Cher Jean-Claude Houdinière,
« Tous au théâtre ! » : tel est le mot d’ordre que vous lancez à l’occasion
de la cérémonie des Molières en 2007. Depuis maintenant près de 40 ans,
vous contribuez au rayonnement du théâtre en France dans un souci
constant de le rendre accessible au plus grand nombre. Comédien,
directeur de théâtres, producteur de spectacles, vous avez oeuvré tout au
long de votre carrière avec passion et générosité, en faveur du
rapprochement des théâtres privé et public.
Formé au Cours d’Art Dramatique Escande-Dussane, puis lauréat du
Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris, vous
commencez très tôt une carrière de comédien. Homme de conviction,
profondément engagé dans le devenir de votre profession, désireux de
défendre le statut des artistes, vous êtes nommé Secrétaire Général de la
Mutuelle Nationale des Artistes où vous assumerez les missions qui vous
sont confiées avec responsabilité et passion.
Votre désir le plus profond est la réconciliation du théâtre privé et public,
c’est l'engagement de votre vie, c’est votre horizon d’attente. Il y a presque
40 ans déjà, alors que Loïc Volard et vous-mêmes êtes co-directeurs du
Théâtre de l'Athénée, vous écrivez votre premier manifeste en faveur d'un
rapprochement des deux secteurs. Afin d'oeuvrer dans ce sens au sein de
la profession, vous intégrez en tant que membre le Comité Directeur du
Syndicat des Directeurs de Théâtres de Paris. Soucieux de défendre tous
les théâtres et tous les auteurs, vous devenez Président Directeur Général
des Tournées THEATRE ACTUEL et organisez les tournées pour des
grandes compagnies françaises, notamment celle de la Comédie-
Française en Espagne.
C’est le temps des grandes évolutions et l’économie de la diffusion se
transforme : les spectacles sont vendus clef en main, la publicité et la
communication locales sont prises en charge par les acheteurs. Un fossé
se creuse alors entre ceux qui travaillent dans le secteur « public » et ceux
qui travaillent dans le secteur« privé », c’est-à-dire les théâtres privés de
Paris et les tournées. En véritable visionnaire, vous faites partie de ces
acteurs courageux qui décident de mettre fin à cette opposition trop
souvent stérile. Certains metteurs en scène vous suivent, des directeurs de
tous horizons vous accompagnent.
Parallèlement à vos fonctions de directeur de tournées, vous prenez la codirection
du Théâtre Indépendant et du Théâtre de l’Atelier avec Loïc
Volard -votre ami et complice de toujours-, Pierre Franck et Michel
Fagadau. Naissent de multiples collaborations avec les plus grands noms
du théâtre, tels que Beno Besson ou François Billetdoux. Directeur du
Théâtre Municipal d’Orléans, puis co-directeur du CADO – Centre National
de Création d’Orléans –, vous défendez les petites et les grandes formes
de spectacles et vous vous dépensez sans compter pour « amener les
gens au théâtre », ainsi que vous aimez à le rappeler, en organisant une
communication dans tout le département. D’une certaine manière, vous
avez su concilier avec intelligence la création et la diffusion au service du
spectacle vivant.
Depuis 1996, en tant que Président du Syndicat National des
Entrepreneurs de Spectacles (SNES), et Administrateur du Conseil
d’Administration de l’Association pour le soutien du Théâtre Privé, vous
avez défendu, avec passion et détermination, les différentes branches de
la profession. Vous développez les missions du SNES en tant
qu'instrument de liaison entre le secteur privé et le secteur public, vous
promouvez l’action des « tourneurs » dans la circulation des oeuvres
théâtrales. En pionnier, vous souhaitez ainsi mettre en place la possibilité
d'entreprendre de véritables coproductions tourneurs/théâtres
publics/théâtres privés.
