Avec, en 2023, 193 000 visiteurs, 280 rencontres avec des auteurs et autrices, 1 300 dédicaces et 420 exposants, il s'agit incontestablement du plus important événement de l’édition jeunesse en France. Le Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil se déroule du 27 novembre au 2 décembre à Montreuil (Seine-Saint-Denis), s'annonce une fois de plus comme un rendez-vous incontournable pour le grand public et les professionnels. Pour sa 40e édition, le thème retenu cette année est celui du rêve.
Le secteur de la presse jeunesse constitue l'autre volet de ce salon. Le ministère de la Culture, qui présente à Montreuil ses principales actions en faveur du livre et de la presse jeunesse (voir notre encadré), soutient depuis 2015 le développement de l’éducation aux médias et à l’information (EMI) pour différents publics. La lutte contre la désinformation et les infox est précisément un sujet dont s'est emparé le groupe presse jeunesse du SEPM, le Syndicat des Editeurs de la Presse Magazine, qui regroupe une soixantaine de titres allant du magazine de divertissement et de lecture au journal d'actualités pour le jeune public. Le SEPM sera présent sur le salon avec son kiosque jeunesse, qui propose une vingtaine de rendez-vous pour découvrir la richesse de ce secteur et de rencontrer ceux qui font ces publications (journalistes, éditeurs, illustrateurs...). Le point avec Diane Delacharlery, responsable communication et affaires institutionnelles du SEPM.
Pouvez-vous présenter le SEPM et notamment sa partie sur la presse jeunesse ?
Le SEPM représente la presse magazine grand public avec environ 80 sociétés adhérentes, 500 publications papier et 200 de presse en ligne. Nous sommes vraiment généralistes puisque nous avons à la fois de la presse d'information politique et générale, de la presse spécialisée et, donc, de la presse jeunesse. Sur la partie jeunesse, nous regroupons une soixantaine de titres de douze sociétés d’édition là-aussi très diverses avec à la fois des groupes de presse comme Bayard et des éditeurs indépendants comme par exemple Scrineo. On retrouve cette diversité dans les positionnements éditoriaux axés sur le divertissement, l’éducation et les centres d’intérêts des jeunes lecteurs.
Le secteur de la presse jeunesse est un secteur qui se porte bien, avec plus de 250 magazines, dix millions de lecteurs de 1 à 19 ans et 5 h 26 de lecture hebdomadaire. Comment expliquez-vous ce dynamisme ?
Ces magazines subissent les mêmes difficultés que le reste de la presse magazine mais la baisse de leur diffusion est contenue. Lorsque l’on regarde les études, on voit qu’en 2023, il y a quasiment une heure de temps de lecture hebdomadaire supplémentaire chez les moins de 12 ans par rapport à 2021. À travers des reportages, des histoires, des héros et des rendez-vous réguliers, les magazines créent un lien fort avec leurs lecteurs, qui se traduit assez bien dans la forte proportion d'abonnement qui caractérise la presse jeunesse, plus importante que pour la presse en général (86 contre 46 % en 2023 ndlr).
C’est un résultat encourageant, qui est en grande partie lié à l’immense créativité dont font preuve les éditeurs pour se renouveler face à un jeune public particulièrement exigeant. Quand on regarde par exemple les magazines pour les tout-petits, on remarque l’effort d’inventivité dans les propositions d’activités et de jeux à faire avec son enfant. Selon l’étude Junior Connect’ 2022, pour les 1-6 ans, la presse jeunesse est un média qui permet d’avoir confiance en soi, de s’amuser, de mieux comprendre le monde et pour les 7-12 ans, elle permet d’apprendre à mieux se connaître et à répondre aux questions que l’on se pose.
Selon vous, en quoi ces magazines de presse jeunesse remplissent un rôle éducatif et citoyen ?
Le travail des éditeurs et des rédactions de presse est très important parce qu'ils essaient de se mettre à la hauteur des enfants pour parler d'actualité et du monde qui les entoure. Les magazines jeunesse sont en réalité assez complémentaires des livres puisqu’ils constituent un autre moyen d'amener les enfants à la lecture. Les éditeurs travaillent par ailleurs avec des illustrateurs et des auteurs comme l’édition de livres, il s’agit d’un même écosystème créatif.
La particularité de la presse magazine, c'est qu’elle est constituée d’hebdomadaires, de mensuels, de trimestriels et de hors-série. Cette temporalité permet de s'extraire du flux d'information, d'approfondir des thématiques et d'aller plus loin dans la prise de recul. Ce positionnement est très précieux et vraiment essentiel dans la manière d'aborder l'information aujourd'hui. C’est une grande force d'un point de vue démocratique et citoyen.
Cette cible jeune autorise-t-elle des formats plus inattendus et innovants, notamment sur le digital ?
Il y a effectivement beaucoup d'initiatives sur le digital, comme Le Monde des ados et sa chaîne WhatsApp qui donne tous les jours à la sortie de l'école les trois infos principales de la journée ou encore Le journal de Mickey et son application Ducktoon pour les BD. Nous avons récompensé l'année dernière le groupe Milan pour son dispositif « Un jour une actu » avec des émissions interactives qui permettent de toucher jusqu'à 100 000 élèves sur des sujets en prise avec les questions que peuvent se poser les lecteurs.
