Lancé en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire, l’Été culturel vise aujourd’hui à favoriser l’accès de tous à la culture, notamment pour ceux qui en sont privés du fait de leur situation économique, sociale, géographique, de santé ou de handicap. Avec une attention particulière portée aux publics ruraux et aux habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).
En partenariat avec des acteurs culturels émergents et des collectivités territoriales, l’Été culturel veut ainsi relier ces publics à une offre culturelle variée, locale et dynamique, tout en luttant contre le cloisonnement culturel à travers une multitude d’activités. La preuve par cinq temps forts.
Des « Respirations » au cœur de l’été
C’est un programme porté par trois acteurs : Cultures du cœur, la Fédération des acteurs de la solidarité et les Petits Débrouillards. Ces trois entités travaillent depuis 2019 sur Respirations, qui croise les mondes du social, de la culture et de l’éducation populaire dans cinq régions. Le programme vise à développer la place des pratiques culturelles dans les structures d’hébergement à destination des personnes en situation de grande précarité.
Depuis 2020, ce programme a donné naissance à un petit frère : le fonds de soutien Respirations, qui finance depuis 2020, dans le cadre de l’Été culturel, des projets de médiation culturelle, artistique, scientifique et sportive à destination de ce même public composé de SDF, réfugiés ou femmes victimes de violences, en structure d’hébergement ou à la rue. « Ce fonds a montré à quel point il était essentiel, dans notre secteur, d’accélérer les actions de développement culturel pendant ces périodes creuses où il y a besoin de faire société et de vivre des moments de culture et de partage car c’est une période où l’on peut se sentir assez esseulé lorsque l’on est en structure sociale. C’est aussi une autre manière de créer du lien entre les travailleurs sociaux et les personnes accompagnées », souligne Tiphaine Guérin, responsable culture pour la Fédération des acteurs de la solidarité. Depuis le début, Respirations a soutenu 71 projets de 75 structures culturelles et d’une centaine de structures sociales dans dix régions.
Ce fonds de soutien est ouvert à toute la France, avec une véritable complémentarité entre la structure sociale et les partenaires et une alliance entre pratique scientifique et artistique. Près 25 projets sont prévus cet été, sous des formes très variées, in situ ou hors les murs. « Ils se présentent souvent sous la forme d’un parcours d’ateliers lié à des sorties culturelles dans les structures sociales mais aussi avec des partenaires culturels du territoire », poursuit Tiphaine Guérin. Il s’agit par exemple, en Occitanie, de découverte de lieux patrimoniaux en transports en commun pour les personnes ne pouvant pas s’éloigner de leur logement. Cela peut être aussi, en région parisienne, des distributions alimentaires couplées avec des visites de lieux culturels et de pratiques artistiques ou enfin, en Auvergne-Rhône-Alpes, d’ateliers en fablab ouverts tout l’été. Enfin certains projets mêleront le sport comme Aquarius en Bretagne, qui proposera à une quinzaine de mineurs non accompagnés de vaincre leur peur de l’eau avec des activités aquatiques (natation, kayak, aviron) et un suivi psychologique.
Filmer pour « rêver ses JO » avec les Amis du Comedy Club
Cette année, ce sera déjà la quatrième édition de « Filme l’avenir », les ateliers d’initiation à la réalisation de films lancés par l’association des Amis du Comedy Club. Tout l’été, une grande tournée sillonnera dix-huit villes de plusieurs régions de France pour permettre à des jeunes – 25 à chaque atelier – de s’initier à tous les aspects de la réalisation de films sur mobile d’une durée de 90 secondes. Ils seront accompagnés par les figures montantes de l’association Talents en Court au Comedy Club, comme les scénaristes Enricka MH, Hélène et Marie Rosselet-Ruiz, toutes trois nommées aux César 2023, ou les réalisateurs Zoel Aeschbacher et Djigui Diarra.
À un an des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, cette nouvelle édition sera centrée sur le sport avec un thème, « Rêve tes JO », qui invitera les participants à réaliser des films autour des Jeux et de l'esprit sportif. Des clubs et associations sportives pourront se joindre à l’événement afin de créer des ponts entre sport et culture et des champions comme la handballeuse Grâce Zaadi, l’athlète Nantenin Keïta ou encore l’escrimeuse Ysaora Thibus s’inviteront autour de certains événements afin de transmettre l’esprit sportif aux jeunes.
Après ces ateliers, soixante films seront sélectionnés et diffusés sur France TV slash. Un jury constitué de professionnels et de figures emblématiques délibèrera et de nombreux prix seront offerts aux gagnants comme des accompagnements sous la forme d’un tutorat pour réaliser son prochain film dans des conditions professionnelles avec les Talents en Court au Comedy Club.
Figures Livres : un jeu de cartes pour mêler défis sportifs et de lecture
Inscrire la lecture dans le quotidien, former les parents à la lecture pour leurs enfants, tels sont les objectifs du projet d’envergure nationale « Figures Livres » proposé par le Centre de promotion du livre jeunesse. Ce dispositif, inscrit dans l’Été culturel, accompagne les familles pendant le temps des vacances, dans la droite lignée du projet « Des livres à soi » qui vise à offrir des temps parents-enfants autour de la littérature jeunesse. « Certains parents n’ont pas le temps de faire la lecture, d’autres n’en sont pas capables car ils ne peuvent par exemple pas lire de livres en langue française. Nous leur proposons des méthodes pour surmonter ces obstacles », résume Sylvie Vassallo, directrice du Centre de promotion du livre jeunesse.