De 2006 à 2008, vous avez été le président actif et estimé de l’Association
Professionnelle et Artistique du Théâtre (les Molières). Vous avez
fortement contribué à la promotion du théâtre à la télévision, cette étrange
lucarne qui fut longtemps hospitalière et qui reste un outil formidable de
démocratisation. A cet égard, vous avez défendu la diffusion de formats
courts en début de soirée. Vous avez su redonner pleinement son sens à
la vocation des Molières : construire des passerelles entre le théâtre privé
et théâtre public entre tous les publics, entre tous les spectateurs. Vice-
Président, puis Président en mai 2008 de la Fédération des Employeurs du
Spectacle, vous continuez, avec un sens aigu des responsabilités, à
soutenir une profession que vous avez pour ainsi dire épousée.
Acteur incontournable des entretiens de Valois, situant votre action au-delà
des clivages, vous avez rempli toutes vos fonctions avec engagement,
passion et générosité, mettant votre savoir-faire au service d’une certaine
idée du théâtre dans le paysage de la cité.
Homme de consensus, cherchant à comprendre tous les points de vue,
vous avez été un acteur capital dans le rapprochement du théâtre privé et
du théâtre public. Vous avez oeuvré à votre vie pour la réconciliation de
tous les théâtres, de toutes les formes, de toutes les esthétiques, au
service du plaisir de la scène et du bonheur du public.
Cher Jean-Claude Houdinière, au nom du Président de la République et en
vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons Chevalier de
la Légion d’Honneur.
Cher Patrick Coulombel,
Je ne peux dissimuler mon plaisir de vous voir aujourd’hui à mes côtés et
d’avoir l’honneur de rendre hommage à votre action persévérante. Votre
engagement est de ceux qui s’enracinent dans une fidélité profonde à des
principes éthiques et citoyens d’une grande hauteur de vue. Architecte,
aventurier et humaniste, vous avez parcouru le monde pour aider de
nombreuses populations à reconstruire leur ville et leur vie.
Vous êtes, aux yeux de tous, beaucoup plus qu’un architecte. Votre
parcours riche et éclectique a sans nul doute contribué à cette ouverture
d’esprit qui vous caractérise. Votre formation d’électricien, vos
compétences en gemmologie ou votre spécialisation dans le domaine de
l’architecture navale témoignent d’un parcours complet. Il reflète votre
curiosité insatiable, votre force de travail et votre audace, avec ce slogan
révélateur de votre détermination : « On réussit, on ne tente pas! ».
Professionnel aux multiples facettes, vous êtes aussi, et avant tout, un
architecte. Vos débuts dans le monde de l’architecture sont consacrés à
votre région d’origine, la Picardie – dont vous parlez paraît-il le dialecte !
Vous réalisations sont nombreuses: réhabilitation du lycée professionnel
agricole de Péronne, restructuration du Palais de justice d’Amiens,
réhabilitation du château rouge à Flixecourt et bien d’autres encore. Et l’on
y retrouve toujours votre attachement au patrimoine historique et aux
bâtiments scolaires, là où se construisent les compétences, là où se
façonne l’humain.
C’est en 2001, à la suite des inondations dramatiques subies par le
département de la Somme, que votre trajectoire prend un tournant décisif.
En fondant l’association « Architectes de l’urgence », vous choisissez de
mettre vos compétences au service des populations sinistrées et vous
laissez s’exprimer de manière exemplaire votre engagement et votre
exigence. Vous intervenez la même année lors de l’explosion de l’usine
AZF à Toulouse. L’action des architectes de l’urgence se déploie les
années suivantes à l’étranger, partout où des catastrophes naturelles font
ressentir la nécessité d’un soutien d’urgence adapté. Afghanistan,
Pakistan, Iran, Algérie, Tchad, Mali, Pérou, Bangladesh, Indonésie, Sri-
Lanka : chacun de ces pays a reçu les visites répétées de ces
professionnels d’un nouveau genre, les « architectes-urgentistes ». A
l’écoute des fractures et des failles de la planète, vous inventez un
nouveau mode d’intervention dans les crises qui secouent les pays du sud.
