Madame l’ambassadrice du Danemark, chère Anne Dorte Riggelsen
Monsieur le Président du Centre des Monuments Nationaux, Cher Philippe Bélaval,
Monsieur l’architecte en chef des monuments historiques, cher Christophe Bottineau,
Monsieur le Président des Fondations Velux, cher Lars Kann-Rasmussen,
Monsieur le Président de Velux France, cher Michel Langrand,
Mesdames et messieurs, chers amis,
Comment ne pas être saisi par l’émotion lorsque l’on se tient sur cette « tribune des reliques », édifiée par un homme qui rendait la justice sous un chêne il y a 750 ans et dont le peuple a écrit la légende dorée ? Comment ne pas s’émouvoir devant ces murs qui gardent la mémoire des siècles de notre histoire, qui ont vu se succéder des générations de Rois de France et qui portent la marque de la Révolution ? Ce monument, c’est un livre d’histoire en images.
Sur cette tribune aujourd’hui, je ressens avec une vivacité particulière la responsabilité qui est la nôtre et tout particulièrement celle de mon ministère. Nous sommes les dépositaires de ce lieu, de cette histoire et il nous appartient de leur permettre de traverser encore bien des siècles pour être accessibles à tous.
C’est ici qu’est née, sous l’impulsion de Victor Hugo et de l’architecte Jean-Baptiste Lassus, ce qui est aujourd’hui une des missions fondatrices du ministère de la Culture et de la Communication : la politique de conservation et de restauration des monuments historiques.
S’indignant de ce que « chaque jour quelque vieux souvenir de la France s’en va avec la pierre sur laquelle il était écrit » Victor Hugo s’est battu, à la tribune de l’Assemblée nationale, dans des pamphlets, pour que l’ouvrage collectif de ceux qui nous ont précédés puisse nous survivre. Pour que ce lieu conçu pour l’élévation de l’âme, hier réservé à quelques-uns, soit aujourd’hui une source d’émancipation pour tous. On peut le lire dans les pages de Notre-Dame-de-Paris : « Le livre architectural n’appartient plus au sacerdoce, à la religion, à Rome ; il est à l’imagination, à la poésie, au peuple. »
C’est le début de la passion française pour le patrimoine et les monuments historiques. Près de deux siècles après Victor Hugo, c’est la même passion qui nous anime : permettre à chacun d’entrer et de « demeurer, pour le dire comme Aragon, dans la beauté des choses » qui « est à tout le monde, à vous, à moi, à nous tous », ainsi qu’Hugo aimait à le clamer à la tribune.
Je me réjouis d’être parmi vous aujourd’hui. C’est un plaisir d’autant plus grand que ce projet s’inscrit pleinement dans les priorités que j’ai données à mon action : l’accès à la culture et le rayonnement culturel de notre pays. Et je tiens à saluer la mobilisation de tous au service de ces priorités.
Grâce à ce remarquable travail de restauration, la beauté du lieu demeure intacte pour des générations de visiteurs. Témoin de notre histoire et du génie humain, ce monument bâti pierre par pierre par le peuple a été rendu au peuple puisqu’il se trouve sous la responsabilité du Centre des monuments nationaux, dont je salue le Président..
3ème monument national le plus visité après l’Arc de Triomphe et le Mont Saint-Michel avec plus d’un million de visiteurs par an, dont trois quarts d’étrangers, la Sainte-Chapelle est un de nos plus grands atouts touristiques. Cette restauration contribue à renforcer le rayonnement culturel de notre pays pour mieux nous rappeler que c’est pour sa culture, son patrimoine, ses musées et ses monuments que la France demeure, en 2014, la première destination touristique mondiale.
Cette restauration, c’est aussi une façon de présenter toujours mieux notre patrimoine à nos visiteurs, c’est leur offrir le plus beau pour une visite marquante. Ici, nous pouvons encore améliorer l’accueil des visiteurs pour éviter les longues files d’attente. J’ai d’ailleurs saisi récemment la Garde des Sceaux pour travailler à la création d’un parcours de visite amélioré avec la Conciergerie, autre grand monument populaire, qui se trouve à quelques mètres d’ici, dans le Palais de Justice.
A travers cette restauration, ce sont aussi les métiers du patrimoine qui sont à l’honneur aujourd’hui : des métiers d’histoire et d’avenir, à très haute valeur ajoutée.
