L’impact écologique de la culture est un énorme problème qui interroge les pratiques contemporaines culturelles. L’objectif étant de diminuer les émissions le plus possible tout en organisant des événements culturels qui ne perdent rien de leurs richesses.
Conscients de cette exigence écologique, Axel Legrout, chanteur du groupe pop rock électro For the Hackers, tout droit sorti du conservatoire Camille Saint Saëns de Dieppe, et son acolyte David Garnier ont conçu et réalisé un… « Carpanorama » ! De quoi s’agit-il ? Un tout-en-un mobile plutôt étonnant, qu’ils auraient pu, tout autant, nommer « le Bœuf sur le toit », puisqu’il s’agit d’un bus dont le toit s’aménage pour recevoir des musiciens en concert et dont l’intérieur comprend un vrai studio d’enregistrement.
Mais ce n’est pas tout. Carpanorama est aussi 100% autonome énergétiquement, grâce à ses panneaux solaires. Itinérance, sobriété : l’alpha et l’oméga des enjeux de diffusion de la culture en territoire, alliés à l’élégance du design. Plus concrètement : une installation qui ne demande qu’une place de stationnement de poids lourd, une heure trente de préparation et qui dispose d’une très longue autonomie. Une ingéniosité qui aura valu aux deux jeunes gens le prix IFCIC 2024 !
Rencontre avec Axel Legrout, directeur général de Carpanorama et chanteur du groupe For The Hackers
Comment vous est venue l'idée de Carpanorama ?
"L'idée est venue de David le président de l'entreprise, concepteur et ingénieur du projet. Le but était tout d'abord de pouvoir pallier au manque de programmation pour notre groupe de musique et ensuite d'être totalement autonome. Pour ainsi ne dépendre que d'une autorisation d'emplacement pour donner lieu à un concert. Cela permettait au-delà de s'inscrire dans un outil de la transition écologique, d'être le plus indépendant possible et d'être clé en main pour nos interlocuteurs/interlocutrices."
Le Carpanorama est un vieux bus datant de 1984 totalement réhabilité disposant sur son toît d’une scène et en son sein d’un studio d’enregistrement. Pouvez-vous nous dire comment fonctionne ce car ?
"Toute l'alimentation électrique du bus fonctionne à l'énergie solaire, deux batteries de stockage et dix panneaux solaires. En revanche, le bus possède un moteur diesel que nous envisageons de transformer une fois que les homologations de système aux poids lourds auront été prises (autorisation pour les poids lourds en cours). Cela est cependant très coûteux même avec une aide comme Rétrofit (aide du ministère de la transition écologique pour transformer un véhicule à motorisation thermique en motorisation électrique)."
L’énergie est-elle suffisante pour organiser un concert ?
"Oui totalement, en tout cas à partir du printemps (rayons du soleil). Nous sommes autonomes des jours et des jours durant. Je me souviens d'une tournée en Angleterre en 2022 et en Irlande en 2023 où nous avons donné cinq jours de concerts et même branché des foodtrucks sur notre énergie : aucune des batteries n'étaient vides. Bien évidemment, plus on branche, plus on consomme. Nous ne savons pas encore quel genre de musique est la plus consommatrice, nous sommes plutôt tournés vers la production d’énergie par ces batteries solaires. Et elle est très importante."
Quel autre avantage permet ce bus ?
"Il permet de faire gagner du temps à nos organisateurs/organisatrices de concerts, aux mairies, aux instances qui souhaitent avoir une scène, un studio qui se déplace chez eux et qui déplace à la fois l'équipe technique et le backline : c'est une réduction de chaîne, d'interlocuteur et donc de prix. Nous pouvons aller partout : que l'espace soit reculé ou en pleine ville, c'est aussi là, la magie de ce bus."
Avez-vous identifié d’autres projets aussi original et engagé que le vôtre ?
"Oui il y a un autre projet normand, le Camion Scratch qui lui propose des sessions DJ en roulant dans un camion Traffic, très original. Il y a également nos confrères canadiens du Mixbus qui ont une scène sur le toit d'un bus mais avec lui l'alimentation électrique n'est pas à l'énergie solaire."
Quels sont les prochaines étapes et les prochains projets ?
"Finir l'outil ! Ce bus est du « DIY » (Do it Yourself), on a toujours quelque chose à faire : l’escalier de service, l’accès aux personnes à mobilité réduite (PMR)… Actuellement, on cherche surtout à doubler la capacité énergétique. Et puis, à plus long terme, créer des emplois mais pour cela il faut que notre carnet de commandes s’élargisse."
Le prix IFCIC - Entreprendre dans la Culture - 2024 (Prix de l'Institut pour le Financement du Cinéma et des Industries Culturelles) récompense tous les ans, cinq entreprises ou associations ayant développé, dans le secteurculturel, un modèle économique ou une forme d’organisation remarquable, innovante, originale, responsable et durable.
Son ambition est de mettre en valeur les démarches entrepreneuriales créatives d’acteurs de la filière des industries culturelles et créatives afin de soutenir et d’amplifier ces initiatives.
Pour en savoir plus :
Pour voir le Carpanorama cet été :
- Festival Off Murmure du Son (12 et 13 juillet 2024 à Eu, Seine-Maritime)
- Chauffer dans la Noirceur (12, 13 et 14 juillet 2024 à Montmartin-sur-Mer, Manche)
- Summer Blues Festival (16, 17, 18, 19, 20 juillet 2024 à Petit-Caux, Seine-Maritime)
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