C’est un très grand plaisir de recevoir ici, au ministère de la Culture, l’une
des plus grandes compagnies de ballet des Etats-Unis, pour sa première
tournée à Paris, au Théâtre du Châtelet. Vous étiez venu à la Biennale de
la danse de Lyon, mais vous ne vous étiez pas encore produit à Paris ;
vous voici.
Il y a un siècle quasiment jour pour jour, au printemps 1911, on créait
Petrouchka de Stravinsky avec Vaslav Nijinski dans le rôle-titre, au
Châtelet. L’histoire de la danse est faite de filiations, et quand on connaît,
cher Edward Villella, l’influence majeure que George Balanchine, lui-même
très lié à Stravinsky, a eu sur votre travail, on peut dire en un sens
qu’aujourd’hui avec votre compagnie, vous revenez chez vous.
Le Théâtre du Châtelet, qui accueille pour trois ans les Etés de la danse, a
reçu l’année dernière les ballets russes de Novossibirsk, pour l’un des
moments forts de l’Année France-Russie. Le New York City Ballet et
l’American Ballet Theatre ont été aussi de la partie dans les éditions
précédentes, et c’est désormais le tour du Miami City Ballet de venir
occuper ces murs qui furent marqués par plusieurs décennies de
spectacles inoubliables. Le Théâtre du Châtelet aura vu passer les plus
grands chefs de l’histoire de la musique ; les plus grandes compagnies
aussi, car la danse y occupe de longue date une place centrale, depuis les
Ballets russes de Diaghilev.
En 1986, l’un des plus grands danseurs américains fonde un nouveau
ballet, sous le soleil de Floride : c’est vous, Eddie Villella, l’interprète
inoubliable de Balanchine, le danseur étoile du New York City Ballet, qui
relevez ce défi de montrer que la quête de la perfection, pour les danseurs
américains, n’est pas seulement une affaire new-yorkaise. Votre
compagnie figure désormais parmi les toutes premières aux Etats-Unis ;
l’école de danse que dirige votre épouse Linda Villella contribue également
à son rayonnement mondial. Vous avez su tirer le meilleur parti de ce que
Miami pouvait offrir, en attirant les plus grands talents dans une troupe très
internationale, avec notamment le meilleur des danseurs de ballet
d’Amérique Latine : Cuba, le Brésil, le Vénézuéla, Puerto Rico, le Mexique,
pour un laboratoire de créations chorégraphiques à l’image d’une ville
ouverte vers le Sud, aux influences multiples. Le comté de Miami-Dade ne
s’y est pas trompé, en vous soutenant dans l’organisation de cette tournée.
Cher Marina de Brantes, cher Valéry Colin, en sept ans d’existence
seulement, les Etés de la Danse se sont imposés comme un rendez-vous
de référence. Un rendez-vous très singulier, qui vise avant tout
l’excellence, avec une programmation très resserrée, centrée sur une ou
deux compagnies invitées : cette année, ce sont donc Mikhaïl
Baryshnikov, pour une première au Théâtre de Chaillot alliant la danse et
la musique, le théâtre et la vidéo, sur un texte d’Ivan Bunin, et le Miami
City Ballet.
George Balanchine, bien sûr, sera à l’honneur dans les oeuvres qui vont
être présentées au Châtelet. Mais ce sera également l’occasion de
découvrir les oeuvres des très grands créateurs qui figurent à votre
répertoire : Jerome Robbins, dont vous avez été, cher Edward Villela, l’un
des interprètes les plus appréciés ; Paul Taylor, et le Britannique
Christopher Wheeldon ; Twyla Tharp avec qui le jazz et Philip Glass, les
chansons de Frank Sinatra aussi, les smokings et les robes du soir font
leur entrée sur scène. Pour ces 17 représentations, vous serez
accompagnés par l’Orchestre Prométhée, sous la direction de Pierre-
Michel Durand, un formidable tremplin pour les jeunes musiciens issus
des meilleurs établissements d’enseignement. Si l’on ajoute à cela les
trois cours publics que vous donnerez et qui sont très attendus, je n’ai
aucun doute sur le succès que vous allez rencontrer, car les Etés de la
danse ont d’ores et déjà créé dans l’été parisien une alchimie particulière
avec les amoureux de la danse.
Votre présence ici fait honneur à un héritage commun que l’Europe, la
France et les Etats-Unis ont en partage. Je suis très heureux de pouvoir
vous le redire : vous êtes ici chez vous.