L'éclatante vitalité du patrimoine culturel universel
Chants, savoir-faire, jeux, fêtes... Ancré dans les territoires, revêtant les formes les plus variées, le patrimoine culturel immatériel (PCI) est l’incarnation d’un patrimoine vivant, populaire et en perpétuel renouvellement. Le ministère de la Culture souhaite aujourd’hui le mettre en lumière.
Qui n’a pas entendu parler d’En fanfare ? Avec plus de 2,5 millions d’entrées, le film d’Emmanuel Courcol, qui célèbre avec brio la vitrine sans doute la plus populaire de la pratique musicale amateur, est un des grands succès de 2024 et un ambassadeur de choc du patrimoine culturel immatériel (PCI), cet ensemble de pratiques, expressions ou représentations qu’une communauté humaine reconnaît comme faisant partie de son patrimoine. Le PCI ne recherche pas nécessairement l’exceptionnalité, même si des savoir-faire en joaillerie ou liés à l’industrie du luxe sont reconnus, il vise surtout la représentativité, et inclut souvent des pratiques liées au patrimoine du quotidien.
La France a ratifié en 2006 la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel adoptée par l’UNESCO le 17 octobre 2003. Depuis, 549 pratiques sont officiellement entrées à l’Inventaire national du PCI (voir encadré) dont se détachent les savoir-faire liés à l’artisanat (34 % de la totalité) – pendulerie, corseterie, dentelle au point d’Alençon, savoir-faire liés au parfum en pays de Grasse pour n’en citer que quelques-uns - et les jeux et sports traditionnels (20 %), courses sur échasses, pétanque, jeu du sabot... Cette « richesse sans pareil », ainsi que la qualifie la ministre de la Culture, en fait un incomparable instrument de rayonnement, de créativité et de diversité culturelle.
Le PCI, instrument de valorisation et de dynamisme des territoires
Le processus d’inclusion d’un élément du patrimoine culturel immatériel dans l’Inventaire national du PCI en dit long sur la dynamique qu’il insuffle à l’échelle d’un territoire. Cet inventaire est en effet exclusivement alimenté par des demandes spontanées qui émanent de la société. Il est fondé sur une approche ascendante et participative, qui remonte des territoires vers une reconnaissance au niveau national. Lors des échanges sur la transhumance – pratique inscrite depuis 2023 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité – et le pastoralisme qui ont accompagné sa visite du Château de Tallard dans les Hautes-Alpes, le 13 mars 2025, la ministre de la Culture a rendu hommage aux communautés vivant le long des itinéraires de transhumance, insistant sur leur « rôle essentiel en matière de transmission ».
Autre caractéristique du patrimoine culturel immatériel, sa présence forte dans les territoires ruraux. D’où une articulation étroite avec le Plan culture et ruralité qui renforce la place de la culture au cœur des territoires ruraux, notamment à travers son axe 4 : « Rendre visible au niveau national et local le patrimoine culturel immatériel français ». Un levier d’action que complète l’annonce par la ministre de la Culture d’un élargissement du Plan fanfare : initialement centré sur le développement et le rayonnement des orchestres d’harmonie et des fanfares, ce plan s’ouvre désormais aux musiques et danses traditionnelles, aux chants chorals et polyphoniques, ainsi qu’au théâtre amateur. Des pratiques jouant un rôle essentiel dans la transmission culturelle, la cohésion sociale et l’animation des territoires.
Le PCI, instrument de créativité et de diversité culturelle
Loin de la définition passéiste à laquelle certains seraient tentés de le réduire, le patrimoine culturel immatériel, dont les pratiques évoluent et s’adaptent à leur contexte, se renouvelle sans cesse. Il englobe, de même, un large éventail de pratiques. La liste, accompagnée de « mesures de sauvegarde envisagées », des 27 éléments patrimoniaux inscrits en 2023 et 2024 à l’Inventaire national du PCI en témoigne.
Prenons-en trois parmi les plus représentatifs :
- L’apprentissage et l’usage du braille. L’inclusion de cette pratique, qui a transformé le destin de la communauté des personnes aveugles en lui permettant un accès direct à l’écrit, est assortie d’un plan d’action destiné à faciliter l’accès à la culture pour tous par l’écriture tactile. Celui-ci prévoit notamment de « soutenir les activités d’apprentissage du braille et d’encourager les dispositifs de formation destinés au grand public ». En attendant, le braille fête ses 200 ans en 2025 !
- Les gestes du travail pour la cueillette du tilleul dans les baronnies provençales. Production internationalement reconnue, le tilleul des Baronnies doit cette reconnaissance aux savoir-faire développés par les cueilleurs. L’enjeu, aujourd’hui, est précisément celui de la transmission des gestes de la cueillette. D’où notamment le projet d’une réactivation de la filière et l’intégration de la cueillette du tilleul dans une démarche plus globale de préservation de la cueillette comme élément emblématique du « patrimoine alimentaire alpin ».
- Enfin, pratique cochant avant l’heure toutes les cases de l’éco-responsabilité, l’art traditionnel de la poterie à Mayotte. Les poteries sont en effet fabriquées à partir de l’argile et au moyen de matériaux rudimentaires bio-sourcés (bois, feuilles de cocotier, coquillages...), servant d’outils de façonnage, et géo-sourcés (terre crue et argileuse), servant à créer les objets. Un plan de sauvegarde est envisagé pour protéger cet art aujourd’hui confronté à plusieurs difficultés – notamment en matière d’accès à la ressource. La direction des affaires culturelles et le Musée de Mayotte ont d’ores et déjà signé une convention qui encourage la transmission et la valorisation.
L’Inventaire national du PCI
L’Inventaire national du PCI reflète le PCI présent sur le territoire français dans toute sa diversité, qu’il soit présent en France depuis des siècles, comme « Le Tour du Saint-Cordon » de Valenciennes apparu en l’an 1008 (inclus à l’Inventaire en 2023), ou plus récemment, comme « La danse du lion en Île-de-France » dont la première représentation a eu lieu en France, à Paris, en 1984. En 2024, une cérémonie, visant à donner plus de visibilité à cette reconnaissance nationale, a accompagné l’inclusion des 27 nouveaux éléments patrimoniaux. L’Inventaire national du PCI marque la première étape impérative à une candidature pour une inscription sur un des trois dispositifs de reconnaissance de l’UNESCO. 30 éléments et programmes sont ainsi reconnus au titre de la convention UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine dont 14 en multinational (impliquant 34 pays).
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