Discours de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé à l'occasion de la réception pour le Forum des instituts culturels étrangers à Paris -

« Paris brille-t-il ? » En vous accueillant aujourd’hui, je ne résiste pas à la
tentation de reprendre le titre d’une des tables rondes organisées
prochainement par le Centre culturel canadien à l’occasion de la Semaine
des cultures étrangères, que le FICEP organise désormais pour la
neuvième fois consécutive. Si Paris brille, c’est aussi grâce à vous et à ce
maillage unique que constituent vos 46 instituts et représentations
culturelles dans la capitale. Comme les personnages de La Fée électricité
de Raoul Dufy, vous contribuez à façonner le tableau culturel de la
capitale.
Ville d’accueil pour les artistes et les intellectuels du monde entier, Paris a
relevé le défi d’être à la hauteur de sa propre histoire. Il n’y a pas lieu
aujourd’hui de vivre sur le seul souvenir des années Montmartre,
Montparnasse ou Saint-Germain-des-Prés : Paris a su pleinement garder
son potentiel d’attraction, cosmopolite et pluriel. Aujourd’hui Paris est, entre
autres, l’une des capitales des musiques africaines, et l’une des capitales
du monde arabe. De cette capacité d’attraction, la densité de votre réseau
est un signe. Je tiens à saluer d’ailleurs la Ville de Paris, qui va croiser
votre programmation de la Semaine des cultures étrangères avec celle de
la Nuit blanche.
Vous avez choisi cette année de mettre à l’honneur le patrimoine matériel
et immatériel : une initiative à laquelle je suis d’autant plus sensible que
j’accorde une très grande importance à la préservation et à la valorisation
du patrimoine, et aux engagements multilatéraux que cela implique. J’ai
signé à ce titre avec ma collègue la Secrétaire d’Etat à l’Ecologie, le
lendemain des Journées européennes du patrimoine, une Charte
d’engagement sur la gestion des biens culturels français inscrits à la Liste
du patrimoine mondial. La Semaine des cultures étrangères va donc être
aussi une belle occasion pour les publics de Paris de découvrir vos
approches spécifiques sur les questions patrimoniales.
Je tiens à saluer la densité et la qualité des manifestations que vous
proposez, qui : les tables rondes sur le numérique à l’Institut italien y
croisent le Flamenco à l’Institut du Monde Arabe. Ces événements incitent
également les visiteurs à pousser, parfois pour la première fois, les portes
de vos instituts ; dans d’autres cas, vous les proposez hors les murs, en
partenariat avec les établissements culturels français : je pense par
exemple à l’exposition grecque sur Ulysse de Tennyson à Borges au
Musée Gustave Moreau, le rituel chamanique coréen au Quai Branly, ou
encore l’exposition sur l’art de Slovaquie au XVème siècle au Musée de
Cluny, que j’ai eu le grand plaisir d’inaugurer récemment avec mon
homologue slovaque.
Oser franchir les portes de vos instituts, c’est aussi pour chacun se
donner la possibilité de franchir le plus beau et le plus intime des portails :
je veux parler de la langue. De nouveau cette année, Xavier North et la
Délégation générale de la langue française et des langues de France de
mon ministère se sont associés à vous, avec L’Express comme
partenaire, pour proposer à l’occasion de la Journée européenne des
langues, un « passeport pour les langues » qui permettra, pendant la
Semaine des cultures étrangères, de profiter de cours d’initiations à plus
de trente langues. S’initier à la langue de l’autre, c’est s’ouvrir à la
grammaire de son imaginaire. Cette semaine, l’exotisme ou l’étrangeté ne
seront plus des excuses, car les portes sont ouvertes.
La chance de vous avoir à Paris, c’est bien sûr de pouvoir bénéficier de la
programmation de vos instituts et services culturels, qui représentent
autant de points de rayonnement. Mais en réseau avec le FICEP, vous
parvenez à dépasser vos fonctions de représentation. Vos instituts ne
sont pas les vitrines de la seule diplomatie publique : ce sont aussi, bien
sûr, de formidables outils pour favoriser la mobilité des artistes et susciter
par exemple les résidences croisées.
Votre Forum nous donne également l’opportunité de croiser les savoirfaire
de chacun. Je suis particulièrement sensible à l’idée qu’une meilleure
mise en commun de nos approches, de nos idées et de nos pratiques
dans le domaine de l’action culturelle est une nécessité si nous voulons
être mieux équipés pour relever les nouveaux défis de l’action culturelle
publique. Qu’il s’agisse des stratégies de diffusion à l’étranger, de l’aide à
la création, de la chance du numérique, de la valorisation de nos
patrimoines, votre Forum fournit une plateforme unique en son genre de
réflexion commune.
Cet esprit qui vous anime m’inspirera certainement lors de la prochaine
réunion des ministres de la culture de l’Union Européenne. C’est aussi
bien sûr dans cet esprit que je me rendrai à Avignon en novembre pour
ouvrir les rencontres internationales de la culture, de l’économie et des
médias, aux côtés de mon homologue allemand Bernd Neumann. Dans le
quotidien de la gestion, il ne faut jamais perdre de vue que l’horizon est
plus large, et que les approches closes sur elles-mêmes ne font plus
sens : les défis que nous devons relever, les questions que nous nous
posons en ce qui concerne l’efficacité de nos actions sont bien souvent
les mêmes. Votre présence est là pour nous le rappeler. Ce partage des
approches est, je crois, l’une des dimensions les plus importantes et les
plus opérationnelles de la promotion de la diversité culturelle et
linguistique : vous en êtes, avec le Forum des instituts culturels étrangers
à Paris, à la fois les avocats et les praticiens.
Pour toutes ces raisons, je tiens à vous dire à nouveau le prix que le
Ministère de la culture et de la communication attache à son partenariat
avec le Forum des instituts culturels étrangers à Paris. Passeurs et
médiateurs, vous êtes, avec vos équipes, les artisans de ce
décentrement. Je ne peux que vous en féliciter et vous en remercier.