Il existe, depuis toujours, un lien imaginaire profond entre la nuit et le musée. En un
sens, le musée, lieu souvent silencieux et secret, n’est pas sans affinités avec la
nuit. Les objets y semblent parfois comme en sommeil, attendant notre regard pour
s’éveiller à une deuxième vie, par-delà les siècles, parfois même les millénaires… Et
nous attendent, si je puis dire, de belles choses « au musée dormant ».
Faire entrer la nuit dans le musée, c’est aussi une manière de le rendre familier, de
le libérer de son apparat, d’en faire comme une maison, une maison de la mémoire.
Ce n’est plus seulement l’un de ces lieux publics que l’on fréquente dans la journée
aux heures ouvrables, mais le privilège d’une invitation à l’émerveillement, chez des
hôtes bienveillants et prestigieux.
Oui, ouvrir l’accès aux musées pendant la nuit, c’est une manière exemplaire de
briser le plafond de verre de l’intimidation sociale. C’est une manière d’allier les
prestiges des collections avec « le calme enchantement du mystère » de la nuit pour
reprendre le fameux air de Jean-Philippe RAMEAU. Et ce sont là, je crois, les
raisons, profondes parce que liées à nos rêves, pour lesquelles, depuis six ans
qu’elle existe, la Nuit des Musées rencontre un succès considérable auprès de tous
les publics.
Mais une autre grande raison, je crois, du succès de cette manifestation, c’est sa
dimension européenne, au sens très large du terme, de l’Atlantique à l’Oural, pour
reprendre une expression célèbre. Car il se joue là une sorte de magie
supplémentaire : comme si l’ouverture de tous ces musées au même moment, les
faisait tous se réunir et communiquer en un espace unique, et créait une sorte de
« Musée imaginaire » et universel, en tout cas aux proportions du continent. C’est
comme le rêve anticipé d’une union et presque d’une communion des âmes grâce
au partage des cultures et aux correspondances des mémoires. Et puis, la culture
européenne, c’est aussi celle des diverses langues qui en composent la polyphonie,
mais aussi de chacune des langues régionales qui font la richesse de chacun de
nos pays, notamment en France. À cet égard, je me réjouis que, pour la 3e année
consécutive, la Nuit offre au public des visites à plusieurs voix, en alsacien, en
basque, en breton, en occitan… pour ne citer que quelques-unes de ces langues de
France que nous avons en partage. La France qui, vous le savez, est à l’origine de
cette Nuit des musées à l’initiative du ministère de la Culture et de la
Communication (en 2005), est particulièrement heureuse et fière de son succès
dans toute la diversité de nos patrimoines.
Ainsi donc, au soir du samedi 15 mai – qui est, vous le savez, la « Journée
internationale des musées » – pas moins de 3000 musées, publics et
privés main dans la main, dans 40 pays européens, ouvriront leurs portes
aux publics, grâce, une fois de plus et je m’en réjouis, au Conseil de
l’Europe et à l’UNESCO qui a lancé l’année international du
« rapprochement des cultures ».
J’ai souhaité d’ores et déjà, un peu comme un calendrier de l’avent –
toutes proportions gardées – , annoncer cette grande Nuit européenne des
Musées, pour prendre date, mais aussi et surtout pour remercier toutes
celles et tous ceux qui vont contribuer à faire de cette nouvelle édition un
moment marquant pour chacun. J’ai répondu, pour cela, à l’invitation du
Musée de la Chasse et de la Nature et je remercie son directeur
[M. Claude d'ANTHENAISE], ainsi que le président et le directeur de la
Fondation de la Maison de la Chasse et de la Nature [MM. Christian de
LONGEVIALLE et Yves d'HÉROUVILLE], de nous y accueillir, et de nous
faire goûter, en avant-première, le charme nocturne de leurs expositions
rénovées et réaménagées, qui font une place de choix à la création. J’ai
trouvé que ce lieu original, repensé de manière novatrice, était une façon
intéressante d’aborder le thème du « développement durable » qui sera
l’un des axes forts de cette 6e Nuit des Musées.
