Le ministère de la Culture (Département des études, de la prospective et des statistiques) publie deux nouvelles études issues d’une exploitation du panel des distributeurs GfK pour les marchés du livre et de la musique enregistrée. Ce travail a permis de mesurer l’évolution de la diversité des achats de biens physiques et dématérialisés mais aussi des nouvelles formes de consommation en flux, entre 2007 et 2016.
Au cours de cette décennie, la population d’acheteurs en ligne est passée de 33 % à 60 %. Pour autant, l’impact de la révolution numérique n’a pas du tout été du même ordre sur les deux marchés : celui de la musique enregistrée a connu un véritable effondrement des ventes de disques lié au succès massif du téléchargement puis de l’écoute en flux (streaming), alors que le livre numérique n’a, en France, connu jusqu’à présent qu’un développement limité. Dans un cas, le recul du marché physique au profit des consommations dématérialisées a été spectaculaire, dans l’autre cas, il est resté marginal. En dépit de cela, la variété consommée (le nombre de produits différents ayant fait l’objet d’au moins un acte d’achat) a considérablement progressé au cours de la décennie, en grande partie grâce à l’extension de la micro-production et de l’autoproduction. Pour autant, cette diversité des consommations n’a pas empêché, dans certains cas, une concentration accrue des ventes. Ainsi le poids des titres vedettes dans le volume global des ventes est plus élevé aujourd’hui qu’il y a dix ans, aussi bien sur le marché de la littérature générale que sur celui du disque.
Les résultats confirment que la diversification des consommations (effet de longue traîne) s'accompagne dans la plupart des cas d’un renforcement des produits vedettes (effet superstar) et viennent plutôt conforter l’hypothèse d’une fragilisation de la production intermédiaire. Dans le contexte numérique, la segmentation croissante de l’offre, conjuguée à la puissance des outils algorithmiques des plateformes et des réseaux sociaux, peut enfermer dans des « bulles filtrantes » la part de la population la moins armée pour affronter la profusion de l’offre culturelle et, de ce fait, réserver la richesse des catalogues aux consommateurs les plus enclins à en profiter. Aussi, le régime d’abondance qui prévaut aujourd’hui sur les marchés culturels repose, à bien des égards, la question des inégalités, au fondement des politiques culturelles.
Parution des deux publications : 26 septembre 2018
Ministère de la Culture / DEPS
www.culture.gouv.fr/Etudes-et-statistiques