Comment lui dire adieu ? L’éternelle Françoise Hardy, légende de la chanson française, s’est éteinte le 11 juin 2024, à l’âge de 80 ans.
Jeune fille timide et réservée, Françoise HARDY grandit auprès d’une mère célibataire, dans ce Paris des années 1960 où la jeunesse rêve d’ailleurs, et bien souvent d’Amérique. Comme tous les garçons et les filles de son âge, elle écoute la musique qui vient de l’autre côté de l’Atlantique et dont elle rejoue les accords sur sa guitare, reçue en cadeau pour l’obtention de son baccalauréat. Aux côtés de Sheila, de Sylvie Vartan, de Johnny Halliday et de tant d’autres, elle aussi est une chanteuse « yé-yé ». Pourtant, sa jeunesse à elle, son temps des copains et de l’aventure, a déjà ce ton si particulier, cette conscience que « le temps de l’amour, c’est long et c’est court, ça dure toujours, on s’en souvient ». Avec ses chansons tout en douceur et en mélancolie sur les aléas de l’amour et le temps qui s’enfuit, Françoise HARDY impose déjà sa marque.
Au cours d’une carrière qui s’étend sur plus d’un demi-siècle, elle parvient à se faire une place à part dans le cœur des Français et dans le panthéon de la chanson française. Pour elle, la chanson est un art élevé, à la fois exigeant et populaire, capable de parler au cœur de toutes et de tous, par-delà les générations et les origines. Chanter est la grande affaire de sa vie. C’est aussi parfois une source d’angoisse et d’insatisfaction, qui la pousse très tôt à délaisser la scène. Elle privilégie le travail en studio où, patiente et virtuose, elle sait ciseler cet accord subtil et mystérieux d’un texte et d’une mélodie, pour donner naissance à des chansons qu’elle voudrait toujours intemporelles, son véritable idéal esthétique. Et c’est aujourd’hui le legs qu’elle nous fait, avec « Le temps de l’amour », « La maison où j’ai grandi », « Mon amie la rose », « Parlez-moi de lui », « Comment te dire adieu », « Message personnel », « Partir quand même », et tant d’autres chansons que nous n’avons pas fini d’écouter et de fredonner.
Françoise HARDY écrit et compose, pour elle et pour d’autres, tout en considérant que la chanson peut aussi être un artisanat collectif. Qu’elle interprète les textes et les musiques de Patrick Modiano, de Serge Gainsbourg, de Michel Berger, de Michel Jonasz, ou encore de la musicienne brésilienne Tuca, sur l’album La Question (1971), qui restera l’un de ses favoris, c’est toujours la douceur de sa voix et la pureté de son phrasé qui en font de véritables chefs-d’œuvre.
Elle a beau détester le mot comme l’idée, Françoise HARDY est une icône. Avec son image de jeune femme rêveuse et littéraire, sa silhouette androgyne et sa manière de porter des créations de Courrèges ou de Paco Rabanne, elle ne laisse personne indifférent. Et de Mick Jagger à David Bowie, de Bob Dylan, qui lui dédicace la pochette d’un de ses albums, à Etienne Daho, qui voit en elle un modèle et une idole, elle est admirée dans le monde entier.
Toujours proche de son public, elle partage aussi bien ses joies que ses peines, avec un mélange de discrétion et de franchise. Le bonheur d’être la mère de Thomas, la passion tourmentée qu’elle vit avec Jacques Dutronc, son goût pour l’astrologie, ses colères, ses combats, ses douleurs, sa dignité face à la maladie.
Françoise HARDY est entrée dans notre vie il y a plus de soixante ans. Elle ne nous quittera jamais car, comme le chantait Charles Trenet, « longtemps après que les poètes ont disparu, leurs chansons courent encore dans les rues ».
J’adresse toutes mes condoléances à son fils Thomas, sa famille, ses proches et à toutes celles et ceux qui, comme moi, aimeront toujours Françoise HARDY.
Rachida DATI,
Ministre de la Culture