Je tiens à saluer toutes celles et ceux qui se sont mobilisés pendant 7 ans pour restaurer ces vitraux : l’administratrice de la Sainte Chapelle, Delphine Samsoen, ses prédécesseurs et leurs équipes, le Centre des Monuments Nationaux, les architectes des monuments historiques, les restaurateurs, maîtres verriers, conservateurs et tous les artisans mobilisés sur ce magnifique chantier. Un grand bravo à tous pour votre rigueur et votre efficacité. Sachez que nous vous admirons ! 7 ans c’est très court, comparés aux 30 années de chantiers de la restauration de 1840 !
Ce monument témoigne du savoir-faire passé et présent de notre nation, il permet aux artisans et ouvriers d’hier de dialoguer avec ceux d’aujourd’hui. Il est l’illustration de l’excellence française en matière de restauration et de conservation. Un savoir-faire et une excellence cultivés au cœur de nos écoles et de nos entreprises, qui font de la France une référence en matière de restauration, et de notre pays l’un des premiers exportateurs du savoir-faire patrimonial.
C’est pour cela que dans le temps fort que j’ai consacré à la jeune création au printemps et qui se poursuit jusqu’au début de l’été, j’ai voulu qu’un groupe de travail se saisisse de ces modèles de formation, fondés sur le compagnonnage, la transmission des savoir-faire et le lien intergénérationnel. Car ce lien jamais interrompu entre la création d‘hier et celle de demain, est ce qui fait de notre pays une grande nation culturelle, au sein de laquelle chacun peut trouver sa place.
Cette inauguration qui nous réunit aujourd’hui n’aurait bien sûr pu voir le jour sans le soutien décisif des mécènes. Je tiens à saluer les Fondations Velux et Velux France, distingués en qualité de Grand mécènes par le ministère de la Culture et de la Communication, dont nous avons pu prendre la mesure de l’engagement à travers les nombreux chantiers qu’ils ont soutenus précédemment, tels que le Parlement de Bretagne ou le couvent de La Tourette.
Ce partenariat est à mes yeux une des belles réussites de la loi mécénat dont nous avons fêté les 10 ans il y a peu. Grâce à un dispositif fiscal parmi les plus incitatifs au monde, la France est devenue une championne du mécénat culturel avec environ 1 milliard d’euros par an de dons pour la culture, et plus de 5 millions de foyers - et de très nombreuses entreprises - mobilisés au service de la culture. Aujourd’hui, les particuliers, les petites et moyennes entreprises, de France et d’ailleurs, sont de plus en plus nombreux à soutenir des projets culturels et à contribuer ainsi directement au dynamisme du tissu artistique et culturel de notre pays.
Bien plus qu’un acte d’argent, c’est le signe de l’engagement de la société civile et de la place de la culture au cœur des pratiques citoyennes, autour d’un objectif qui n’est pas de se substituer à l’investissement public mais de renforcer cette citoyenneté culturelle dont nous sommes si fiers.
Ce qui n’est pas sans rappeler l’époque où l’humanisme naissant était aussi incarné par les actes de mécénat en faveur de la culture et de ses artistes.
C’est cela, pour moi, être ministre de la Culture aujourd’hui : favoriser l’accès aux chefs d’œuvres de l’humanité, faire en sorte que ce haut lieu autrefois réservé à quelques-uns continue à être accessible par tous, que ce livre d’histoire en images puisse être partagé, discuté, commenté par l’ensemble de nos concitoyens. Mais c’est aussi savoir miser sur ce qui fait la grandeur de notre pays, son patrimoine qui attire des dizaines de millions de touristes chaque année. C’est aussi pouvoir compter sur le talent et le savoir-faire de celles et ceux qui sont les héritiers des bâtisseurs de cathédrales et des maîtres verriers. C’est enfin pouvoir mobiliser au service de la culture, l’ensemble des forces vives de notre pays, je pense tout particulièrement aux acteurs économiques. C’est par là que nous pourrons mettre fin à la morosité et au dénigrement auxquels nous cédons trop facilement : ce projet, comme beaucoup de ceux que nous portons, montre bien que notre pays a des ressources, qu’il peut compter sur des talents et des lieux d’exception, qu’à la grandeur du temps des cathédrale répond celle de la France d’aujourd’hui.
Et ce n’est pas ces vitraux qui nous contrediront, eux dont Georges Duby nous dit qu’ils incarnaient une idée nouvelle dans l'Europe des cathédrales, celle du bonheur : « Dans le brasier de la rose gothique flambent en fait la joie et la volonté de vivre. »
Je vous remercie.