Avec Alexis Weissenberg, c'est une grande voix du piano qui s'éteint,
un ambassadeur à la fois prestigieux et familier de la musique qui nous
quitte. Augmenté de sa vive intelligence, son talent éclatait dans les
versions saisissantes qu'il a su donner du répertoire, et pour lesquelles
nous disposons de nombreuses captations filmées. Petrouchka de
Stravinski, Schuman, Rachmaninov ou Chopin lui doivent d'avoir
enflammé sous une lumière nouvelle notre sensibilité musicale. Avec
cet élan qui lui venait des ses origines bulgares, il a toujours voulu
donner à la musique à une place de choix dans nos vies, jusqu'à
transcender les strictes frontières du classique.
Car le grand Weissenberg, le virtuose français invité par les plus
grands chefs et les festivals les plus prestigieux, acclamé aux quatre
coins du monde notamment lors de ses tournées avec l’Orchestre de
Paris, compositeur lui-même, savait aussi se mettre en retrait. Pour
réfléchir à son instrument, à la meilleure manière de l'enseigner aux
nouvelles générations. Pour témoigner régulièrement au micro du
« Grand Echiquier » de Jacques Chancel, au plus près du grand public.
J'exprime ma grande tristesse à ses proches et à sa famille musicale :
à tous ces talents qu'il fit éclore dans ses masterclasses à travers le
monde, en particulier dans sa Fondation, la Alexis Weissenberg's Piano
Master Class, à Engelberg en Suisse, où il s'est éteint à l'âge de
quatre-vingt-deux ans.