La première journée a été consacrée au secteur de la mode, et s’est déroulée à l’Institut Français de la Mode.
Xavier Romatet, Directeur général et Sylvie Ebel, Directrice générale adjointe, ont ouvert la journée par une présentation des missions de l’Institut Français de la Mode.
Après avoir rappelé que le secteur de la mode est le deuxième contributeur à l’exportation française et représente 2,8% du PIB national et 600 000 emplois directs, ils ont raconté l’histoire de la création, en 1986, à l’initiative de Pierre Bergé, de cette école de mode très fortement intégrée à l’écosystème. En 2008, l’IFM a déménagé dans les anciens docks du port autonome de la ville de Paris remodelé par les architectes Jacob Mac Farlane pour former aujourd’hui un campus de 9000 m2, accueillant des étudiants du monde entier et formant à tous les métiers de la mode : des métiers de la main à la création et au design en passant par les fonctions de management, dans une organisation stimulante où tous les niveaux se côtoient, de l’apprentissage au Master, cultivant ainsi le sens du collectif et de l’innovation.
Les auditeurs ont pu ensuite visiter les différents ateliers de l’IFM, et découvrir, dans cette ruche très animée où de nombreuses langues cohabitent, le travail des étudiants, en création textile, design ou modélisme notamment.
Par la suite, Pascal Morand, Président Exécutif de la Fédération de la haute couture et de la mode a tout d’abord présenté les missions de la Fédération, rassemblant une centaine de marques ayant notamment pour rôle la production d’idées et la valorisation du secteur auprès des instances publiques, et étant en responsabilité d’organiser les Fashion Weeks de Paris. Il a ensuite exposé les grands enjeux stratégiques et géopolitiques auxquels le secteur de la mode est confronté : surproduction, chaînes de valeur internationales et fragmentées, augmentation exponentielle des ventes dans l’ultra discount fragilisant les chaines de distribution traditionnelles, grandes batailles de plateformes dont aucune n’est détenue par un acteur européen. Dans ce paysage en pleine mutation, les acteurs français et européens ont néanmoins des atouts majeurs du fait d’une tradition maintenue d’un savoir-faire d’excellence, et de la place de Paris, désormais première scène au niveau mondial pour ses Fashion Weeks , événements économiques certes mais aussi culturels, avec de puissants effets d’entraînements.
Olivier Saillard, historien de la mode mais aussi poète et performeur, par ailleurs directeur artistique de Weston et directeur de la Fondation Azzedine Alaïa a proposé ensuite aux auditeurs une réflexion sensible sur les relations entre mode et culture sous le prisme de la notion d’identité.
La journée de réflexion s’est terminée par l’intervention de Aude Accary-Bonnery, directrice générale adjointe de l’Opéra de Paris, ancienne secrétaire générale adjointe du ministère de la Culture, qui a dressé un panorama économique du secteur culturel : l’importance du secteur marchand, la diversité en tailles et contenus des entreprises qui le constituent, le financement public dont il bénéficie , son dynamisme , enfin sa croissance en ligne tirée notamment par le patrimoine et les arts visuels. . Relevant les forces et les facteurs de fragilité, elle a souligné l’impact des changements en cours notamment le développement de l’IA et le poids croissant des grands acteurs mondiaux. Face à ces mutations elle a rappelé l’importance de la régulation à l’échelon communautaire, l’enjeu à définir nos priorités, à s’adresser à la jeunesse, soutenir l’innovation, et défendre la liberté de création et de l’information.
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La seconde journée, à Romainville a permis de porter attention aux territoires urbains dit périphériques, afin d’explorer une vitalité économique et culturelle à reconnaître et soutenir.
Après une présentation du conservatoire des Lilas-Romainville par Caroline Ledru, sa directrice, Fabrice Chambon, directeur de la culture d’Est-Ensemble a tout d'abord brossé le portrait du territoire d'Est Ensemble, très hétérogène socialement et très divers culturellement, soumis à une forte pression immobilière, et bénéficiant d'une tradition d'engagement dans la vie citoyenne locale. Ce territoire bénéficie également d'une dynamique culturelle forte avec de nombreux artistes et professions culturelles notamment dans la première couronne. Est-Ensemble à présent établissement public territorial, était auparavant une communauté d'agglomération ayant bénéficié à ce titre d'un soutien de l'Etat, et ayant ainsi investi dans de nombreux équipements culturels, transférés en compétence à Est-Ensemble par les communes : c'est le cas des trois réseaux des bibliothèques, conservatoires et cinémas publics. Les publics prioritaires sont les tout-petits, les adolescents, les jeunes adultes notamment pour le cinéma, les personnes en situation de handicap, les publics en insertion et les primo-arrivants. Dans chacun des champs concernés, les politiques se mènent en partenariat avec des associations. Fabrice Chambon a ensuite raconté trois projets emblématiques de la politique culturelle menée sur le territoire, dont les objectifs sont la rencontre de groupes sociaux ne se fréquentant pas habituellement et l'encapacitation des citoyens.
