Bien que les Rendez-vous de l'histoire soient d'abord connus pour leur salon du livre, un rendez-vous majeur pour les auteurs et éditeurs d'ouvrages historiques présidé en 2025 par l'écrivain Emmanuel Carrère, l'événement a su diversifier son offre culturelle. Le volet cinématographique, en particulier, constitue désormais à lui seul un festival de premier plan. En 2024, pas moins de 57 films ont été projetés lors de 93 séances, principalement au cinéma Les Lobis, mais aussi dans des lieux plus inattendus comme la maison d'arrêt de Blois ou l'INSA. Cette programmation éclectique mélange habilement documentaires (37 titres) et fictions historiques (20 films), accompagnés de 17 ciné-conférences qui permettent au public d'approfondir sa compréhension des œuvres.
L'édition 2025 promet d'être particulièrement riche avec Michel Hazanavicius, réalisateur oscarisé de "The Artist", à la présidence du cycle cinéma. La programmation s'articulera autour de deux axes majeurs : la mémoire collective française et la célébration des 130 ans du cinéma. Des thématiques telles que la mémoire de l'Alsace, de l'Occupation et de l'Algérie viendront nourrir les débats, tandis qu'une table ronde sur l'économie du cinéma français, organisée en partenariat avec le Centre national du cinéma (CNC) éclairera les enjeux contemporains du septième art.
Un trésor d'archives audio en cours de sauvetage numérique
L'aspect le plus fascinant des Rendez-vous de l'histoire réside peut-être dans l'extraordinaire travail de mémoire entrepris depuis les origines. Depuis 1998, chaque conférence est enregistrée, constituant progressivement un patrimoine audio exceptionnel. D'abord captées sur cassettes audio, puis sur mini-discs, ces interventions représentent aujourd'hui plusieurs centaines d'heures d'enregistrement et plusieurs téraoctets de données.
Cette archive sonore constitue un véritable trésor : on y retrouve les voix de personnalités comme Simone Veil, Robert Badinter, Lucie Aubrac ou encore Alain Rey. Autant de témoignages historiques d'une valeur inestimable qui risquaient de disparaître avec l'obsolescence des supports analogiques.
C'est là qu'intervient le soutien public. Grâce au financement apporté par la Direction régionale des affaires culturelles Centre Val de Loire (DRAC), un vaste chantier de numérisation a pu être lancé en 2024. L'opération, qui se poursuit en 2025, vise à sauvegarder l'intégralité des enregistrements réalisés entre 1998 et 2008 : 605 cassettes audio et 347 mini-discs, soit 952 supports représentant la quasi-totalité des interventions de cette période fondatrice.
Ce projet illustre parfaitement les enjeux de la transition numérique dans le secteur culturel. Sans cette intervention publique, une partie significative de la mémoire intellectuelle française aurait pu être perdue à jamais.
De l'archive au podcast : une valorisation moderne
Mais numériser ne suffit pas : encore faut-il rendre ces trésors accessibles au plus grand nombre. C'est pourquoi le Centre européen de promotion de l'histoire a développé une stratégie de valorisation innovante avec la création des podcasts "Les Archives des Rendez-vous de l'histoire".
Produits entièrement en interne, ces contenus audios bénéficient du savoir-faire technique de l'entreprise tourangelle "Une image à part" pour le nettoyage et la restauration sonore. Une personne dédiée assure ensuite le montage et la diffusion via la plateforme Ausha. Le succès est au rendez-vous : ces podcasts sont désormais disponibles sur les plateformes de musique en ligne et bénéficient d'une belle visibilité sur le site de Radio France depuis septembre 2024.
L'exemple des Rendez-vous de l'histoire de Blois démontre qu'avec un soutien public ciblé et une vision stratégique, il est possible de transformer un patrimoine en péril en ressource vivante et accessible. Ce projet conjugue habilement préservation du passé et innovation technologique, offrant aux citoyens d'aujourd'hui un accès privilégié aux grandes voix de l'histoire contemporaine.
Dans un monde où l'information circule à la vitesse de la lumière mais où la profondeur de l'analyse se perd souvent, ces archives numériques constituent un précieux antidote à l'amnésie collective. Elles rappellent que derrière chaque grande idée, il y a des femmes et des hommes qui ont pris le temps de la réflexion et du partage.
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