En 2016, à Saint-Martin d’Hardinghem (Pas-de-Calais), lors d’une fouille préventive prescrite par le Service régional de l’archéologie (SRA) de la DRAC Hauts-de-France sont révélés des pavements médiévaux, anciennement abrités dans la résidence civile des évêques de Thérouanne. Parmi les plus grands jamais déposés en France, ces pavements constituent une découverte d’importance exceptionnelle. Depuis 2018, la restauration des pavements de Saint-Martin d’Hardinghem mobilise une équipe pluridisciplinaire, travaillant à rendre à cet ensemble sa monumentalité, sa splendeur. Parmi elle, deux femmes partageant rigueur et expertise dans la conservation et la restauration des pavements : Natacha Natacha Frenkel, conservatrice-restauratrice du patrimoine, et Laetitia Maggio, conservatrice du patrimoine à la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) des Hauts-de-France.
Laetitia Maggio : « Il fallait rompre avec cette habitude, cette tradition, de ne pas déposer les pavements médiévaux »
Sous l’immensité silencieuse des pavements de Saint-Martin-d’Hardinghem se cache un regard expert et passionné : celui de Laetitia Maggio. Conservatrice du patrimoine archéologique au Service régional de l’archéologie (SRA) de la DRAC Hauts-de-France, elle suit depuis 2018 chaque étape du destin de ces pavements exceptionnels. Portrait.
Depuis plus de dix ans, Laetitia Maggio partage son temps entre deux missions fondamentales pour l’archéologie dans les Hauts-de-France : côté pile, la conservatrice du patrimoine est en charge de la recherche archéologique sur l'arrondissement de Saint-Omer. Côté face, elle est aussi gestionnaire du mobilier archéologique et responsable des dépôts du Nord et du Pas-de-Calais, une mission essentielle pour la conservation et la remise à l’État des biens après leurs temps d’étude.
C’est grâce à ce double titre qu’en 2016 Laetitia Maggio s’est vue confier la fouille et le suivi du devenir des pavements. « Ils étaient dans mon secteur : j’ai récupéré le dossier au début de la fouille archéologique, après le diagnostic. J’ai pu assurer le contrôle scientifique et technique sur la fouille, puis aider à la déclarer comme une « découverte d’importance exceptionnelle » pour étendre la durée du chantier et débloquer les financements nécessaires. Aujourd’hui, même si le rapport d’opération a été rendu depuis longtemps, grâce au titre de gestionnaire de mobilier je suis chargée du devenir et de la conservation de ces pavements ».
Une mission hors norme pour le Service régional de l'archéologie
Le cas des pavements de Saint-Martin d’Hardinghem sort des missions habituelles du Service régional de l’archéologie : « la restauration est habituellement gérée par les musées. Mais là, c’était essentiel pour pouvoir étudier les pavements et leur rendre une visibilité ».
« Il faut garder la fragmentation des objets, les traces d’usure qui montrent leur histoire, mais en même temps rendre leur lisibilité, d’où les comblements un peu poussés. Ces pavements sont voués à être vus d’assez loin, pour avoir cet aspect d’ensemble propre aux tableaux dans un musée. »
Une reconnaissance patrimoniale
Aujourd’hui, Laetitia Maggio travaille en lien étroit avec le conservateur des Monuments historiques de la DRAC Hauts-de-France, Simon Ducros (et auparavant Anaïs Dorey). L’inscription rapide des pavements au titre des Monuments historiques a été un tournant : « elle est intervenue peu après la dépose, en anticipation de l’ampleur du chantier et des financements à venir. C’était une reconnaissance légitime, nécessaire et opportune ».
Une découverte exceptionnelle
Si au départ l’idée était de laisser les pavements enfouis, un cas habituel lors des fouilles programmées, Laetitia Maggio a vite compris leur singularité. « Ils sont uniques par leur taille et leur diversité. Il fallait rompre avec cette habitude, cette tradition, de ne pas déposer les pavements médiévaux ».
Et surtout, il fallait convaincre que leur sauvegarde était une nécessité, pour le patrimoine mais aussi pour le territoire : « il fallait lutter contre l’idée qu’un pavement photographié, enregistré, pouvait ensuite être simplement détruit. Ce qui a fait la différence, c’est l’impact de cette découverte pour les habitants de Saint-Martin d'Hardinghem. Ça aurait été un scandale de ne pas sauver les pavements ».
Grâce à l’engagement de Laetitia Maggio, les pavements de Saint-Martin-d’Hardinghem ont été sauvés, restaurés et reconnus. Un combat discret mais décisif, porté par une femme de terrain, partagée entre rigueur scientifique et passion du patrimoine.
L'enfouissement en archéologie
Lorsqu’un site ne peut être étudié ou valorisé immédiatement, ou qu’il n’est pas menacé de façon imminente par un projet d’aménagement, l’enfouissement vise à assurer sa conservation pour des recherches futures.
L’enfouissement permet de préserver le patrimoine archéologique sur place lorsque les conditions ne permettent pas une valorisation directe ou un prélèvement des vestiges. Cette démarche vise à limiter les altérations causées par les intempéries, les activités humaines ou les modifications du terrain. La préservation sur site par enfouissement est ainsi reconnue comme une solution adaptée à la fragilité et au caractère non renouvelable de ces biens.
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