Preuve de l’importance capitale de cette structure inédite dans le paysage
architectural, « Architectes de l’urgence » a été reconnue fondation d’utilité
publique au mois d’août 2007. En outre, le parrainage du ministère de la
Culture et de la Communication vous permet, à vous mais aussi à tous les
membres de la Fondation, de recentrer l’action des architectes vers ce qui
a toujours constitué leur coeur de métier : l’amélioration des conditions de
vie quotidiennes. La mission que vous menez avec courage et abnégation
en Haïti depuis janvier 2010 l’illustre à merveille. « Architectes de
l’urgence » a su rester fidèle, à Port-au-Prince et ailleurs, à ses missions
premières, celle de l’expertise pour l’amélioration des conditions de vie de
chacun, à autrui, celle du dialogue social, celle du respect de la dignité
humaine et de l’environnement, dans le respect des traditions et des
héritages culturels.
Le bilan de votre jeune fondation est impressionnant. Votre action dépasse
l’instant présent et embrasse le temps long en s’étendant, en se
renforcant, en fédérant encore et toujours. Il y a à peine plus d’un mois
s’est tenue à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine une superbe vente
aux enchères au profit de la Fondation des Architectes de l’urgence. Elle a
réuni de nombreux architectes et s’est nourrie de réalisations de vos
illustres pairs -Claude Parent, Dominique Perrault, Shigeru Ban- pour
apporter le soutien de toute une profession à votre engagement. Vous
cherchez, de plus, à perenniser votre action, en formant et en sensibilisant
les futurs architectes. Ce n’est pas seulement une nouvelle conception de
l’architecture que vous avez développée, mais c’est aussi une manière
d’être au monde.
Votre plus grande réussite est d’avoir su proposer un dialogue durable
entre architecture et urgence, deux champs d’action apparemment
contradictoires. Savoir établir un dialogue entre temps court et temps long,
être actif face aux situations de crise, privilégier la rapidité, la simplicité
mais aussi et surtout la qualité : chacun le sait, l’action de l’architecte
urgentiste est vitale car le bâti peut apporter la sécurité et la paix. C’est par
la reconstruction qu’un peuple peut se relever, se réapproprier un territoire
et in fine, réapprendre à vivre. Cher Patrick Coulombel, en mariant qualité
architecturale et engagement humanitaire, vous avez contribué à penser et
à pratiquer différemment votre métier.
Parce que vous êtes un citoyen aux valeurs affirmées, et un acteur de
premier plan au service d’une architecture engagée et solidaires, au nom
du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont
conférés, nous vous faisons, chevalier de la Légion d’Honneur.
Chère Irène Ajer,
Vous êtes une « grande dame » de cette Maison... Votre personnalité est
bien connue des professionnels du théâtre, reconnue pour votre sens du
service public. Vous n’avez cessé d’oeuvrer en faveur de l'art dramatique
en France et dans le monde, participant au rayonnement de l’action du
ministère de la Culture et à l'histoire du théâtre en France.
Après de brillantes études à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, vous
complétez votre parcours déjà riche par une formation théâtrale dans les
établissements français les plus prestigieux : à l'Université Internationale
du Théâtre des Nations, au Cours Simon et Jean Vilar ainsi qu’à
l'expression corporelle Maximilien Decroux.
A 25 ans, toute jeune diplômée, vous franchissez le porche de la rue Saint
Dominique, alors que le ministère de la Culture n’a que 6 ans : vous y
passerez 43 ans de votre vie. Du petit ministère créé par Malraux au
Ministère riche de ses missions et de ses engagements des dernières
décennies, vous allez rencontrer tous les grands « fondateurs » : Gaétan
Picon, Pierre Lemoine, Pierre-Aimé Touchard, Blaise Gautier, François
Wehrlin, Emile Biasini, Guy Brajot, un peu plus tard Michel Guy… à qui
nous venons de rendre hommage hier. En cette période de tous les
possibles, en ces temps « pionniers » de l’action culturelle, vous vous
passionnez pour votre nouveau métier et, en tant que chef du Bureau des
jeunes compagnies et de la création dramatique, vous y verrez grandir,
avec bonheur, Jean-Pierre Vincent, Patrice Chéreau, Ariane Mnouchkine,
Jacques Lassalle, Bernard Sobel et toutes celles et ceux qui, de
génération en génération, forment ce que vous appelez « l’école française
du théâtre ».
