Je sais aussi que les travaux des instances de ce Conseil sont denses et
continus. Le bureau a tenu sept réunions depuis la dernière plénière de
juin, dont vous trouverez les comptes rendus dans le dossier qui vous a été
remis. Je me réjouis aussi de la mise en place de la nouvelle présidence
de la commission emploi, assurée par Monsieur Xavier Greffe, dont je
salue la présence pour la première fois parmi nous aujourd’hui.
La vitalité de ce conseil est indispensable. Et j’ai bien mesuré les
demandes qui se sont exprimées, et que l’on m’a rapportées, lors de la
réunion du bureau consacrée à son ordre du jour. Il faut que nous
parvenions à faire de cette instance un véritable lieu de travail et
d’échange, un véritable outil au service du développement et du
rayonnement des professions du spectacle dans notre pays, secteur
essentiel à la fois dans notre culture et dans notre économie. Je ne ferai
donc pas un long propos introductif afin que nous puissions largement
débattre sur les deux points inscrits à l’ordre du jour :
- Tout d’abord, la structuration et le développement du secteur du
spectacle vivant et enregistré. Nous évoquerons notamment, avec Jean-
Denis Combrexelle, directeur général du travail, que je remercie pour sa
présence fidèle à ces réunions, et Georges-François Hirsch, directeur
général de la création artistique, l’avancement de la négociation des
conventions collectives, la caisse des congés spectacle, le portage salarial,
mais aussi les modalités à travers lesquelles je compte favoriser la
poursuite du développement de ces secteurs.
- D’autre part, les incidences des textes communautaires sur le secteur du
spectacle. J’ai entendu vos préoccupations et j’ai souhaité la mise en place
d’une mission confiée à l’lnspection générale des affaires culturelles. Cette
dernière se penchera sur la compatibilité de notre dispositif d’aides
publiques au spectacle vivant avec les règles européennes. Plus
généralement, elle étudiera la manière dont nous pouvons mieux anticiper,
mieux travailler ensemble sur les enjeux de la transposition des textes
européens.
Permettez-moi tout d’abord d’inscrire nos échanges de ce jour dans un
contexte plus général.
Cette réunion se tient alors que la négociation Unedic s’est conclue par
une quasi-prorogation de l’accord en vigueur. Le régime spécifique de
l’intermittence a donc été préservé. Toutefois il importe de ne pas relâcher
les efforts en cours afin de mieux structurer l’emploi dans ce secteur. Nous
y reviendrons.
L’Etat, tout en accompagnant ces démarches en faveur d’une meilleure
structuration, continue à apporter le concours de la solidarité nationale au
régime de l’intermittence, à travers le fonds de professionnalisation et de
solidarité. Le dernier rapport de ce fonds figure dans le dossier de ce jour,
établi par Michel Lagrave, à qui je souhaiterais rendre hommage et
exprimer ma gratitude pour le travail qu’il a accompli en qualité de
président du Comité directeur de ce fonds. Prochainement un inspecteur
général des finances devrait lui succéder. Je tiens à souligner que le fonds
de professionnalisation et de solidarité a trouvé, en grande partie grâce à
lui, sa place dans la vie de ce secteur. Je pense notamment à tous les
besoins d’accompagnement de carrière auxquels ce fonds permet
désormais de répondre.
Cette réunion se tient aussi alors que, je me dois de le rappeler, le budget
du ministère de la culture a été entièrement dégelé. Eu égard à la situation
rencontrée par les professionnels du spectacle dans d’autres pays
européens, c’est un choix budgétaire important. Par ailleurs, alors que ce
sujet suscitait beaucoup d’inquiétudes parmi vous, j’ai obtenu que la clause
de compétence générale des collectivités territoriales en matière culturelle
soit préservée.
Ces trois éléments offrent un cadre favorable à la vitalité de notre création
artistique. Cela posé, je sais que nous avons beaucoup à conforter, à
construire, à inventer, notamment pour assurer à ce secteur des capacités
de développement. C’est l’objet de deux missions dont je vous annonce
aujourd’hui le lancement, consacrées l’une au financement du spectacle
vivant, l’autre au financement de la filière musicale. Elles répondront à des
besoins spécifiques à chacun de ces secteurs, mais elles seront conduites
en étroite liaison l’une avec l’autre.
