Seul le prononcé fait foi
Monsieur le Ministre, cher Mykola Totchytsky,
Mesdames les conservatrices,
Mesdames et Messieurs les ambassadrices et les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les présidents et les directeurs,
Mesdames et messieurs, chers partenaires,
Cher Mykola, c'est à la fois un plaisir et un honneur de vous accueillir aujourd'hui au ministère de la Culture, et de vous rendre ainsi l’hommage qui vous est dû, et à travers vous à l’ensemble des professionnels ukrainiens de la culture qui aujourd’hui s’engagent pour la protéger et la faire vivre.
Monsieur le Ministre, votre présence aujourd’hui est un message en soi : dans ce moment où vous menez, aux côtés de votre peuple, un combat héroïque pour la défense de votre souveraineté et de votre identité culturelle en réponse à l’agression russe, votre venue nous honore et témoigne de l’importance que vous accordez à notre relation bilatérale.
Je voudrais également saluer la présence parmi nous de représentants des États membres de l’Union européenne et de ses institutions. Mesdames et Messieurs les ambassadeurs, Mesdames et Messieurs les membres du corps diplomatique, je souhaitais votre présence pour qu’il soit clair que c’est bien en Européens que nous entendons témoigner de notre solidarité avec l’Ukraine. Rappeler également que l’Europe de la Culture est une affaire de souveraineté : la protection du patrimoine le rappelle directement.
Vous le savez, j’ai fait de la protection du patrimoine en danger l’une des priorités de ma feuille de route pour l’Europe de la Culture. Je sais que mes collègues européens, à commencer par la Pologne qui assure en ce moment la présidence du Conseil de l’UE, sont aussi très engagés sur le sujet. Je suis certaine que nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres et c’est précisément toute l’utilité que présente ce genre de coopérations et d’échanges.
Protéger le patrimoine ukrainien, c’est protéger le patrimoine européen. Et donc, c’est protéger l’identité culturelle de l’Europe là où elle est directement attaquée.
Monsieur le Ministre, l’entretien que nous venons d’avoir, accompagnés de plusieurs établissements culturels, a été très fructueux. Je m’y suis engagé à poursuivre le soutien de mon ministère à vos côtés, en lien étroit avec nos collègues du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.
Je saisis l’occasion de votre présence aujourd’hui dans nos murs pour saluer une initiative qui illustre justement ce que nous pouvons et devons faire ensemble : nous recevons une délégation de 10 conservatrices ukrainiennes tout au long de la semaine pour des échanges autour du rôle de la conservation en temps de crise.
Mesdames les conservatrices, votre engagement au service de la protection du patrimoine dans des conditions d'une difficulté extrême incarne cette résistance culturelle qui transcende les frontières. En poursuivant votre mission essentielle malgré l'adversité, vous défendez bien plus que des œuvres ou des monuments : vous préservez l'âme même de votre nation.
Car tel est l'enjeu véritable des destructions systématiques qui frappent le patrimoine ukrainien : atteindre la mémoire collective, effacer les traces d'une civilisation. Face à cette entreprise de négation, votre résistance quotidienne constitue un acte de bravoure qui nous inspire et nous oblige.
À travers ce séminaire, nous adoptons une approche collaborative. Réunir pour la première fois acteurs civils et militaires autour d'une préoccupation commune, tel est le pari de cette initiative inédite. Je tiens à remercier chaleureusement l'ensemble de nos partenaires qui ont rendu possible cette convergence : le ministère de la Culture ukrainien, l'Ambassade d'Ukraine en France et l’ambassade de France en Ukraine ainsi que nos collègues du Quai d’Orsay, la Délégation au Patrimoine de l'Armée de Terre, Bouclier Bleu France, la Fondation ALIPH, l'Institut Ukrainien en France, l'Institut français d'Ukraine, le musée du Louvre et le Centre de recherche et de restauration des musées de France.
