Le projet de Mailly pour Toulon : un récit sur la modernité
Jean de Mailly reçoit des consignes très strictes du M.R.U. et de la commission des sites pour l'élaboration du nouveau projet :
- Réduire les délais de reconstruction du front de mer car les sinistrés attendent depuis déjà trois ans le début des travaux. - Limiter les expropriations. - Créer une nouvelle traversée en bordure du centre-ville dans le sens ouest-est en ménageant des percées vers la mer. - Prévoir la création du nouveau quartier du Port-Marchand. - Privilégier dans les immeubles, la vue sur la rade. - Conserver la position de la mairie d'honneur sur le quai (les services administratifs pouvant se situer dans un bâtiment annexe) qui devra garder sa fonction de promenade.
Plan du projet de Mailly
Pour répondre à ce programme, de Mailly reconduit l'équipe d'architectes d'opération mise en place par Madeline : Gaston Petit, Lucien Barbé, Maurice Leclercq, Guy Malenfant, Jacques Berthelot, Henri Bertrand-Arnoux, Jules Roustan, Bernard Noël, Jacques Le Barbe, et choisit comme architecte-adjoint, un ancien camarade de classe, l'architecte varois Serge Mikélian, Grand Prix de Rome, qu'il charge de l'aménagement du quartier du Port-Marchand.
Tout en répondant aux exigences du M.R.U., l'équipe propose un projet novateur où s'appliquent les principes avant-gardistes émis par les Congrès internationaux d'architecture moderne (C.I.A.M.) pour la création des nouveaux quartiers, tout en prenant soin de ne pas bouleverser la structure urbaine ancienne du centre-ville.
Le nouveau quartier du Port-Marchand
Maquette présentant le projet global de de Mailly et Mikélian pour la reconstruction de Toulon
Il s'organise selon les nouveaux principes d'aération du tissu urbain issus de la Charte d'Athènes. Mikélian réalise un ensemble d'immeubles, formé de tours et de barres détachées de l'alignement sur rue et implantées librement en fonction de l'ensoleillement et de l'orientation des vents dominants. L'architecte prévoyait, dans son projet d'origine, une implantation des immeubles en bordure de bassins artificiels reliés à la mer, créant ainsi une marina.
La reconstruction du port
Au sud du centre ancien, de Mailly élargit à vingt mètres l'ancienne rue de la République qui n'en faisait que huit. Cette nouvelle avenue, ample et rectiligne, qualifiée dans le projet de "futur grand boulevard touristique" devait être unifiée et aérée par la suppression des anciens îlots d'immeubles, situés du côté nord, remplacés par des immeubles neufs, semblables à ceux de la Frontale. Au centre de ces derniers était prévu l'aménagement d'une place au tracé régulier qui ouvrait à l'est sur une tour monumentale de vingt-quatre étages regroupant, en partie basse, le centre administratif municipal, puis au centre, des étages d'appartements de luxe, et en partie haute, un hôtel de prestige. En face, du côté sud, la mairie d'honneur, reconstruite à son emplacement d'origine sur le quai, devait être reliée au centre administratif par une passerelle couverte, aménagée au dessus de l'avenue, qui permettait par ailleurs de rompre la perspective linéaire de cette percée.
Cet ambitieux projet, ramené à l'échelle du budget de la ville, n'a pas été réalisé dans sa totalité.
Dès sa présentation, ce projet est salué par la profession comme une réussite exemplaire pour la Reconstruction française, car il synthétise les grandes aspirations urbanistiques et architecturales encouragées par le M.R.U. Grâce aux propositions novatrices émises par de Mailly et Mikélian, la ville de Toulon est considérée dans les années 1950 comme un modèle de réussite urbaine et architecturale.
En 1951, au Salon des arts ménagers, vitrine nationale des innovations techniques, dans le cadre de l'exposition sur l'habitation organisée par le M.R.U., Toulon s'affiche comme la réalisation phare du moment à côté de la Maison Coque, conçue par l'ingénieur Jean Prouvé et de la reconstruction du Havre, par Auguste Perret (ce dernier secteur a été inscrit depuis 2005 sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO). Une maquette grandeur nature, présentée sous le nom d'Unité d'Habitation de Toulon, en référence à celle de Le Corbusier pour Marseille présentée un an plus tôt au même salon, reproduit sur trois niveaux un fragment d'immeuble incluant un rez-de-chaussée, un entresol et un étage.
