Un chariot de transport et de rangement pour les kayakistes paralympiques, des maillots adaptés à la motricité des parasportifs du football fauteuil, des modules d’entrainement à la boxe pour les personnes âgées, de nouveaux blasons pour les archers, etc., sont autant de projets coconçus entre les designers du programme Handesign et les pratiquants sportifs de six structures éducatives, sportives ou médico-sociales en Île-de-France. Après six mois de partage, d'observation et d'ateliers participatifs entre les designers et les pratiquants/les publics , les six projets sont présentés lors d’une exposition du 12 au 22 septembre 2024 au JAD – Jardin des métiers d’Art et du Design, nouveau lieu culturel du Département des Hauts-de-Seine dédié au dialogue entre métiers d’art et du design, à l’innovation et à la transmission.
Quelques jours après la clôture des "Jeux Paralympiques les plus spectaculaires de l'histoire" (sic Andrew Parsons, le président du Comité international paralympique), cette sortie de résidence est organisée par la DRAC Île-de-France et le JAD, en partenariat avec le Département des Hauts-de-Seine qui a fait de l’inclusion et de l’accessibilité l’une de ses priorités dans l’ensemble de ses champs de compétences, et s’inscrit dans le cadre de la Paris Design Week et des Journées européennes du patrimoine 2024, soulignant ainsi l’importance de l’innovation contemporaine et des synergies entre design, sport, patrimoine et inclusion, véritable héritage durable et concret des Jeux de Paris 2024.
Le programme Handesign, réalisé en partenariat avec le Comité paralympique et sportif français (CPSF) et en lien avec l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France, montre l’investissement actif de l’État dans cette dynamique en promouvant les valeurs partagées par l’art et le sport : inclusion, diversité et universalisme.
L’ouverture de cette exposition a été marquée par une journée de restitution et de réflexion pour un avenir plus inclusif et durable en présence des équipes de designers, des représentants des lieux de résidences, des partenaires du programme avec la présence de Marie-Amélie Le Fur, présidente du CPSF, et des représentants institutionnels du territoire.
Un programme innovant de résidences en design sur le thème du parasport
S’appuyant sur la dynamique suscitée par l’organisation des Jeux Paralympiques de Paris 2024, la DRAC s’est engagée à soutenir des initiatives culturelles et sportives en intégrant la participation d’artistes, de sportifs et de publics en situation de handicap, contribuant ainsi à l’Olympiade Culturelle de Paris 2024.
Pour répondre à ces enjeux et poursuivre le développement de sa politique culturelle en direction des personnes handicapées, la DRAC a ainsi souhaité créer un programme innovant de résidence-missions de designers auprès de personnes en situation de handicap avec pour thématique, en 2024, la création et la pratique du sport pour les sportifs amateurs et professionnels.
Les objectifs principaux de ce programme étaient, au-delà de concevoir ou d’améliorer des objets ou des équipements parasportifs (matériels ou lieux) :
- d’encourager la participation active des personnes en situation de handicap dans le processus de conception,
- de développer des synergies innovantes,
- de promouvoir le design en sensibilisant le public.
De mars à septembre, les designers ont été en totale immersion dans les clubs sportifs, collaborant étroitement avec les membres et les pratiquants de ces structures. Les fruits de cette collaboration se sont matérialisés sous forme de prototypes d’équipement sportifs, conçus pour améliorer les performances, l’accessibilité et le confort de ces publics.
Des projets réalisés à l’occasion de l’Olympiade Culturelle avec Clémentine Bonneau et Lucie Gigan (Collectif Fair Play), Clarisse Coureau et Jeanne Mollier, Sophie Cure, Laureline De Leeuw, Célia Guye et Eva Hardy (Studio Stimuli), Suzelle Hamman, Léo Dumont-Deslaurier et Lucie Dumont-Deslaurier.
Découvrir les résidences
6 projets promouvant les valeurs partagées par l’art et le sport : inclusion, diversité et universalisme
Un panier haut, un panier bas, répartition des rôles (de 1 à 5) et voilà que les joueurs et les joueuses valides et les personnes porteuses d’un handicap s’affrontent au Baskin pendant quatre quarts-temps de 8 minutes sur le même terrain.
Dans le cadre de sa résidence-mission Handesign, le collectif Fair Play en collaboration avec les sportifs de l’association Novosports a imaginé un ensemble d’équipements sportifs pour faciliter la pratique du Baskin. La co-création avec les joueurs et joueuses a eu lieu lors des entraînements du vendredi soir. Les participants ont pu tester les différents prototypes en jouant et en donnant leur avis grâce à un outil ludique de prise de notes.