De la prévention à la lutte contre le trafic illicite, en passant par la planification, la gestion de crise et la stabilisation, nous abordons toutes les dimensions de la conservation patrimoniale en temps de conflit.
Au-delà de la transmission de savoir-faire, ce programme a vocation à créer un véritable dialogue entre professionnels du patrimoine. L’expertise de terrain, forgée dans l'épreuve, que les conservatrices ukrainiennes peuvent apporter, nous est précieuse et enrichira nos réflexions communes, à un moment où c’est bien l’Europe dans son ensemble qui doit se donner les moyens de protéger son patrimoine, en réponse à des crises de sécurité ou aux effets du changement climatique.
Simultanément, le concours et l’engagement financier de la fondation ALIPH, a permis de structurer un dispositif international de préservation patrimoniale. Je tiens à saluer la présidente d’ALIPH, Bariza Khiari, et son directeur exécutif, Valéry Freland, pour leur engagement et l’action déterminée de leurs équipes.
Cet engagement de la France à vos côtés s'inscrit également dans un mouvement d'ampleur internationale. Le cadre stratégique défini lors du Sommet de Vilnius en juin 2024 a marqué un tournant décisif : quarante pays, incluant l'ensemble des membres du G7, se sont unis dans une mobilisation sans précédent pour la protection du patrimoine ukrainien. Cette coordination remarquable illustre notre capacité collective à transformer la mobilisation en action structurée.
L'adoption de la déclaration d'Ouzgorod en février dernier, puis les travaux menés à Florence ces derniers jours en préparation de la conférence internationale sur la reconstruction qui aura lieu à Rome les 10 et 11 juillet, s'inscrivent dans cette même dynamique. Je tiens à saluer la mobilisation de nos collègues italiens dans cette perspective. Cette conférence sera un moment crucial pour consolider nos engagements et approfondir notre coopération dans la perspective de la reconstruction.
Mesdames et Messieurs,
Dès les premiers jours du conflit, en février 2022, la France a fait le choix d'une mobilisation immédiate, au-delà du patrimoine. Parmi les premiers pays à établir un dispositif d'accueil spécifiquement conçu pour les professionnels de la culture et journalistes ukrainiens, nous avons démontré notre capacité de réaction face à l'urgence. Ce dispositif, que nous avons depuis pérennisé et élargi, témoigne de notre vision à long terme de cette coopération essentielle.
Cette première réponse humanitaire s'est rapidement enrichie d'initiatives plus larges : elle concerne les échanges entre professionnels de nos musées, de nos bibliothèques et l’art contemporain.
Elles touchent aussi au cinéma. En prenant l'initiative de créer le Fonds européen de solidarité pour les films ukrainiens, la France s’est mobilisée aux côtés de dix-neuf États européens autour d'un objectif commun : maintenir vivante la création cinématographique ukrainienne en temps de guerre. Le Festival de Cannes a été à nouveau l’occasion de donner à voir le talent des créateurs ukrainiens et leur appartenance à cette Europe du cinéma et de la culture que je veux promouvoir avec mes homologues européens.
Je tiens aussi à saluer les échanges en cours entre ARTE et vos services monsieur le Ministre, qui pourraient contribuer directement à notre ambition de faire d’ARTE une plateforme européenne de référence, accessible dans toutes les langues européennes, et donc en ukrainien.
Je me réjouis enfin du « Voyage en Ukraine », ce temps fort culturel organisé par l’Institut français et l’Institut ukrainien qui aura lieu en France à partir de décembre prochain : il permettra de mieux faire connaître les talents de la scène ukrainienne.
Monsieur le Ministre, En vous accueillant aujourd'hui, la France réaffirme solennellement son engagement à vos côtés. Nous avons été présents dès les premiers jours, nous le demeurons aujourd'hui, nous le resterons demain. Car votre combat transcende les frontières : il défend ces valeurs universelles que sont la préservation de la culture et la transmission de la mémoire.