Mesdames et Messieurs,
Merci de votre présence. Notre réunion de travail des ministres européens de la culture ou de leurs représentants ainsi que des professionnels français et européens de la culture vient de se conclure. Nous tenions à vous en rendre en compte.
Avant tout chose, je tiens à remercier mes homologues ou leurs représentants d’avoir répondu présents à mon invitation pour travailler ensemble à une Europe de la Culture.
Cette réunion s’inscrit dans la suite du conseil européen des Ministres de la Culture qui s’était tenu le 13 mai à Bruxelles, sous la présidence de la Pologne, que je tiens à saluer et à remercier de la conduite de ces travaux : il nous avait permis d’avoir de premiers échanges sur la future boussole culturelle à laquelle travaille la Commission.
Le 16 mai, lors du festival de Cannes, nous avons également co-signé avec 25 Etats membres une tribune qui marquait notre attachement au modèle culturel européen, en particulier celui d’une Europe du cinéma où la diversité culturelle est promue grâce aux réglementations européennes et aux financements qui leurs sont associés.
Le format original de cette réunion, c’est aussi d’avoir voulu associer des représentants des secteurs culturels, français et européens. Ceci visait à faciliter la rencontre des forces vives de la culture européenne et de l’échelon politique que nous représentons.
C’est à cette condition que les recommandations que nous voulons porter à Bruxelles seront concrètes et opérationnelles et, là encore, que l’Europe de la culture pour laquelle nous nous mobilisons, saura répondre aux attentes de nos professionnels.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire savoir, l’Europe de la Culture, si elle veut être crédible, doit être synonyme de souveraineté culturelle. Cet impératif, je le formule à partir d’un constat sur notre environnement international :
- Premièrement, la transformation profonde du paysage culturel sous l’effet des nouveaux usages numériques et de la rupture technologique liée à l’intelligence artificielle qui bouleverse déjà les chaînes de valeur associées à la création et à la diffusion des œuvres ;
- Deuxièmement, la multiplication des crises. Ces crises peuvent concerner des menaces de sécurité, je pense ici à la guerre d’agression russe en Ukraine et au patrimoine directement ciblé ; mais je pense également aux menaces qui pèsent sur la liberté de création ainsi que sur le secteur de l’information. C’est un défi directement porté à notre résilience démocratique. Je pense également aux effets du changement climatique qui ont des conséquences directes sur notre patrimoine et sur nos infrastructures culturelles.
- Troisièmement, l’hostilité affichée à l’encontre du modèle culturel européen par certains acteurs extra-européens, qui remettent en cause ses instruments de régulation et de financement, tant par des pressions qu’en multipliant les actions contentieuses.
Ce sont trois défis direct à notre souveraineté dans le domaine culturel. Pour y répondre, seule une réponse à l’échelle européenne sera à la hauteur de ces enjeux.
Plus concrètement, la souveraineté européenne se joue à mon sens autour de quatre priorités :
- D’abord la préservation du droit d’auteur et la rémunération des créateurs face au développement accéléré de l’IA. Le règlement sur l’intelligence artificielle adoptée l’an dernier offre un cadre qui doit aujourd’hui être mis en œuvre, sans délai : c’est une priorité. La France contribue directement à ces travaux, et notamment par une méthode qui vise à faciliter le dialogue entre les ayants droits et les développeurs d’IA. C’est le sens de la concertation que nous avons lancée avec Clara Chappaz la semaine dernière.
- Ensuite le défense du modèle de régulation européenne dans le secteur audiovisuelle. La directive SMA a démontré tout sa pertinence s’agissant de la promotion et du financement de la diversité culturelle, son statut de directive permettant justement de prendre en compte la singularité de chaque contexte national. C’est un modèle extrêmement vertueux que nous voulons continuer à défendre et qui conditionne directement notre autonomie européenne face à des acteurs globaux.
- Troisièmement, je crois qu’il nous faut encore renforcer le sentiment d’appartenance européenne par la culture. Les professionnels de la culture qui participaient à nos échanges ont fait valoir combien la circulation des artistes et des œuvres à l’échelle européenne, la mise en réseau de nos musées et de nos institutions culturelles y contribuait directement. Nous devons aller plus loin pour atteindre cet objectif avec des financements européens à la hauteur des enjeux. Je veux aussi mentionner l’enjeu que représente la transformation d’ARTE en une plateforme européenne de référence, à la fois par les langues européennes dans lesquelles elle sera accessible, et par les contenus qu’elle pourra produire et diffuser. La réalisation de ce projet serait un atout décisif pour renforcer la conscience européenne de nos concitoyens, ainsi que notre résilience démocratique, puisqu’ARTE contribue directement par la qualité de ses contenus à cultiver l’esprit critique et tout ce qui peut faire barrage aux populismes comme aux tentatives d’ingérence étrangère. Nous allons y travailler avec mon homologue allemand, le Ministre d’Etat Wolfram Weimer dont je tiens à saluer la présence parmi nous pour son premier déplacement à Paris. Nous nous entretiendrons d’ailleurs ensemble dans un instant avec le souhait que le couple franco-allemand soit moteur pour défendre l’Europe de la culture dont nous avons aujourd’hui besoin.
- Enfin, l’Europe de la Culture, si elle veut être souveraine, doit aussi être capable de répondre aux crises qui traversent aujourd’hui l’environnement international. Je pense ici notamment à la protection du patrimoine européen, à la fois pour répondre aux crises de sécurité comme en Ukraine, et nous maintiendrons notre solidarité avec les professionnels ukrainiens – je recevrai d’ailleurs prochainement mon homologue ukrainien à Paris – mais aussi aux Etats qui cherchent à se prémunir contre des menaces à venir. Je pense également aux effets du changement climatique qui menacent eux aussi l’intégrité de notre héritage commun. Dans ces domaines, nous devrions chercher à définir et à mettre en œuvre un véritable mécanisme de solidarité et d’assistance européenne. Enfin, cette protection du patrimoine face aux crises est aussi un enjeu de coopération avec le voisinage de l’Union européenne. J’ai parlé de l’Ukraine, mais je tiens aussi à mentionner la rive Sud de la Méditerranée avec laquelle nous partageons le berceau d’une civilisation commune et les apports passés et présents des cultures qui n’ont eu de cesse d’enrichir la culture européenne. L’Europe de la Culture que la France appelle de ses vœux est une Europe non pas fermée sur elle-même mais ouverte aux échanges et à un enrichissement réciproque : c’est aussi un enjeu de souveraineté à part entière.
Je vous remercie. Je cède à présent la parole à mon collègue allemand, le Ministre d’Etat Wolfram Weimer.
- Déclaration du Ministre allemand
- Déclaration du Vice-Ministre bulgare
- Déclaration de la Ministre croate
- Déclaration du vice-ministre grec
- Déclaration de la ministre lettone
- Déclaration du Ministre maltais
- Déclaration de la Secrétaire d’Etat slovaque