Vos débuts sont ainsi marqués par ces moments qui ont fondé l'action et
l'ambition du Ministère. Ayant eu la chance d’être formée auprès de grands
aînés, vous avez toujours été habitée par cette volonté de questionner, de
découvrir, d’agir, vous nourrissant de dialogue si particulier entre le
« théâtre et le Prince » décrit par Robert Abirached.
Et votre parcours s’enrichit peu à peu des nombreuses fonctions que vous
occupez, avec toujours cette même énergie, cette même passion, ce
même dévouement pour l’action publique au service de la culture. Chargée
de mission auprès d’Emile Biasini pour l’aménagement de la côte
Aquitaine, Commissaire général du Festival « Octobre à Bordeaux »,
chargée de mission auprès de Philippe Tiry à l’ONDA (Office national de
diffusion artistique) qui venait de naître, vous devenez directrice de la
Maison de la culture d’Orléans. Vous découvrez alors, avec un plaisir
renouvelé, les principes de l’aménagement culturel du territoire, l’art de la
négociation, le goût du dialogue avec les architectes et les élus.
En 1985, vous rejoignez Pierre Boulez comme administrateur général de
l’Ircam : cette rencontre sera pour vous décisive et façonnera
définitivement votre âme de bâtisseur. Vous avez porté, avec la force et
l’enthousiasme qui vous caractérisent, la restructuration de l’Ircam. C’est
vous, également, qui avez assuré la préfiguration de la Cité de la musique
et du musée de la musique. En chef de projet accomplie, vous avez réussi,
avec une aisance et un savoir-faire qui vous font honneur, la mise en place
du Centre National du costume de scène et de la scénographie à Moulins,
l’un des grands projets prévus par le Président François Mitterrand en
région.
Avec une détermination étonnante, vous menez à bien les projets les plus
périlleux, vous relevez avec succès les défis les plus exigeants. Chef du
service de l’inspection de la DMDTS, lucide sur les exigences imposées
par la modernisation de l’Etat, vous réussissez brillamment, en un an, à
réformer l’inspection pour en faire un outil adapté, rénové et répondant au
mieux aux besoins de l’administration et des partenaires concernés. Vous
êtes ainsi devenue une figure incontournable de l’expertise et du savoirfaire
de l’administration de la Culture de notre pays, de cet « Etat culturel »
parfois décrié, mais souvent admiré en Europe et dans le monde.
En 2008, vous êtes élue Présidente des Molières. Consciente de toutes les
critiques réservées à la Nuit des Molières, et faisant preuve d’une grande
diplomatie, vous décidez de lever le rideau avec une représentation unique
dédiée au public des Molières. Sous votre présidence, vous organisez pour
la première fois la Nuit des Molières à la Maison des arts et de la culture
de Créteil, symbole de l'ouverture à d’autres formes d’expression. Au cours
de votre mandat, vous transformez les procédures de sélection en faveur
du théâtre public, en resserrant le maillage de correspondants en région,
afin de faire émerger de nouveaux talents.
En tant que Présidente de la COPAT (Coopérative de production
audiovisuelle et théâtrale), dont l’ambition est de rendre le « meilleur du
théâtre » accessible au plus grand nombre, vous allez chercher ce public
qui, pour des raisons diverses, ne va pas au théâtre, souffrant de cette
intimidation qui m’a conduit à engager une réflexion au cours des derniers
mois sur les outils et les procédures de notre politique en matière de
démocratisation culturelle. A cet égard, l’offre de visionnage des pièces en
vidéo à la demande sur la Freebox, la création d’un « Théâtre-club »
COPAT pour organiser des projections de films sur grand écran dans des
lieux ne disposant pas de salle de spectacles, la mise en place d’une
chaîne de télévision dédiée au théâtre font partie de vos initiatives
ambitieuses.