Mais la question du temps passé devant les écrans reste essentielle. Bayard a par exemple lancé la plateforme BayaM pour les 3-10 ans sur laquelle on peut retrouver énormément de contenus éditorialisés, de jeux et d’histoires, qui amènent les enfants à explorer de nouveaux sujets et formats et qui est très encadrée avec un chronomètre qui permet aux parents de contrôler la durée d’utilisation. Le digital est un support supplémentaire mais il est vrai que le papier reste au centre de l'offre de la presse jeunesse.
L'un des grands enjeux aujourd'hui est la prévention contre les infox et l'éducation aux médias et à l'information (EMI). Comment le SEPM s'est-il emparé de ce sujet ?
L'éducation aux médias est une ambition cruciale pour le fonctionnement de notre démocratie. Dans un climat de défiance généralisée, on se rend compte qu’il est très important d'expliquer au jeune public (mais pas seulement !) comment on produit de l’information, comment on la contextualise, la hiérarchise, etc. En faisant ce travail, on lutte contre la mésinformation sinon la désinformation... Les éditeurs, notamment de presse jeunesse mettent en place depuis longtemps des formats dédiés et des rencontres avec les élèves. Ils offrent également chaque année plusieurs centaines de milliers d’exemplaires aux écoles dans le cadre de la Semaine de la presse et des médias dans l’école. Pour autant, les éditeurs et journalistes sont frustrés de ne pas pouvoir en faire autant qu'ils le souhaiteraient. La possibilité de proposer des ateliers d’EMI via la part collective du pass Culture est un premier pas important pour répondre à cette problématique.
En 2022, la presse magazine et la presse quotidienne nationale, régionale et hebdomadaire se sont associées au sein de l’APEM, l'Association pour l'éducation aux médias, et ont été rejointes cette année par la presse indépendante d'information en ligne. Le but de l’association est de renforcer les moyens et ambitions des différentes familles de presse en la matière et de parler d'une seule voix.
Quelle importance revêt pour vous le Salon du livre et de la presse jeunesse, qui se tient chaque année à Montreuil ?
Parmi toutes nos initiatives, le kiosque de la presse jeunesse est le point cardinal qui nous permet d’organiser la rencontre entre les enfants et les professionnels. Il nous donne la possibilité de faire découvrir la grande variété de publications de presse jeunesse que nous avons la chance d'avoir en France. Plus de 50 titres de presse jeunesse seront en libre consultation pour encourager la prise en main, et en apprendre un peu plus sur le vocabulaire de la presse avec un jeu concours. Cette année, une vingtaine d’ateliers avec le public scolaire sont programmés, en petits groupes d’une vingtaine de d'élèves pour privilégier l’interactivité. On pourra notamment apprendre comment une rédaction construit sa Une, organise ses rubriques, choisit et traite ses sujets, crée ses BD et histoires.
Nous organisons également deux interventions sur la grande scène du Salon, autour de l’illustration avec l’éléphant junior et sur l’éducation aux médias avec l’APEM sous la forme d’un atelier « L’actu en débat ». C’est un nouveau format axé sur le débat entre les élèves qui leur permet de comprendre comment la consultation de la presse permet de se construire sa propre opinion. Pour les professionnels, une visio-conférence a été organisée avec Science et vie junior sur la vérité scientifique et le kit anti fake news de la rédaction. Nous accueillerons également le CLEMI avec qui nous travaillons souvent notamment dans le cadre de la Semaine de la presse et des médias à l'école, pour une animation à destination des médiateurs sur la parentalité numérique.
Trois jours au cœur de la littérature et de la presse jeunesse
Du 27 novembre au 2 décembre, le ministère de la Culture participe au Salon du livre et de la presse jeunesse et propose tout un programme de rencontres pour découvrir les programmes qu’il pilote, échanger avec des professionnels et explorer des thématiques avec des chercheurs et des bibliothécaires. Il y présente également ses actions en faveur du livre et pour promouvoir la lecture à tout âge, dès la petite enfance. L'occasion d'évoquer le programme Premières Pages de soutien de politiques territoriales en faveur de la sensibilisation au livre dès la petite enfance, le pass Culture au service des bibliothèques, Dis-moi dix mots qui invite chaque année à jouer avec les mots sur un thème donné ou encore ses dispositifs en direction des mineurs placés sous-main de justice et Des livres à soi pour les parents en difficulté d'accès à la lecture. Le ministère accompagne également les bibliothèques, à travers la création cette année de Biblis en folie, manifestation de deux jours dédiée à ces lieux culturels.
Il sera présent en compagnie de tout son réseau qui permet de diffuser ses actions en métropole et en outre-mer: ses directions, les DRAC, plusieurs opérateurs comme le Centre national du livre et le Centre national pour la littérature de jeunesse de la BnF, ainsi que ses partenaires associatifs telles que l’Association des bibliothécaires de France, l'agence Quand les livres relient, la Fédération des parcs naturels régionaux de France, Agir pour la petite enfance, l’Arbre des connaissances, ATD Quart Monde, Enfance & Musique, Les Incorruptibles et Lire et faire lire.
Les Brèves de rencontres, lancées en 2023, se poursuivent sur le même format : des rendez-vous de 40 minutes animés par le Ministère et par des associations pour apporter un éclairage sur un dispositif ou une activité en privilégiant l’échange avec les participants. A l’occasion de la journée professionnelle coordonnée par la Direction générale des médias et des industries culturelles, le lundi 2 décembre, plusieurs table-rondes permettront de réfléchir sur l’accueil des enfants et adolescents dans les bibliothèques, l'évolution des pratiques de la littérature jeunesse, le tout sous le regard d'un grand témoin : Jeanne Seignol, journaliste et chroniqueuse littéraire sur les réseaux sociaux.
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