« Figures Livres » se déroule en deux temps. Le premier directement au domicile des parents puisque 7 000 familles vont recevoir un kit ludique pour jouer avec la lecture. À l’intérieur, une affiche, des chèques lire pour se constituer une bibliothèque, mais aussi un jeu de quarante cartes illustré par l’artiste Violette Vaïsse et marrainé par la boxeuse Sarah Ourahmoune. Chaque carte combine défi sportif et consigne de lecture autour de quatre types de jeu : vitesse, équilibre, raquette ou expression. « L’idée est de mettre le livre dans le quotidien et d’en faire un objet de manipulation qui n’est pas uniquement lié à la lecture et donc le rendre familier », souligne Sylvie Vassallo. Le thème retenu, celui du sport, entre ainsi en résonnance avec les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 dans le cadre de l’Olympiade culturelle.
Ce jeu de cartes sera distribué en plus grand format à 250 structures sociales - en plus de cinq affiches et de livres - pour leur permettre d’organiser des animations littéraires et sportives collectives. Les structures concernées sont réparties dans 18 régions, avec une attention renforcée pour les Quartiers prioritaires de la ville, la ruralité et les territoires ultra-marins puisque cinq régions d’Outre-mer sont également concernées.
Cet été, Chaillot part en colo !
Dispositif déjà utilisé pendant l’année pendant les vacances scolaires, Chaillot Colo se met également à l’heure d’été. Cette année, quatre séjours culturels seront prévus pendant les vacances. À chaque fois, ils embarquent une vingtaine de jeunes âgés de 8 à 17 ans et d’horizons sociaux différents pour une semaine ou deux afin de vivre une expérience inédite de création artistique dans un environnement spécifique. Ces jeunes sont encadrés par une équipe pluridisciplinaire d’artistes et d’animateurs et tout le groupe partage l’organisation de la vie collective et rencontre les habitants du lieu d’implantation. « Ce dispositif est une réponse au fait que certains enfants, pour des raisons économiques ou culturelles, ne partent pas en vacances, nous expliquait en octobre dernier Rachid Ouramdane, président directeur de Chaillot - théâtre national de la Danse. L’idée est de s’inscrire dans leur rythme de vie en leur proposant des ateliers autour du mouvement pendant les vacances. »
Parmi les séjours estivaux, des jeunes de Seine-Saint-Denis iront au centre de Loisirs Mériel pour un programme mêlant cirque et sport avec acrobatie et slackline. La colo 2022 d’Angoulême à Paris jouera son acte 2 en juillet avec la chorégraphe Jann Gallois. Des jeunes Martiniquais seront également à Paris pendant quinze jours pour travailler sur un atelier sur les comédiens Gal Hurvitz et Yannick Kamanzi, artistes de la metteuse en scène Aurélie Charon. Enfin la dernière colo emmènera une vingtaine de jeunes âgés de 11 à 14 ans de la commune de Saint-Laurent du Maroni pour une découverte des arts du mouvement à Mana en Guyane, en collaboration avec Touka Danses. « Le travail se fait à échelle multiple, avec des directions régionales des affaires culturelles, des villes, des collectivités locales, et parfois aussi directement avec des lieux culturels. Notre modèle est ouvert », poursuit Rachid Ouramdane. En tout, ces colos devraient bénéficier à deux cents enfants et jeunes, dont la plupart habitant en Quartier prioritaire de la ville, et treize artistes seront mobilisés.
Des capsules vidéos sur la transition énergétique avec le réseau des écomusées
Après le succès de leurs cartes postales sonores l’an dernier, la Fédération des écomusées et des musées de société (FEMS) s’implique de nouveau dans l’Été culturel sous un format différent : celui des capsules vidéos. « Nous proposons pendant l’année des formats plus souples et hybrides avec des échanges. L’Été culturel vient parfaitement s’insérer dans cette démarche car c’est un projet monté à l’échelle de notre réseau qui donne un bon aperçu de la diversité de notre réseau », explique François Dossun, coordinateur du réseau. La fédération compte près de 190 adhérents - musées, écomusées, musées de société - sur tout le territoire.
Pour cette année, la FEMS a choisi le thème qui va l’animer pendant ces prochaines années : la transition écologique. En mai dernier, dix projets ont été sélectionnés suite à un appel à manifestation d’intérêt. Des ateliers auront lieu pendant tout l’été, encadrés par des artistes très divers comme des photographes, designers, ou des documentaristes. « Notre seule condition, c’est qu’ils soient émergents, fraichement diplômés et sur des territoires qu’ils connaissent bien », souligne François Dossun. La capsule video sera l’œuvre en elle-même ou une trace du travail mené.
Autre point commun : ces ateliers exploreront le lien entre le musée, son public et le territoire dans lequel il est implanté. C’est par exemple le cas du projet des musées départementaux du Tarn qui feront appel à différents artistes sur plusieurs sites pour mettre en évidence la place de l’eau, des ressources et des savoir-faire locaux. Les questions de la forêt et du changement climatique seront également très présentes comme par exemple à l’écomusée de la Sainte-Baume dans le sud de la France ou celui des Monts d'Arrée en Bretagne, ces établissements ayant été impactés l’an dernier par des incendies. Enfin le musée français du pétrole, dans les Vosges, fera le lien entre passé et futur.
Cette dizaine d’ateliers devraient toucher cette année un public plutôt jeune et local, ne partant pas en vacances. « L’idée est d’aller toucher ces publics peu coutumiers des musées et cet Été culturel est un moyen pour les adhérents de se rapprocher d’eux d’une autre manière que par leur programmation. Cela peut aboutir à un travail sur du plus long terme avec les musées, des débuts de collaboration et des projets d’expositions », note François Dossun. Comme l’an passé avec les cartes postales sonores, ces dix capsules vidéo seront partagées en ligne sur une carte interactive.
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