Passionnée, vous n’avez cessé de soutenir le théâtre et d’aider les
artistes, vous avez toujours été l’ambassadrice d’un dialogue fécond entre
les différents acteurs du monde de la culture. Vous êtes, très chère Irène
Ajer, une personnalité généreuse, une femme de coeur, une « figure »
-certains disent même une « icône »- de ce ministère.
Chère Irène Ajer, au nom du Président de la République, nous vous
faisons Officier dans l’ordre National du Mérite.
Cher Olivier Schneebeli,
Directeur de la Maîtrise du Centre de musique baroque de Versailles
depuis plus de 20 ans et grand défricheur de répertoire, vous avez donné à
entendre les plus belles pages de la musique baroque. Vous êtes un
artiste généreux, unanimement apprécié par vos pairs et les
professionnels.
Très tôt passionné par la musique de l’époque baroque et plus
particulièrement par le patrimoine français des XVIIème et XVIIIème siècles,
vous vous consacrez tout d’abord à la direction de l’Ensemble Contrepoint
puis à celle de la Maîtrise des Petits Chanteurs de Saint-Louis, avec
lesquels vous mettez en oeuvre de nombreuses productions musicales
baroques. Déjà, en véritable défricheur de répertoire, vous remportez, avec
l’Ensemble Contrepoint, un Diapason d’Or avec la sortie d’un disque
consacré aux Motets et Scènes sacrées de Guillaume Bouzignac, et
participez en 1987 à la création, avec William Christie, du choeur des Arts
Florissants, à l’occasion de la redécouverte de l’Atys de Lully.
Alors que vous étendez vos expériences de direction de choeur (Maîtrise
de Chartres, Conservatoire de Gennevilliers) et de collaboration avec les
plus grands chefs pour des productions lyriques baroques (Rolan, de Lully,
avec René Jacobs), vous êtes choisi par Vincent Berthier de Lioncourt, en
1991, pour diriger Les Pages et les Chantres du Centre de Musique
Baroque de Versailles (CMBV), grâce à vos compétences dans le domaine
de la musique ancienne et dans celui de la formation des voix d’enfants et
d’adultes.
Composé des jeunes chanteurs issus des cursus de formation de la
Maîtrise, ce choeur « à la française » que vous dirigez constitue un cas
unique de recréation des effectifs vocaux tels que l’on pouvait les entendre
à la Chapelle royale de Versailles au début du XVIIIe siècle. Associant les
voix des enfants à celles des adultes, cette formation, à la couleur vocale
unique, permet au public, depuis plus de vingt ans, de redécouvrir le
répertoire sacré ou lyrique, composé aux XVIIe et XVIIIe siècles, à la Cour
de Versailles ou dans les grandes institutions du royaume. Les productions
des Pages & des Chantres sont présentées tant à Versailles qu’en tournée
dans les plus grands festivals et programmations, en France et à l’étranger
(en Chine et en Corée du Sud pour l’année 2011). La discographie de ce
choeur, réalisée en studio ou en concert, remporte les plus grandes
distinctions de la critique (telles que Diapason découverte ou le Prix de
l’Académie du disque lyrique) et contribue à faire connaître à un public
encore plus large les chefs-d’oeuvre du répertoire baroque.
Si vous avez réussi le pari difficile de parvenir à une justesse que l'on ne
rencontre pas souvent chez les choeurs d'enfants et de faire éclore sous la
fragilité apparente de ces voix cristallines leur force éclatante, c'est qu'il
faut sans doute souligner votre entière implication dans le processus
pédagogique. Tout au long de votre carrière, vous avez toujours été autant
passionné par la littérature des XVIème, XVIIème et XVIIIème siècles que
par la musique de cette période. Dans toutes vos productions musicales,
votre attention à la déclamation "théâtrale" et à la prosodie du texte, tant
sacré que profane, est sans doute l'une des "sources" de votre style et de
votre personnalité musicale. Cette passion pour la littérature vous
amène également, lors de tournées, à organiser le soir de véritables
"veillées" au cours desquelles vous récitez (ou inventez) des contes
baroques et fantastiques, dont le succès est aussi grand chez les enfants
que chez les adultes.