Clémentine Bonneau et Lucie Gigan ont travaillé avec les sportifs lors d’ateliers participatifs afin que les chasubles conviennent aux motricités de chaque personne et s’adaptent aux diversités morphologiques. En suivant l’objectif d’inclusion de ce sport, de nouveaux marquages au sol et des drapeaux de visualisation des différents camps ont été imaginés pour mieux cerner les lignes du terrain et faciliter le repérage dans l’espace. Enfin, une boîte de médiation a été pensée afin d’expliquer les règles et stratégies à adopter. Les dispositifs mis en place lors de la résidence-mission sont destinés à perdurer dans le club Novosports et s’intégreront dans les équipements du Baskin.
À propos
Lucie Gigan et Clémentine Bonneau lient design et sport pour s’ancrer au cœur de thématiques contemporaines engagées, que ce soit au niveau environnemental ou social. Leurs projets, souvent colorés et ludiques, partagent un nouveau regard sur les instances sportives et la manière de fonctionner entre individus.
L’association Novosports a été créée par Jérôme Rousseau en 2020 pour promouvoir le sport inclusif (Baskin, sport né en Italie qui prend pour base la pratique du basketball pour l’adapter à une pratique inclusive et volley inclusif). Novosports fait jouer sur un même terrain des personnes valides avec celles qui portent un handicap en imaginant de nouvelles règles adaptées à toutes et tous.
Ont collaboré au projet : Association Novosports, Nanterre (Hauts-de-Seine) : Jérôme Rousseau, Océane Szymanski, Yann Doyelle et Paul Quesada ainsi que les participants des entraînements (femmes, hommes de tous âges confondus).
Blanc, noir, bleu, rouge, et enfin, le jaune : c’est d’abord sur l’objet du blason anglais (cinq cercles concentriques contrastés) que se sont focalisées la recherche et la production. Chaque semaine, avec le soutien et le regard sportif du coach Teddy Louison, au club parisien des Archers des Trois Lys, de nouvelles compositions ont été soumises aux flèches des sportifs, pour évoluer au fil des séances en fonction de leurs singularités.
L’expérimentation de ces nouveaux blasons a permis de questionner la manière d’envisager la visée et de partager ensemble, sans distinction, une pratique. Entre rigueur et hasard, elle amène les archers à considérer l’influence du visuel sur le geste.
En bousculant les codes traditionnels de l’archerie, la résidence vient conforter le sentiment de réussite en laissant le choix d’adapter ses objectifs, de proposer ses propres règles du jeu, en fonction du niveau et de la condition de chacun.
C’est cette volonté d’inclusivité qui conduit ce travail de design, artistique et sportif. Aujourd’hui en développement, Dans le jaune veut dépasser le champ du dessin pour envisager des blasons sonores afin d’élargir la pratique du tir à l’arc à un champ plus large de handicaps sensoriels.
À propos
Diplômée de l’École Supérieure des Beaux-arts d’Angers, Laureline DE LEEUW explore des territoires, comme à la Réunion, au Maroc, au Sénégal, en banlieue parisienne ou en région ligérienne, pour questionner les liens entre matériaux et savoir-faire.
Le club des Archers des Trois Lys, à Paris, mène une politique active de transmission et de partage du tir à l’arc en Île-de-France ; des jeunes espoirs à l’élite, des femmes, des personnes handicapées, et dans les différentes disciplines.
Ont collaborés au projet : le Club des archers des Trois Lys, Paris (Paris) : Teddy Louison, François Rodarie et Cécile Bolesse. Arthur, Brice, Magalie, Maylis et Morgane. Les adhérents : les « première année » et le groupe inclusif.
Dans la salle d’entraînement du club Upsilon, à Châtenay-Malabry, le match se prépare. L’entraîneur et l’équipe technique installent et sanglent les joueurs sur leurs fauteuils de compétition. De sacrés bolides : 4 roues, 2 moteurs et une manette thermoformée qui réagit au quart de tour.
La résidence-mission a commencé en pleine saison de compétition pour le club Upsilon (avril-juin), laissant peu de temps de cocréation entre la designer et les joueurs. Le projet présenté ici est encore en cours de développement, le calendrier de travail ayant dû être adapté à la réalité du terrain.
Le travail s’est orienté, après une phase d’immersion en pleine compétition, vers la co-conception de plusieurs équipements visant à améliorer le balisage du terrain et les maillots des joueurs. Les designeuses et les joueurs améliorent le système de marquage des buts pour augmenter la visibilité de la ligne imaginaire à 50 cm de hauteur, sous laquelle doit passer le ballon. Ils réfléchissent aussi à la forme et au graphisme de maillots amovibles qui peuvent facilement s’accrocher par-dessus la sangle, être mis et enlevés rapidement. Le travail de patronage et de prototypage est en cours.