A l'intérieur, le public parisien peut visiter un appartement entièrement aménagé par des artistes et décorateurs emblématiques du Mouvement Moderne, tous membres de l'Union des artistes modernes (U.A.M.). Charlotte Perriand (qui vient de collaborer également aux aménagements des appartements de l'Unité d'habitation de Marseille) a conçu le mobilier de la salle à manger et du salon en collaboration avec Pierre Jeanneret, cousin de Le Corbusier ; au mur est présentée La Danse de Fernand Léger, datée de 1942 ; les luminaires et le bureau d'écolier avec sa chaise sont de Jean Prouvé.
A l'image des valeurs progressistes en matière de confort du logement apportées par de Mailly dans ses immeubles, Charlotte Perriand propose un mobilier fonctionnel aux formes simplifiées et sans décor. Cet ensemble conçu dans un style moderne, franc et lumineux révèle "une nouvelle manière d'habiter". Dans un commerce restitué au rez-de-chaussée, est présentée la maquette du projet global de de Mailly et Mikélian pour la reconstruction de Toulon, ainsi qu'une maquette de la future tour monumentale du centre administratif reliée à la mairie d'honneur.
Cette mise en scène magistrale du projet témoigne de l'impact national qu'a eue la reconstruction de Toulon dans les années 1950. En réussissant la synthèse entre logement de masse et confort ménager, de Mailly fait de Toulon le laboratoire de la modernité. Pendant cette même année 1951, ce projet reçoit le Grand Prix d'Honneur à la Triennale de Milan, récompense tout à fait exceptionnelle, qui est la seule obtenue par la France à ce salon international de l'architecture. Par la suite ce projet sera diffusé par de nombreuses revues d'architecture, françaises et étrangères.
Photographie en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Détail sur la maquette présentant le projet global de de Mailly et Mikélian pour la reconstruction de Toulon. Les immeubles du nouveau quartier du Port-Marchand étaient prévus entre des bassins artificiels pour créer une marina.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Entrée de l’exposition de l’habitation organisée par le M.R.U. Vue de la maquette, échelle 1, de l’Unité d’habitation de Toulon.
Photographie en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand. Le mobilier conçu par elle-même en collaboration avec Pierre Jeanneret. Le bahut possède des façades en stratifié de couleur rouge. Les luminaires de type "potence" sont de Jean Prouvé. A l'extrémité droite, le passe-plat.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand. Le mobilier conçu par elle-même en collaboration avec Pierre Jeanneret. Le bureau et sa chaise "maternelle" sont de Jean Prouvé. Le luminaire probablement de Pierre Guariche.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand. Le mobilier conçu par elle-même en collaboration avec Pierre Jeanneret. Le salon aménagé avec les chauffeuses "ciseaux" de Pierre Jeanneret, datées de 1949 et diffusées par Knoll International. Au mur, "La Danse" de Fernand Léger, datée de 1942. Luminaire "potence" de Jean Prouvé.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand. Le mobilier conçu par elle-même en collaboration avec Pierre Jeanneret.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand. Le mobilier conçu par elle-même en collaboration avec Pierre Jeanneret.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des arts ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Présentation d'un appartement situé dans la maquette, échelle 1 de l'Unité d'Habitation de Toulon. L'aménagement est réalisé par Charlotte Perriand. Le mobilier conçu par elle-même en collaboration avec Pierre Jeanneret.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des Arts Ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Visite de la maquette présentant le projet global de de Mailly et Mikélian pour la reconstruction de Toulon. L'architecte de Mailly et le ministre Eugène Claudius-Petit en deuxième et troisième position en partant de la gauche.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des Arts Ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Vue générale de la maquette présentant le projet global de de Mailly et Mikélian pour la reconstruction de Toulon. A l'arrière une photographie en noir et blanc du port détruit.
Photographies en noir et blanc. Paris. Grand Palais. Salon des Arts Ménagers, février-mars 1951. Exposition de l'Habitation organisée par le M.R.U. Vue générale de la maquette de la tour monumentale du centre administratif reliée à la mairie d'Honneur par l'enjambement.