En 2010, vous faites vos débuts à l’opéra, puisque l’on vous confie, pour la
première fois de votre carrière, la direction de l’intégralité d’une tragédie
lyrique, Amadis de Lully, jamais jouée depuis 1771, mise en scène par
Olivier Bénézech. Là encore, vous vous êtes révélé être un grand chef
lyrique. Votre vision poétique de l'oeuvre, votre constant soutien aux
chanteurs, votre vitalité rythmique qui vous permettent d'avoir toujours
cette infinitésimale anticipation sur le mètre ont permis de donner à
entendre une envoûtante forêt de sonorités. Ce grand succès, public et
critique, vous amène à être chef-invité par plusieurs Opéras.
Vous faites partie de ceux qui ont fait découvrir ou redécouvrir les plus
grandes oeuvres de musique baroque en France et dans le monde.
Généreux pédagogue, esthète passionné, vous êtes l'un des chefs lyriques
les plus doués de votre génération.
Cher Olivier Schneebeli, au nom du Président de la République, nous vous
faisons Chevalier dans l’ordre national du Mérite.
Cher Jacques Legré,
Grand passionné de la scène, comédien de talent, directeur de lieux
prestigieux, vous avez travaillé avec les grands noms du théâtre, qui ont
tous su déceler vos dons extraordinaires.
Formé à l’art théâtral par les cours d’art dramatique de Julien Bertheau
puis à l’Ecole Jacques Lecoq, vous allez avoir très tôt l’occasion d’exprimer
vos talents. Vous faites la connaissance du comédien et metteur en scène
Nicolas Bataille qui monte un groupe de comédie spontanée. Cette
rencontre sera décisive. Vous êtes retenu pour intégrer la distribution de
La cantatrice chauve de Ionesco au Théâtre de la Huchette, institution
prestigieuse reconnue dans le monde entier.
Julien Bertheau vous apprend l’art de la scène, le jeu juste, l’implication du
comédien, et vous savez désormais qu’ « on ne joue pas un rôle mais un
spectacle ». Vous jouez, sous sa direction, plusieurs grands auteurs :
Molière, Musset, et même Shakespeare, notamment la célèbre oeuvre
Antoine et Cléopâtre au festival de Carthage. De là naîtra votre passion
pour la Tunisie, - passion que je partage ! - où vous retournerez plusieurs
fois en tournée. Comédien dans la mise en scène du Soldat inconnu et sa
femme de Peter Ustinov, dont vous êtes également l’assistant, vous
connaîtrez vos premiers succès, puisqu’elle sera présentée dans deux
théâtres prestigieux : le Théâtre des Célestins de Lyon et le Théâtre des
Ambassadeurs à Paris.
Votre collaboration avec Nicolas Bataille, autant professionnelle
qu’amicale, est, elle aussi, particulièrement fructueuse. Vous avez très vite
l’occasion d’exprimer toute votre passion de la scène, et vous participez à
des nombreuses pièces comme comédien ou assistant metteur en scène.
De La Conversation de Claude Mauriac, aux Nuits de Terayama de Shuji
Terayama, en passant par L’impromptu du Palais-Royal, vous ne cessez
de repousser les frontières de la création. Vous partez en tournée en
Hollande ou aux Etats-Unis, vous n’hésitez pas à adapter La Philosophie
dans le boudoir de Sade qui est interdite au bout de quatre
représentations.
Vous devenez ensuite directeur artistique de la Comédie moderne de la
Sorbonne où, audacieux et imaginatif, vous choisissez des pièces de
jeunes auteurs comme Jeanine Worms et Marie-Claude Grail. Les
interprètes sont de jeunes comédiens amateurs, étudiants à la Sorbonne.