Sophie Cure travaillera en septembre avec les joueurs sur le graphisme des maillots à partir d’un jeu de cartes mêlant mots, couleurs et formes abstraites.
À propos
Diplômée de l’ENSAAMA - Olivier de Serres, elle Sophie Cure développe depuis 2012 une pratique du design graphique transdisciplinaire dans laquelle elle explore notamment la question de la médiation et de la transmission par le jeu et le faire. Pour ce projet, elle est assistée par Shehrazad Aranjo, pour la conception vêtement, et par Margaux Châtaignier, graphiste.
Les joueurs de Foot-fauteuil Upsilon impliqués dans la résidence à Châtenay-Malabry évoluent en première division, troisième division et division nationale des championnats de France de Foot-fauteuil.
Ont collaboré au projet : Upsilon, Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine) : Habd-Eddine Sebiane, Noël Zeren et les équipes de division 1 et 2 de l’association Upsilon.
Le duo de designers Eva Hardy et Célia Guye s’est intéressé à la pratique du paracanoë, et plus particulièrement aux besoins de l’équipe de France qui se présente aux Jeux Paralympiques 2024. Avec la collaboration des coachs, des conseillers techniques et des athlètes, les deux designers ont mené des ateliers de cocréation afin d’imaginer un dispositif qui puisse rendre les athlètes plus autonomes dans la pratique de cette discipline.
Studio Stimuli a rencontré les différents acteurs du paracanoë et a établi un état des lieux de la pratique des sports de pagaie par les personnes en situation de handicap.
Les problématiques les plus souvent évoquées sont l’autonomie et la sécurité de l’athlète. En effet, le trajet entre le lieu de stockage des bateaux et le ponton peut être éprouvant, causant une fatigue avant même d’embarquer : un athlète en situation de handicap fait face à des difficultés particulières (marche douloureuse due au port d’une prothèse, déséquilibre, mouvements plus lents, trajet allongé pour les utilisateurs des rampes PMR, etc.). Les kayaks et les pirogues sont, quant à elles, des embarcations imposantes (entre 5 et 7 mètres de long et 13 à 16 kilogrammes). Ne pouvant transporter leurs équipements eux-mêmes, certains athlètes dépendent de l’aide de leur coach ou de leur entourage.
Forts de ces observations, le Studio Stimuli et les sportifs ont inventé un dispositif qui facilite le transport et la sécurité des équipements sportifs. Ce dispositif se présente sous la forme d’un chariot permettant d’accueillir le bateau (kayak ou pirogue), ainsi que la panoplie complète du sportif grâce à différents systèmes de sacs et de fixations.
À propos
Eva Hardy et Célia Guye, deux designers du Studio Stimuli, sont engagées dans le care design. Elles mènent divers projets de création d’objets du quotidien et d’installations artistiques et culturelles prenant place dans les établissements médico-sociaux.
La Fédération Française de Canoë-Kayak et sports de pagaie (FFCK) est une fédération sportive chargée, par la délégation du ministère des Sports, du développement du canoë, du kayak et des sports de pagaie, en loisir et en compétition en France.
Ont collaboré au projet : FFCK, Vaires-sur-Marne (Seine-et-Marne) : Papia Prigent - directrice Pôle France Olympique et Paralympique canoë kayak de Vaires-sur-Marne/INSEP, Benjamin Louche - conseiller technique national et Politiques publiques des sports de pagaie, Éric Le Leuch, directeur de la performance adjoint - paracanoë FFCK, Maïwenn Le Floc’h - cheffe de projet national handikayak FFCK, Jean-Pascal Crochet - conseiller technique national FFCK, Jean-Christophe Gonneaud - conseiller technique régional / chargé de mission handikayak à la FFCK, Les athlètes de l’équipe de France paracanoë : Nélia Barbosa, Eléa Charvet, Abel Aber, Eddie Potdevin, et les athlètes de paracanoë : Céline Brûlais, Thierry Bazin, Mehdi Deghmache
La résidence-mission des designers a commencé par un temps d’immersion long, qui a permis à l’équipe de comprendre l’écosystème de l’établissement, son fonctionnement, et ses spécificités. Plus de vingt sports différents sont proposés à l’EREA Toulouse-Lautrec, allant de la natation à l’Ultimate en passant par le tennis de table. Afin de permettre aux élèves une pratique sportive la plus autonome possible, certaines règles ont été repensées et certains équipements supplémentaires (industriels ou bricolés) sont proposés, en fonction des besoins de chaque élève.
