« La jardin et ses images » : votre journée d’études annuelle nous propose de réfléchir aux représentations du jardins : figurées, graphiques, photographiques, cinématographiques, littéraires, musicales, poétiques ou imaginaires. Du « jardin extraordinaire » de Trenet au « Jardin anglais » de Peter Greenaway, des jardins de la villa d’Este au Songe de Poliphile, véritable invention du jardin, en 1467, à l’âge de la Renaissance, le jardin a nourri des images et s’est construit en miroir des temps et des tourbillons du siècle. Miroir des passions humaines, labyrinthes amoureux, écrin d’un monde de songe et de rêveries, il est une représentation du siècle en même temps qu’une source d’inspiration et de représentation pour ceux dont « l’œil écoute » (Paul Claudel).
Après neuf années d’existence, le Conseil national des Parcs et Jardins joue, je le sais, un rôle toujours actif de conseil dans la politique du ministère de la culture et de la communication en faveur des parcs et jardins. Signe de ce lien, les Entretiens du Patrimoine de 2005 ont porté sur le thème « Du jardin au paysage » et je sais que beaucoup des membres de ce Conseil y ont activement participé. Ce Conseil national est aussi un reflet de la diversité des acteurs investis sur les dossiers des parcs et jardins : ministères, collectivités territoriales, associations de préservation et de valorisation du paysage. Je tiens à saluer leurs représentants présents dans la salle. Je suis en effet convaincu de l’importance du Conseil pour préserver mais aussi construire et imaginer le jardin et le paysage du XXIe siècle.
Dédié à la promenade et à la découverte des hôtels particuliers du quadrilatère, le jardin des archives nationales dont l’aménagement a été confié au paysagiste Louis Benech, est un nouvel espace vert au sein du Marais est destiné à devenir un lieu de rencontre original entre l’histoire et le paysage. Il s’inscrit dans une politique de valorisation de cet écrin patrimonial, au cœur d’un secteur sauvegardé, dont l’implantation à venir de la Maison de l’histoire de France est l’un des aspects.
A la faveur de l’urbanisation et des transformations des modes de vie dans les métropoles européennes, en effet, le regard de la société sur le jardin et le paysage a profondément changé au cours des dernières années. L’enjeu environnemental, les nouveaux modes de consommation mais aussi le succès rencontré par des initiatives culturelles comme le Festival international des jardins de Chaumont sur Loire en expliquent la portée ou la « Journée des plantes » du Domaine de Courson en témoignent, sans oublier le succès du jardin botanique de Vauville, dans la Manche, dont j’ai récemment distingué la propriétaire (Cléophée de Turkheim). Je suis en effet persuadé de l’importance des jardins pour le tourisme et pour l’économie des territoires. Le label « Jardin remarquable » est à cet égard exemplaire. Aujourd’hui, plus de 340 jardins particulièrement bien entretenus et ouverts à la visite, bénéficient de ce label de qualité.
Par ailleurs, les Rendez-vous aux jardins sont suivis et relayés par les médias et comptent parmi les initiatives les plus appréciées par un public très large et très diversifié. En 2011, le thème du Jardin nourricier a connu un vrai succès avec plus de 2100 jardins participants, 4000 animations et 1,8 millions de visiteurs. Et je veux saluer les institutions publiques et les propriétaires privées engagées dans cette opération qui permet à un large public de découvrir ces livres du temps à ciel ouvert. Je veux aussi saluer l’engagement des jardiniers qui sont les premiers acteurs des « Rendez-vous aux jardins » et qui, chaque jour, font vibrer et rayonner nos établissements publics, nos grands châteaux, nos domaines nationaux, nos musées. En 2012, je ne doute pas que l’édition ayant pour thème Le jardin et ses images remportera autant de succès lors du premier week-end de juin, notamment grâce à l’appui des partenaires financiers de cette manifestation nationale : l’Union nationale des entrepreneurs du paysage (UNEP) et Moët Hennessy.
J’avais annoncé en 2010 qu’un dialogue devait être engagé avec mes homologues européens afin de proposer un Rendez-vous européen des Parcs et Jardins, à l’image des Journées européennes du Patrimoine. Je sais que le Conseil s’est penché sur cette dimension européenne de l’hortus façonné par la main de l’homme, patiné par le temps et les siècles, nourri aussi par les emprunts et les influences extérieures. Cela permettrait de façonner une cartographie imaginaire du paysage européen.