Passionné par tous les aspects de la scène, vous allez devenir Directeur
de l’une des plus petites salles de Paris mais aussi l’une des plus connues
au monde : le Théâtre de la Huchette. Pièces emblématiques du théâtre de
l’absurde jouées dans leur mise en scène d’origine, La leçon et La
cantatrice chauve ont attiré, à ce jour, plus d’un million et demi de
spectateurs. Vous avez joué, en alternance avec d’autres comédiens et
avec un succès qui ne s’est jamais démenti, plus de 5000 fois dans La
cantatrice chauve, qui détient un record du monde de longévité.
Interprétant différents rôles, vous avez également été amené à jouer la
pièce en tournée, parcourant le monde : Europe, Maghreb, Etats-Unis, et
même Japon. Vous restez ainsi un an au Japon où vous étudiez le théâtre
traditionnel japonais et mettez en scène des pièces françaises traduites en
japonais. Ce séjour au Japon vous conduira à participer, au théâtre
Récamier, à l’art gestuel, forme théâtrale révélée dans le cadre du Théâtre
des Nations.
Vous participez, avec le succès que l’on sait, au renouvellement du
Théâtre de la Huchette. Ce lieu est un jeu, votre maison, votre univers et le
porte-drapeau de votre conception exigeante de l’art dramatique. Vous
allez tout d’abord sauver le Théâtre de ses difficultés financières en
menant une lutte aux côtés d’Eugène Ionesco, et des autres comédiens de
la troupe. En tant que directeur, vous allez ensuite donner une nouvelle
impulsion à la Huchette afin d’en faire un véritable lieu de création. Vous
élaborez une programmation ambitieuse : depuis 1981, un spectacle de
création est joué tous les soirs à l’issue des deux pièces de Ionesco. Vous
avez réussi brillamment à faire renaître « l’esprit » de la Huchette.
Soucieux de la diffusion du théâtre, vous créez en 1996, et la dirigez, la
COPAT, Coopérative de production audiovisuelle théâtrale, qui comprend
aujourd’hui 47 membres associés et a enregistré près de 150 spectacles.
Vous souhaitez, par cette structure, réunir un ensemble d’entrepreneurs de
spectacles et l’ouvrir à toutes les familles de théâtre. A l’occasion de votre
départ en retraite, vous avez obtenu la Médaille de la Fondation
Beaumarchais qui reconnaît vos qualités de Directeur de théâtre. Vous
avez, enfin, créé récemment le fonds de dotation de la maison de Colette,
afin de racheter la maison natale du célèbre écrivain à Saint Sauveur en
Puisaye pour en faire un centre d’archives, d’études et de rencontres. J’ai
participé avec plaisir au gala de soutien organisé à cette occasion au
Théâtre du Châtelet. Cher Jacques Legré, votre passion admirable de
théâtre vous a conduit souvent à être un « conquérant de l’impossible », un
véritable « passeur » culturel.
Travaillant dans les plus prestigieuses institutions, en compagnie des
grands noms du théâtre, vous avez contribué, par votre engagement, au
rayonnement du théâtre en France et dans le monde.
Cher Jacques Legré, au nom de la République française, nous vous
faisons Officier dans l’ordre des Arts et des Lettres.
Discours de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé à l'occasion de la remise des insignes de Chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur à Jean-Claude Houdinière et Patrick Coulombel, d'Officier dans l’ordre du Mérite à Irène Ajer, de Chevalier dans l’ordre du Mérite à Olivier Schneebeli, et d'Officier dans l’ordre des Arts et des Lettres à Jacques Legré
Discours de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de laCommunication, prononcé à l'occasion de la remise des insignes deChevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur à Jean-ClaudeHoudinière et Patrick Coulombel, d'Officier dans l’ordre du Mérite àIrène Ajer, de Chevalier dans l’ordre du Mérite à Olivier Schneebeli, etd'Officier dans l’ordre des Arts et des Lettres à Jacques Legré
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