Dès le début de la résidence, le projet a été mené en collaboration avec les élèves et leurs encadrants. Plusieurs ateliers d’idéation avec les professeurs et une quarantaine d’interviews d’élèves ont permis aux designers de préciser leurs observations et de comprendre les contraintes et motivations des différents publics touchés par le projet.
On retiendra entre autres la volonté des élèves d’accéder à un plus grand nombre de sports et à un jeu dynamique et stratégique, mais aussi les difficultés des professeurs à se procurer des équipements sportifs personnalisés, peu onéreux et à les mettre en place à chaque séance.
À partir de ces constats, Lucie, Suzelle et Léo ont choisi de concevoir un système permettant de diversifier et de dynamiser la pratique sportive des élèves en fauteuil électrique. Ces élèves ont besoin d’équipements qui peuvent s’adapter à leurs fauteuils personnels pour pratiquer certains sports. Le système est composé de semi-produits qui peuvent être facilement assemblés par les encadrants pour créer des équipements manquants et se fixent rapidement sur n’importe quel fauteuil.
Accompagnés des designers, une centaine d’élèves ont donc imaginé, prototypé et testé une trentaine d’équipements, afin d’explorer les potentiels du système imaginé. Quatre de ces applications ont finalement été développées, comme une première gamme à augmenter.
À propos
Léo Dumont-Deslaurier et Suzelle Hamman sont designers diplômés de l’ENSCI-Les Ateliers. Pour ce projet les deux designers s’associent à Lucie Dumont-Deslaurier, qui leur apporte son regard de psychomotricienne et d’éducatrice sportive.
L’Établissement régional d’enseignement adapté (EREA) Toulouse-Lautrec, situé à Vaucresson (Hauts-de-Seine), accueille plus de 250 élèves de la primaire au BTS. L’établissement se démarque par la présence d’un centre de soin en son sein et par la mixité d’élèves porteurs de handicaps et d’élèves dits valides.
Ont collaborés : L’EREA-Toulouse Lautrec : les encadrants d’éducation physique et sportive (EPS) : Lisa Brouard, Charlotte Duthu, Maelys Germain, Quentin Moriaux, Jean-Luc Morin, Vincent Schifano, Magali Theraud. L’ensemble des élèves de 6e, 5e, 2de et 1re de l’année 2023-2024.
Avec le soutien de Jean-François Gesbert, proviseur de l’établissement et des différents acteurs de la vie scolaire de l’établissement.
Les séances de boxe, très attendues par les résidents, leur offrent l’opportunité de se défouler. Leurs gestes, contrairement à ceux des sportifs aguerris, sont souvent aléatoires, non contrôlés et brusques.
Afin d’améliorer leur précision, un module ludique a été conçu par les designers et les résidents, comprenant plusieurs activités pour éviter la monotonie des séances. Le module aide à travailler les fonctions cognitives et physiques des résidents en leur faisant pratiquer l’enchaînement des coups, améliorer leur rythme et leur proprioception.
De plus, pour encourager les résidents à pratiquer régulièrement et à rester actifs, un livret de suivi leur est fourni. Ce livret contient des informations sur la boxe, leur progression et des photos d’eux-mêmes pendant les séances.
Cette nouvelle activité est pensée avec les résidents pour les guider vers une pratique autonome et adaptée de la boxe. L’atelier est conçu pour être mené par les animateurs de l’ Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). La pratique de la boxe en EHPAD a de beaux jours devant elle !
À propos
Clarisse Coureau et Jeanne Mollier, designers, sont toutes deux diplômées du Master Design Objet à l’École Nationale Supérieur des Arts Décoratifs (ENSAD). Elles ont pour volonté de concevoir des projets qui accompagnent la société vers un futur en cohésion avec son milieu tout en créant des dispositifs inclusifs.
L’EHPAD Cousin-de-Méricourt, établissement de la ville de Paris, est labellisé "Culture et Santé en Île-de-France" en raison de sa forte implication pour une pleine participation des résidents à la vie artistique et culturelle. Spectacles, concerts cinéma, accueil d’artistes en résidences marquent la vie de cet établissement. Grâce à Deuxième Souffle, les résidents pratiquent également la boxe adaptée (méthode pour favoriser la réappropriation corporelle, contribuer à l’insertion sociale, travailler sur la mémoire et l’estime de soi), qui sert de support à la résidence des deux designers.
Ont collaborés au projet : EHPAD Cousin-de-Méricourt, Cachan (Hauts-de-Seine), Gilles Dupont, Marion Ramirez, Loic Pinto directeur de l’association Deuxième Souffle, les résidents de l’EHPA.
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