Depuis le 1er janvier 2024, Simon Fleury a pris la tête de Dieppe Scène Nationale (DSN). Fort d’une première et efficace expérience au Théâtre en Seine de Duclair, où il a notablement mis en avant la jeune création et noué de nombreux partenariats culturels avec des figures du théâtre (avec la Piccola Familia de Thomas Jolly, le théâtre des Arts de Rouen, Dadid Bobée…), Simon Fleury sort de 7 années passées à la tête de l’Eclat de Pont-Audemer, où il a lancé un festival destiné au jeune public et aux arts numériques : le Noob, un objet culturel intrigant réunissant théâtre, danse, cirque, musique et nouvelles technologies permettant la création de nouvelles formes scénographiques et le déploiement d’expériences originales autour des réalités virtuelles.
Il a, par ailleurs, permis à L’Éclat d’être distingué de l'appellation scène conventionnée d’intérêt national « art, enfance, jeunesse » (3e salle normande à décrocher cette appellation après le Théâtre des Champs Exquis de Blainvillle sur Orne, et le TMC de Coutances). Il arrive sur la scène de Dieppe Scène Nationale avec un projet artistique fort et original orienté vers la musique, la proximité et la mobilité culturelle, les arts hybrides et numériques… Rencontre.
La ville de Dieppe est une ville portuaire bénéficiant d’une histoire pluriséculaire, cette situation va-t-elle jouer un rôle dans votre action ?
Oui effectivement on inscrit toujours un projet artistique dans une ville ou sur un territoire en prenant en compte son histoire, ses singularités, sa géographie, ses dynamiques, ses habitants etc... Le projet que je porte ici pour la scène nationale de Dieppe ne fera pas exception. Par ailleurs, j'attache beaucoup d'importance à ces aspects. Le projet sera donc évidemment tourné vers la mer mais aussi au-delà avec des liens étroits avec l'Angleterre par exemple.
Dieppe est aussi connue pour son rapport au cinéma (festival du film canadien), comment appréhendez-vous cette question ?
Le cinéma c'est l'ADN de DSN. Le cinéma tient une place majeure à la scène nationale de Dieppe, il se porte bien et même très bien grâce à une programmation de qualité et une vitalité de tous les instants. Il s'agira de poursuivre cette dynamique avec notamment les partenaires historiques du territoire. De manière plus générale, la question de l'image et notamment de l'éducation à l'image est une question fondamentale pour nos sociétés et un enjeu majeur dans les années futures. Il y a un gros travail qui est fait sur cette thématique à la scène nationale et nous poursuivrons cette implication et ce travail de fond qui nous semble essentiel. Il s'agira pour nous également de creuser cette question de l'image à travers un temps fort qui explorera le dialogue entre arts vivants et arts numériques.
Fort de l'histoire de la ville extrêmement marquée par l'opération Jubilée de 1942, c'est-à-dire le débarquement de milliers de Canadiens sur les plages de Dieppe et des alentours. Nous allons construire ce temps fort en dialogue culturel avec nos amis canadiens en invitant chaque année une délégation d'artistes dans le but de continuer à tisser nos liens et nos échanges avec ce pays ami. Pour développer ce projet, nous pourrons notamment compter sur la compagnie 14-20 qui est associé au projet de la scène nationale et qui collabore depuis de nombreuses années sur cette thématique avec le Canada .
Il semble que la danse est importante pour vous, quelle place prendra-t-elle à Dieppe (Leila Ka) ?
Je dirai plus généralement que le corps tiendra une place importante dans la programmation de DSN. Le corps dans toute sa théâtralité grâce, notamment à Julie Beres artiste associé à la scène nationale. Le corps circassien avec l'accueil de plusieurs propositions de cirque tout au long de la saison. Et puis bien sûr le corps chorégraphié avec Leila Ka artiste chorégraphe associée à la scène nationale.
La mise en place du Noob à Pont Audemer est une belle réussite, quel projet en direction des jeunes publics à Dieppe ?
La jeunesse aura une place importante dans le nouveau projet développé ici à Dieppe. Nous allons créer un festival jeune public sur le territoire autour des notions de redirections écologiques de nos activités. Il s'agira de proposer un temps fort mêlant spectacles, cinéma, actions culturelles, conférences, actions citoyennes autour d'une thématique que je pourrais définir comme telle : Émerveillons-nous du vivant. Nous essaierons de construire cet événement pour et avec la jeunesse de Dieppe et du territoire. J'ai la sensation qu'elle peut nous apporter beaucoup dans le cadre de cette réflexion autour de ces nouveaux enjeux.
La diffusion de la culture pour toutes et tous est un enjeu majeur pour chacun des acteurs culturels, la proximité est-elle une question qui vous anime et comment la mettre en œuvre ?
Bien sûr, la question de la culture de proximité me paraît essentielle dans le développement d'un projet comme celui porté par la scène nationale de Dieppe. Pour cela, nous allons nous doter d'un outil de co-construction des projets artistiques et culturels. Celui-ci prendra la forme d'un laboratoire d'innovation culturelle avec des habitants, des citoyens, des élus, des représentants des associations, des représentants des publics et de toutes les forces vives et bonnes volontés du territoire. Afin de construire des projets sur mesure, adéquat, cohérent et qui prennent en compte les besoins et les attentes des acteurs locaux.
La musique semble centrale pour vous. Comment traduire cet attrait ? Quel projet ? Quel artiste vous intéresse ? (14 :20, Kerry James)
Effectivement, de par mon cursus au conservatoire, j'ai une appétence particulière pour la musique. J'ai une formation jazz, donc évidemment cette discipline trouvera sa place au sein du nouveau projet de la scène nationale en partenariat, notamment avec le conservatoire Camille Saint-Saëns. Par ailleurs, j'ai toujours trouvé qu'il y avait des passerelles à créer entre le théâtre et les musiques urbaines comme le rap. Nous allons nous y employer avec l'aide, notamment d'un des artiste associé au projet, Kery James.
Le contexte global du réchauffement climatique actuel est un enjeu majeur contemporain. Les artistes et les diffuseurs réfléchissent beaucoup à une meilleure façon de diffuser la culture. Pouvez-vous nous dire un mot sur cette question d’écoresponsabilité, quelles orientations et quelles intentions avec DSN ?
Cela fait partie des défis majeurs qui nous font face. La transition numérique et la transition écologique, ce sont deux dimensions que nous allons questionner à Dieppe par le biais particulièrement de nos deux temps forts. Mais plus généralement ce sont des questions qui pourront traverser l'ensemble des activités de la maison. Il s'agit d'opérer la redirection écologique de l'ensemble de nos activités et pour cela nous allons créer du commun. Je crois beaucoup à l'intelligence collective pour mettre en mouvement notre secteur. Il faut une transformation partagée et concertée afin que celle-ci ci ne soit pas subie mais bien choisie, c'est en tout cas, ce que j'appelle de mes vœux.
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