S’agissant du spectacle vivant, c’est précisément parce que je crois que
rien ne peut remplacer la vie de la scène et l’émotion suscitée par la
présence du comédien, du chanteur, du danseur, du musicien que je
souhaite mettre tout en oeuvre – en explorant toutes les pistes sans a priori
- afin de trouver de nouvelles marges. Je sais à quel point les acteurs du
spectacle vivant sont fragilisés par l’érosion des marges artistiques et par
des conditions d’exercice de leurs activités difficiles, du fait de coûts
croissants. Ces fragilités menacent leurs capacités de développement,
parfois leur existence. Il nous faut donc mobiliser de nouveaux types de
ressources. J’ai décidé de confier cette mission à des personnalités
éminentes de ce secteur, dont les noms seront connus dans les prochains
jours.
Sur le contenu de cette mission, entendons-nous bien. Il s’agit d’identifier
de nouvelles ressources, extra-budgétaires, de trouver de nouveaux
dispositifs d’aide à la création et à la diffusion. Il s’agit de mieux
accompagner le formidable élan artistique et culturel porté par les artistes,
les compagnies et l’ensemble des établissements publics et privés. Ces
nouvelles ressources compléteront les moyens que le Ministère de la
culture et de la communication et les collectivités consacrent à ce secteur,
selon des modalités qui seront à définir, à partir des propositions qui seront
rendues par la mission.
Je veux être clair aussi sur un point : Il n’est aucunement question d’aller
vers la création d’une agence, ni dans le sens d’un démembrement du
Ministère de la culture et de la communication, comme j’ai pu l’entendre ici
ou là.
Il nous faut collectivement être inventifs et innovants. Des idées, certains
en ont. Je m’attache d’ailleurs à accompagner ces initiatives, comme par
exemple celle qui a été lancée par la plate-forme des cafés-culture pour
inventer des dispositifs innovants d’aide à l’emploi.
Par ailleurs, je préciserai dans les semaines qui viennent les orientations
d’un Plan d’action pour le spectacle vivant visant à conforter l’engagement
de mon ministère pour le secteur et à proposer de nouveaux outils et de
nouvelles perspectives à la hauteur des enjeux. Je souhaite notamment
travailler à l’amélioration de la diffusion nationale et internationale des
oeuvres et des créations, renforcer le soutien à l’émergence et au
renouvellement artistique. Je souhaite également atteindre un meilleur
équilibre entre les disciplines et permettre un élargissement des publics, à
travers des actions de formation et de sensibilisation repensées.
La Mission sur le financement de la filière musicale devra éclairer les choix
des pouvoirs publics quant à la modernisation du cadre juridique et
financier du soutien aux différents acteurs de cette filière. Je souhaite
notamment que soit expertisée l'hypothèse de la création d’un outil de
soutien dédié à ce secteur. Il pourrait être inspiré, le cas échéant, du
modèle emblématique que représente le Centre national du cinéma et de
l'image animée (CNC). La question de la contribution au financement de la
création musicale des différents acteurs de l’économie numérique dont les
ressources découlent notamment de la mise à disposition - directe ou
indirecte - de contenus culturels, devra faire l’objet d’un examen
particulièrement attentif. J’ai décidé de confier cette mission à Messieurs
Daniel Colling, Marc Thonon, Didier Selles, Franck Riester et Alain
Chamfort.
Je voudrais maintenant aborder rapidement quelques points relatifs à notre
ordre du jour.
L’État et les partenaires sociaux du secteur ont beaucoup oeuvré au cours
de ces dernières années pour que ce secteur se structure et se développe
comme un secteur économique et social à part entière. L’opération de
négociation des conventions collectives qui s’est engagée en 2005 a
donné lieu à plus de 400 réunions de commissions mixtes paritaires.
L’entrée dans les métiers se professionnalise, grâce à l’action des
Commission Paritaires Emploi Formation (CPNEF), grâce à la création de
diplômes, à la réorganisation en cours des établissements d’enseignement
supérieur du spectacle vivant, au développement des formations en
alternance, à la mise en oeuvre de l’Accord cadre de développement de
l’emploi et des compétences (ADEC) du spectacle vivant.
