Identification et intérêt du site
Le site se distingue par des structures en « creux », difficilement lisibles par les profanes, qui témoignent des vestiges de creusements réalisés par l’homme pour s’installer : trous pour implanter les poteaux d’un bâtiment ou d'une palissade, fosses pour extraire de la terre, pour jeter des détritus, fossés défensifs ou de délimitation de parcelles… Ces structures s'identifient grâce à la différence de couleurs et de textures des sédiments qui constituent leur comblement par rapport au sol dans lequel elles ont été creusées. Le site de Pipriac a ainsi pu être repéré dès 2011 grâce aux photographies et relevés aériens réalisés par Maurice Gautier.
C'est sur le fondement de ces prospections aériennes qu'un diagnostic a été prescrit par le Service régional de l'archéologie (SRA) en juin 2021, à la suite d'une demande de permis d'aménager pour une zone d'activité commerciale (ZAC) déposée par Redon Agglomération. Ce diagnostic, qui portait sur les 5,5 hectares du projet de ZAC, a eu lieu en novembre 2021, et a été effectué par l'Inrap.
Il a permis de confirmer la présence d'un enclos gaulois, entouré d'un double fossé au sud. Cet enclos correspond aux vestiges d'un établissement rural gaulois. De nombreuses fosses, fossés et trous de poteaux ont également été identifiés lors du diagnostic.
A partir des résultats de ce diagnostic, une fouille a été prescrite par le
SRA
de la DRAC Bretagne sur une surface de 2,4 hectares comprenant l'enclos qui montrait une grande concentration de structures et une partie de sa périphérie. Le but principal de la fouille, tel que défini dans la prescription du SRA, est de caractériser l'organisation et la datation de l'établissement rural gaulois mis au jour, tout en le replaçant dans son contexte régional et extra-régional.
La fouille, menée par l'Inrap, a débuté le 1er août 2022 et doit se terminer à la fin du mois d'octobre. Huit à dix membres de l'Inrap sont mobilisés sur ce chantier. Lors du décapage, près de 700 structures en creux (fosses, fossés, trous de poteaux) ont été mises au jour. La fouille s'est concentrée sur les fossés formant l'enclos et sur les nombreuses structures découvertes, afin de comprendre leur organisation et leurs liens, pour pouvoir déterminer leur chronologie et leur fonction.
La localisation du site n'est pas dénuée d'intérêt. Si elle se trouve aujourd'hui à la conjonction de trois départements, cette situation correspondait également, à l'époque gauloise, aux limites de trois cités armoricaines : celles des Vénètes, des Riedones et des Namnètes. En l'état actuel de la fouille, l’essentiel des découvertes porte sur une exploitation agricole du second âge du Fer. Sa datation du IIIe siècle à la conquête romaine correspondant à un site actif sur environ 250 ans. Les traces d'une sépulture circulaire de l'âge du Bronze (entre 2200 et 800 avant notre ère) ont également été mises au jour sur le périmètre.
Structures et mobilier, témoins d'activités
En dehors des fossés qui délimitent différents espaces, des trous de poteaux ont permis d'identifier des bâtiments . Si le chaume des toitures et la terre dans laquelle étaient constitués les murs ont globalement disparu, des restes de matériaux ont été préservés. Un incendie est manifestement intervenu sur au moins une partie du site qui a "cuit" la terre d’une paroi en clayonnage. Cette technique correspond à la construction d’une paroi en claies de branchages entrelacés entre des piquets de bois, enduites par la suite d’une terre argileuse pour former une paroi d’une dizaine de centimètres d’épaisseur. Les empreintes des branches se lisent encore dans les fragment de la terre cuite lors de l'incendie.
Un incendie a permis de préserver en la "cuisant "un fragment de mur en terre ©DRAC Bretagne
Le mobilier découvert témoigne de la diversité des activités : textile (une fusaïole pour le filage à la main, un peson pour le métier à tisser), métallurgique (scories, probablement issues d'une forge). Plusieurs céramiques correspondent à différentes activités domestiques. Des plaques de cuisson en argile cuite ont été identifiées. Disposées sur les braises du foyer elles permettaient de procéder à une cuisson indirecte des aliments. Des tessons d'amphores illustrent les échanges commerciaux entretenus avec l’Italie avant la conquête romaine, avec l’importation de vin.
La diversité de facture et d’usage des céramiques découvertes sur site sera étudiée par un céramologue dans les mois qui suivront la fin de la fouille ©DRAC Bretagne
Pour en savoir plus
La ferme gauloise de Pipriac correspond à une unité de vie et d'exploitation rurale bien plus répandue qu'on ne le pensait en Armorique et dans le reste de la Gaule. Les études complémentaires menées dans les mois qui suivront la fin du chantier contribueront à mieux connaitre le mode de vie et l’organisation gauloise du territoire, et à rapprocher et comparer cet établissement avec ceux découverts à Quimper (Finistère), Saint-Sauveur-des-Landes, Theix-Noyalo, Saint-Jouan-des-Guérets, Vitré, Corps-Nuds (reconstitution du site en illustration d'en-tête), Ossé ou Argentré-du-Plessis (Ille-et-Vilaine)
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