprit d’Auguste Perret. À l’heure où la ville se projette vers l’avenir, cet anniversaire confirme sa place parmi les grands témoins urbains du XXe siècle, et sa capacité à faire rayonner son patrimoine au cœur des transformations contemporaines.
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