L’enjeu consiste bien à renforcer et sécuriser le parcours des professionnels du spectacle
vivant tout au long de leur vie. Cette démarche s’accompagne
légitimement d’un renforcement de la lutte contre le travail illégal.
Grâce à la mobilisation de tous, et notamment à la médiation confiée à
Antoine Gosset-Grainville, la négociation de la convention collective
« production cinématographique » est, je l’espère, proche d’une signature.
Je vous appelle tous à faire preuve de responsabilité pour conclure la
négociation de ce texte indispensable pour l’avenir de ce secteur. Je vous
rappelle par ailleurs la mise en oeuvre récente des mesures inspirées par
le « Club des 13 », qui va renforcer le soutien de l'Etat à la production
indépendante, la plus fragile.
La négociation de la convention collective du spectacle vivant privé
demeure difficile mais elle progresse. Vous aurez pu noter que la
disposition dite « hors champ » - qui vise à rendre applicables les
conventions collectives du spectacle aux artistes et techniciens employés
par des entreprises dont l’activité principale n’est pas le spectacle - a été
adoptée dans le cadre de la proposition de loi Warsmann sur la
simplification du droit. C’était une disposition attendue, qui conditionnait le
plein engagement de certains d’entre vous dans la négociation de cette
convention collective, nous la tenons désormais.
Je n’oublie pas l’actualité sociale du secteur de l’audiovisuel, notamment
dans le contexte de la négociation des accords de l’audiovisuel public.
Sur plusieurs autres domaines les avancées sont réelles, notamment en ce
qui concerne les auteurs : je citerais l’accord en faveur de la transparence
dans la filière cinéma, faisant suite à la mission confiée à Roch Olivier
Maistre, ou le sujet de la formation continue des artistes auteurs. Depuis
la réunion du Conseil national des professions du spectacle (CNPS) de juin
dernier, beaucoup de réunions se sont tenues sur ce dossier, qui répond à
une attente ancienne. Tout est mis en oeuvre pour qu’un dispositif adapté
soit applicable dès l’année prochaine, dont la gestion sera confiée à
l’AFDAS. L’AFDAS dont je connais et appuie les demandes exprimées par
ailleurs sur d’autre sujets.
Concernant l’application des règles communautaires dans votre champ, je
sais que ce sujet a, dans un passé tout récent, été source de bien des
préoccupations voire d’ incompréhensions ou de crispations. La mission
qui est confiée à l’Inspection générale des affaires culturelles, permettra je
l’espère d’éclairer l’avenir. Mme Catherine Meyer Lereculeur et Monsieur
Benoit Paumier, qui connaissent bien à la fois les questions juridiques,
notamment européennes, du fait des fonctions qu’ils ont exercées l’un et
l’autre dans ce domaine, seront à votre écoute. Mme Meyer Lereculeur est
du reste parmi nous aujourd’hui pour un premier échange. Il s’agit de
permettre à votre secteur d’exercer son activité dans un contexte clarifié et
apaisé. La lettre de mission figure dans vos dossiers.
Je voudrais sur ce thème revenir sur quelques points. Tout d’abord vous
confirmer que le projet de décret relatif à la rémunération des agents
artistiques fera bien l’objet d’une nouvelle concertation dans les prochains
jours, sous la conduite de l’inspecteur général Serge Kancel. Ensuite vous
indiquer, s’agissant de la licence d’entrepreneur de spectacle, que la
transposition de la directive Services se traduit par la mise en place d’une
déclaration par les employeurs européens qui viennent exercer une activité
temporaire d’entrepreneur de spectacle en France. La loi du 23 mars 2011
vient de le confirmer. Et je puis vous le dire aujourd’hui, mais vous me
permettrez de ne pas en dire davantage : à ce jour, il s’agit de l’unique
traduction de cette directive sur la licence d’entrepreneur de spectacle.
Avant de conclure, je veux dire combien je me réjouis de vous rencontrer
et des échanges que vous engagerez sur ces dossiers qui engagent
l’avenir des professions du spectacle et de la culture dans le paysage que
je viens de dessiner.
Je vous propose maintenant non pas un tour de table général mais de
passer directement au premier point de l’ordre du jour, qui suscitera, je
n’en doute pas, des échanges nourris. Si vous en êtes d’accord, je cède la
parole à Jean–Denis Combrexelle pour un point sur les sujets qui relèvent
de sa compétence.