Le ministère de la Culture et l’association Joseph Déchelette ont eu le plaisir vendredi 15 juin, jour de lancement des Journées nationales de l’archéologie, de remettre le prix européen d’archéologie Joseph Déchelette à l’archéologue Sasja van der Vaart-Verschoof, docteur de l’université de Leyde (Pays-Bas).
La remise du prix s’est déroulée dans la bibliothèque du musée Joseph-Déchelette au musée municipal de Roanne. Joseph Déchelette, savant né à Roanne en 1862, disparu prématurément sur le front de la Grande Guerre en 1914, fut l’un des fondateurs de l’Archéologie européenne.
Le prix créé en 2016 et remis tous les deux ans vise à mettre en avant les travaux d’un jeune archéologue, en le soutenant au moment critique de sa carrière après la soutenance de sa thèse de doctorat. À l’issue d’un appel à candidatures lancé à l’automne 2017, le jury, réuni le 25 avril dernier, a dû départager trente-six candidats émanant de dix pays.
Le jury a décidé à l’unanimité de décerner le prix à Sasja van der Vaart-Verschoof, docteur de l’université de Leyde pour sa thèse soutenue en 2017 à l’université de de Leyde (Pays-Bas) et déjà publiée. Son travail de recherche renouvelle l’étude des débuts de l’âge du Fer (IXe – VIIe siècles avant notre ère) en proposant une analyse originale des rituels funéraires de l’élite qui apparaît à cette période sur une vaste portion du territoire européen (le domaine dit « hallstattien » et ses marges). Menée dans une perspective résolument européenne, cette recherche montre que l’émergence de l’élite s’appuie sur des relations régulières à l’échelle inter-régionale. Avec le soutien du prix, Sasja van der Vaart-Verschoof se propose d’élargir son enquête dans une approche pluridisciplinaire afin de préciser la nature des liens entre les membres de cette aristocratie qui imprime une vitalité nouvelle aux régions concernées en orientant durablement leur développement socio-économique.
La lauréate s’est vu remettre un chèque de 10.000 €, émanant de l’association Joseph-Déchelette, fondatrice du prix, et de plusieurs de ses partenaires : le ministère de la Culture associé à l’établissement public de coopération culturelle de Bibracte et le Römisch-germanisches Zentralmuseum (Mayence). D’autres partenaires du prix gratifient la lauréate de séjours de recherche dans leurs locaux.
Aux côtés de la lauréate du prix, le jury du prix a souhaité distinguer deux candidates en leur attribuant une mention spéciale :
- Joëlle Rolland (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) pour ses recherches doctorales qui renouvellent notre compréhension des parures en verre caractéristiques du second âge du Fer (IIIe – Ier siècles avant notre ère) dans le domaine celtique.
- Gadea Cabanillas de la Torre (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et université autonome de Madrid) pour ses recherches doctorales sur les céramiques à décor estampé du Ve siècle avant notre ère en Europe centrale et occidentale.
Joseph Déchelette
Né à Roanne en 1862, Joseph Déchelette a mené de front ses recherches savantes d’archéologie avec sa carrière de capitaine d’industrie dans le textile. Après des travaux de jeunesse dans sa province natale du Forez, ce sont ses recherches sur la céramique gallo-romaine puis sur les sites fortifiés de la fin de l’âge du Fer (à partir des fouilles de l’oppidum de Bibracte, en Bourgogne) qui lui valurent la reconnaissance du monde savant à l‘échelle européenne. Il est principalement connu pour les quatre volumes parus de son Manuel d’archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine resté inachevé. Enrôlé à sa demande dans une Unité combattante alors qu’il avait 52 ans, il tomba sur le front dès le 4 octobre 1914.
Son activité professionnelle dans l’industrie de la cotonnade roannaise a fortement influencé ses recherches savantes, contribuant à l’originalité de son regard au sein d’un monde académique habituellement plus replié sur ses études. En outre, sa capacité de synthèse exceptionnelle lui permit de véritablement inventer l’archéologie protohistorique en écho à sa conviction, originale dans le monde académique, « que la culture marche toujours sur les traces de l'économie et ne se maintient qu'au prix des échanges ».