Partout, les musées ont rivalisé d’imagination pour proposer des
programmations inventives. Ici, une exposition, une visite théâtralisée ou
un atelier ; là, une nuit du conte, un concert ou une projection de film ;
ailleurs, plus inattendues, des installations et des dégustations
gastronomiques. Tous ces événements entreront en résonance, le temps
d’une Nuit, avec les collections permanentes des musées.
C’est pourquoi je souhaitais vous remercier tous, chacune des personnes,
des institutions, des collectivités et des associations qui se sont mobilisées
pour faire de cette « Nuit 2010 » une fête de la culture sous toutes ses
formes, pour tous et pour chacun. Je n’oublie pas les généreux mécènes
qui ont rendu cet événement possible, notamment NEUFLIZE OBC, ainsi
que NEUFLIZE VIE à qui nous devons le très beau visuel de l'opération,
cette éclipse qui met en scène la rencontre entre les mondes du jour et de
la nuit, un peu comme « le soleil qui a rendez-vous avec la lune »…
Quant à la science, elle conjuguera ses atouts et ses attraits avec ceux de
la culture, dont elle est évidemment une partie intégrante, en particulier
grâce à une exposition organisée par le Centre national d’études spatiales
(CNES), qui offrira son imaginaire et ses connaissances à une quarantaine
de musées français. J’y ajoute les manifestations indissociablement
artistiques et scientifiques qui auront lieu sur le site de la Villette
d’Universciences et qui montrent que l’univers numérique ouvre, comme la
nuit, sur des espaces infinis.
Les « médiateurs de proximité » que constituent nos musées vont pouvoir
jouer un rôle d’autant plus considérable dans l’initiation aux arts et à la
culture, que leur entrée est libre et gratuite, selon le principe fondateur de
la Nuit. La gratuité est un « levier d’Archimède » qui aide à faire céder les
blocages et les inhibitions face à l’aspect parfois un peu impressionnant et
même intimidant, de ces temples de la culture.
Ce principe de la gratuité participe pleinement de notre ambition d’une
« culture pour chacun », qui nous a conduit à la mettre en place dans tous
les musées et monuments nationaux de France, pour chacun des jeunes
de moins de 26 ans résidant légalement sur le territoire de l’Union
européenne. Car la culture ne doit pas être réservée à quelques-uns,
toujours les mêmes, mais s’ouvrir à tous les horizons, quels que soient les
origines sociales et culturelles de chacun.
Tout est donc réuni pour faire de cette 6e Nuit européenne des musées un
immense succès. Je voudrais donc enfin remercier nos partenaires
médias, présents ce soir : le groupe FRANCE TÉLÉVISIONS, la chaîne
TV5 MONDE, ainsi que le journal MÉTRO, qui sauront donner à
l’événement tout l’écho nécessaire.
Je vous donne donc rendez-vous le samedi 15 mai au soir, aux quatre
coins du continent européen, je vous dis « Save the date ! », et vous invite
à la découverte des mystères de la Nuit et du « calme enchantement » de
nos musées.
Je vous remercie.
Discours de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé à l’occasion du lancement de la 6e Nuit européenne des musées
Monsieur le Président de la Fondation et du musée de la chasse et de la nature,Christian DE LONGEVIALLE,Monsieur le directeur du musée de la chasse et de la nature, Clauded'ANTHENAISE,Monsieur le directeur de la Fondation de la maison de la Chasse et de la Nature,Yves d'HÉROUVILLE,Monsieur le directeur général des patrimoines, Philippe BELAVAL,Madame la directrice, chargée des musées, Marie-Christine LABOURDETTE,Mesdames et Messieurs,Chers amis de la Nuit des Musées,
Partager la page