Repenser l’existant et réaffirmer la place de l’architecture pour proposer des solutions d’adaptation au changement climatique. Tel est l’objectif du projet Vivre avec / Living with, porté par un quatuor d’architectes composé de Dominique Jakob et Brendan MacFarlane, à l’origine notamment des Docks, cité de la mode et du design sur les bords de Seine à Paris, associés aux architectes Éric Daniel-Lacombe et Martin Duplantier. Ils représenteront la France à la Biennale de Venise, l’Exposition Internationale d’architecture qui ouvre le 10 mai et jusqu’au 23 novembre.
Ce projet, retenu parmi 45 candidatures par l’Institut français, opérateur du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et du ministère de la Culture, interroge « la capacité de l’architecture à faire face aux défis climatiques, aux conflits et à l’instabilité du monde. Pour cela, le projet fait appel à trois intelligences : l’intelligence de la nature, l’intelligence humaine et l’intelligence artificielle ». Il fait écho au thème de cette 19e édition de la Biennale internationale d’architecture de Venise : « Intelligens. Natural. Artificial. Collective ». De quoi proposer, avec cette installation et le programme d’animation mis en place pendant six mois, des solutions durables face aux aléas climatiques.
Un Pavillon « hors les murs »
Vivre avec / Living with a dû faire face à une première adaptation : la fermeture du Pavillon français pour rénovation afin d’améliorer ses performances énergétiques et l’accueil du public. « Face à cet impératif, il nous est apparu comme une évidence qu’il fallait s’en remettre à l’inventivité, à la liberté de création et à l’intelligence de nos architectes », se souvient Hugues Ghenassia-de Ferran, directeur général délégué de l’Institut français. Les quatre curateurs ont donc fait de cette contrainte un atout. « Le pavillon est en travaux mais on ne l’abandonne pas, poursuit Dominique Jakob. Dans le cahier des charges, nous avions carte blanche et pouvions aller sur une nouvelle île mais nous avons fait le choix de rester à côtés et de nous adapter. »
Ainsi, pour la première fois, l’exposition de l’équipe française ne prend pas place à l’intérieur du pavillon mais tout autour et en prolongement du chantier. Le quatuor a imaginé un dispositif « hors les murs » avec une structure éphémère, un « abri inclusif » composé d’un ingénieux système d’échafaudages qui se nourrit des contraintes physiques de l’environnement. « Le chantier entoure le pavillon avec un échafaudage, décrit Brendan MacFarlane. C’est un espace assez extraordinaire avec une extension vers l’avant où l’on descend dans la forêt et une autre partie vers le canal. » Cette structure, en bois et toile, a été conçue pour avoir l’empreinte carbone la plus minime possible avec des matériaux réutilisables ou recyclables, loués à des entreprises vénitiennes pour éviter du transport et ré-employables après l’événement.
Une dimension internationale
Au sein de cette structure, une exposition explore six thématiques du « vivre avec » : l’existant, les proximités, l’abîmé, les vulnérabilités, la nature et le vivant et enfin les intelligences réunies. Pour la nourrir, 50 projets français et internationaux : 9 portés par les commissaires et 41 sélectionnés par un comité de sélection dans le cadre d’un appel à projets lancé en juillet dernier. Chacune de ces six thématiques fera l’objet d’une conférence mensuelle qui confrontera les points de vue de plusieurs acteurs de l’architecture : des architectes bien sûr, mais aussi un étudiant, un décideur politique et même un auteur.
Cette structure sera également, pendant près de six mois, un laboratoire ouvert à tous et un lieu de rencontres et de discussions enrichies par huit écoles d’architecture françaises et internationales qui réfléchiront chacune à un risque majeur lié à un aléa. « L’exercice proposé consistait à se focaliser sur un territoire proche du lieu d’implantation de l’école et le regarder avec l’œillère du risque et de l’aléa », explique Martin Duplantier. Ont par exemple participé la Southern California Institute of Architecture sur la menace des incendies de forêt à Los Angeles, l’école Africaine des Métiers de l’Architecture et de l’Urbanisme (Togo) sur la problématique de submersion marine, la Kharkiv School of Architecture (Ukraine) sur les conséquences de la guerre à Odessa ou la Ain Shams University (Égypte) sur les nuisances sonores. Objectif : réaliser un « Atlas des aléas » pour présenter ces risques territoriaux. « Cette base peut être fantastique en termes de créativité architecturale par la suite, ajoute Martin Duplantier. Faire intervenir les étudiants va permettre d’alimenter leur réflexion et celle des visiteurs du pavillon. »
Après la Biennale, Vivre avec / Living with continuera de résonner puisque dès février 2026, le projet sera présenté au FRAC Centre-Val de Loire, accompagné de conférences pour les professionnels et les écoles supérieures d’art, de design, d’architecture et de paysages françaises et étrangères. Le public aura donc l’opportunité de « Vivre avec » ce projet dans les mois à venir.
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