La séquence suivante a été consacrée à la présentation d’une initiative du département de la Seine-Saint-Denis pour soutenir et valoriser le dynamisme du territoire, notamment en matière culturelle. Marie-Amélie Keller, directrice du marketing territorial et de l'attractivité, a présenté le dispositif et la mise en réseau que représente la marque de territoire du Département IN SEINE-SAINT-DENIS. A sa suite, trois projets culturels valorisés par ce dispositif ont été présentés. Amélie Billault, cofondatrice avec Alexandre Plank et directrice générale de Making Waves a présenté cette structure créée en 2019, organisée autour d’un projet radio conçu comme endroit d’expression des droits culturels et d’innovation sociale, avec un fort engagement dans des projets d’insertion. Bastien Laurent, fondateur et Lisa Moussi, responsable programmation sont venus présenter l’aventure 0.93 Lab. Après avoir créé une marque de vêtements, Avok, Bastien Laurent, originaire d’Aulnay, a souhaité monter un projet sur ce territoire destiné à sensibiliser les jeunes aux pratiques du design de mode et des arts visuels, et d’accompagner les plus motivés pour les préparer aux grandes écoles. 0.93 Lab a pu réunir les financements publics (Agence Nationale de la Cohésion des Territoires et Région Île de France) pour la réhabilitation de l'ancien commissariat d'Aulnay 3000 afin de donner un lieu à ce projet atypique de formation, transmission et exposition, qui bénéficie d’un partenariat avec le groupe Kering. Aymeric Pichevin, Président de Rafe production et auditeur de cette 6eme session du CHEC a présenté le dispositif « Rappeuses en liberté », qui permet d’accompagner le début de carrière de dix rappeuses par an, grâce à un réseau de partenaires très varié, public et privé, apportant financement et expertise. Il a créé également un incubateur pour les jeunes femmes de Seine Saint-Denis souhaitant pratiquer le rap.
A la fin de la matinée, Ulysse Rabaté, chercheur en sciences politiques et auteur de l’ouvrage Streetologie : savoirs de la rue et culture politique est venu proposer une réflexion sur la reconnaissance de la culture des quartiers populaires. Il a pointé le paradoxe actuel, où les quartiers populaires ont une forte présence culturelle mais sont frappés d’une sorte d’illégitimité sur l’expression politique. Il remarque pourtant dans ces quartiers l’émergence d’une grammaire politique nouvelle qui se fonde sur la revendication de valeurs spécifiques, qui sont plus complexes que l’image très négative qui en est véhiculée dans les médias, et qui porte aussi un héritage des valeurs de solidarité des mouvements ouvriers. Comment alors, pour les institutions culturelles, penser une reconnaissance qui passe par l’acceptation d’un dialogue parfois conflictuel et non directement solvable?
Le temps du déjeuner a été l’occasion de faire la rencontre d’autres ambassadrices de la marque In Seine-Saint-Denis, présentée en matinée, qui ont monté le restaurant Cheffes à la Cité Maraîchère de Romainville.
L’après-midi, les auditeurs ont été accueillis au Cinéma Le Trianon de Romainville.
Marc Bembekoff, Directeur de La Galerie, centre d'art contemporain d’intérêt national de Noisy-le-Sec est venu présenter les activités et les projets de cet équipement qui accompagne la production d’artistes contemporains et diffuse cette création notamment par des expositions, mais aussi des projets d’animations inventifs avec les citoyens et les différents acteurs du territoire.
Julien Tardif, directeur et programmateur du Cinéma Le Trianon a présenté le réseau des cinémas d'Est Ensemble composé de 6 cinémas anciennement municipaux et a montré, pour le cinéma Le Trianon, la grande richesse d’une programmation éclectique, accompagnée d’actions de médiation multiples.
Le module s’est terminé par une conférence et un atelier mené par Binkady-Emmanuel Hié, consultant et agent d’artistes, fondateur de l’Agence NORME, dont la mission est d’accompagner des acteurs économiques, notamment culturels, dans leur démarche de lutte contre les exclusions raciales.
Pour finir cette journée, Olivier Saillard a invité la promotion à visiter la Fondation Alaïa.
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