La France, par la qualité et la diversité de ses paysages, apparaît souvent aux yeux de ces visiteurs comme un jardin en soi et ses jardins forment une marquetterie rare qui participe de la qualité d’ensemble de nos paysages, à laquelle, vous le savez, j’attache une attention toute particulière. Le val de Loire est souvent désigné comme le « jardin de la France », je crois profondément à l’idée selon laquelle notre pays est un jardin à ciel ouvert et qu’à ce titre la qualité de ses paysages, du bâti, de notre environnement botanique et forestier est un élément central de notre politique en faveur du patrimoine.
Lieu patrimonial, le jardin est aussi un terrain d’expression privilégié pour la création et le savoir-faire des paysagistes. Dédié à la promenade et à la découverte des hôtels particuliers du quadrilatère, le jardin des archives nationales dont l’aménagement a été confié au paysagiste Louis Benech, a été ouvert en juin 2011. C’est un nouvel espace vert au sein du Marais est destiné à devenir un lieu de rencontre original entre l’histoire et le paysage. Il s’inscrit dans une politique de valorisation de cet écrin patrimonial, au cœur d’un secteur sauvegardé, dont l’implantation à venir de la Maison de l’histoire de France est l’un des aspects. De la même manière le travail paysager au fort Saint-Jean, à Marseille, dans le cadre du grand projet du Musée des civilisations européennes et de la Méditerranée (MUCEM) s’inscrit dans cette même ambition d’une rencontre repensée et réinventée entre architecture, paysage et patrimoine.
Certains artistes contemporains ont investi ce lieu avec bonheur, à la suite de la réflexion de l’arte povera. Je pense bien entendu au sculpteur Giuseppe Penone, auteur d’une synthèse inédite et vibrante entre la nature et les fragments du corps humains, qui donne toute sa force et sa poésie visuelle à son œuvre. Je pense également au travail remarquable autour du lac de Vassivière en Limousin.
La qualité de l’Ecole nationale du paysage de Versailles, de nos établissements d’enseignement supérieur dans le domaine de l’architecture doit nous conduire à une réflexion sur la place du paysage et des jardins dans l’enseignement, notamment horticole. Les archives des jardiniers et des paysagistes sont aussi un sujet considérable, tant ils nourrissent les savoir-faire et les compétences dans ce domaine. Je tiens d’ailleurs à souligner le travail engagé en 2011 par les archives de France afin de dresser un état des lieux des fonds susceptibles de concerner les parcs et jardins et d’identifier notamment ceux qui sont menacés. La promotion d’une pédagogie du paysage – inséparable de la pédagogie du patrimoine - est inséparable de la préservation d’une mémoire vivante, d’une mise en perspective historique.
L'année 2013 sera d’ailleurs marqué par la commémoration du quatrième centenaire d’André Le Nôtre (1613-1700), auquel il sera donné un relief particulier à travers l’action de votre Conseil, mais aussi à travers la mobilisation de la Direction générale des patrimoines, de nos Directions régionales des affaires culturelles autour de cette figure du jardin à la française qui, comme Vauban, pour le patrimoine militaire, permet de dessiner une carte du paysage et une France des parterres et des écrins de verdure qui va de Versailles à Ancy le Franc, de Chantilly à Balleroy sans oublier les perspectives et les avenues dessinées par celui qui fut un « architecte de la nature ».
Comme vous le voyez les chantiers ne manquent pas et je tenais par ma présence à vous signifier l’attention et l’intérêt personnel que j’y porte. A mes yeux, les parcs et jardins sont plus qu’un lieu de promenade, plus qu’un espace d’agrément. Ils sont partie prenante d’un patrimoine et d’une mémoire commune qu’il importe de transmettre et de valoriser. Plus qu’un conservatoire de savoir-faire hérités du passé, ils sont aussi des laboratoires ouverts à la création, à l’expérimentation, à la recherche.
Plus largement, l’action de préservation et de valorisation des parcs et jardins s’inscrit dans une politique plus large en faveur des grands paysages et de nos sites les plus remarquables. Il y a là une urgence alors que des paysages, des lieux de patrimoine sont en situation de péril ; il y a là une exigence pour un ministère qui est perçu par nos concitoyens comme le garant des paysages et qui n’en a pas toujours les moyens juridiques et normatifs. Je me suis exprimé en ce sens devant les Architectes des bâtiments de France il y a quelques jours.
J’ai pleine confiance dans votre compétence, votre expertise et votre engagement pour contribuer à cette ambition pour nos patrimoines. Je vous remercie.